Gagner en proximité, une question de méthode
CGT Airbus. 2014 sera une année électorale pour la CGT Airbus. Les militants s’y préparent. Question de représentativité, bien sûr. Mais ils entendent également devenir... Lire la suite
L'atmosphère est lourde. Les militants accusent le coup. Les résultats définitifs issus du scrutin organisé à Nantes, Saint-Nazaire et Toulouse – les trois sites français de la filiale – viennent de tomber : « C'est catastrophique, déclare Philippe Fernin, l'actuel délégué syndical central adjoint de la CGT Airbus. On a perdu notre représentativité à Toulouse. Heureusement, la CGT est encore représentative à Nantes et Saint-Nazaire, également au niveau de la filiale à quelques dizaines de voix près… » Le syndicat sauve les meubles, mais recule partout.
La mainmise de Force Ouvrière rend difficile un travail de terrain qui aurait permis d'élargir l'audience du syndicat, d'affirmer une différence en matière de valeurs, de revendications et de vision industrielle pour Airbus. « La taille, la répartition territoriale et les effectifs du groupe finissent de rendre la tâche complexe, ajoute celui qui brigue le mandat de délégué syndical central. L'ensemble de ces éléments nous avait conduits à remettre à plat notre méthode de travail et à clarifier nos propositions en direction des salariés airbusiens et sous-traitants en partant du travail réel. L'échéance des élections professionnelles motivait cette réflexion-action et, même si notre objectif n'est pas atteint, on ne regrette pas ce que l'on a fait. »
Encouragés par les 4 300 retours du questionnaire distribué cette année à la sortie des douze cantines installées sur les trois sites, les militants de la CGT Airbus font, dès le mois de février, le pari mesuré d'élargir leur communication et leur propagande au web et aux réseaux sociaux. Ils créent un site internet et un compte Twitter, alimentés régulièrement de vidéos et de contenus qui dénoncent autant la réalité sociale du groupe, qu'ils disent les revendications de la CGT Airbus en matière d'alternative industrielle et de perspectives d'emploi.
« On est déçu par ses résultats, mais on a fait le maximum, ajoute le militant. Je pense que le contexte général, au sein du groupe comme ailleurs, n'a joué ni en faveur de la participation, ni en faveur du syndicat. » Une certitude demeure toutefois, deux en fait : « Cette campagne, la manière dont on l'a conduite, a quand même été utile. Sans elle nombre de salariés, notamment des cadres, ne se seraient pas rapprochés de la CGT au point même, pour certains, de se porter candidats sur nos listes. Sans elle, on n'aurait pas mis à jour notre vie syndicale, ni clarifié nos revendications. »
Les militants en restent convaincus : Airbus doit changer d'ère. Le quotidien et l'avenir des salariés de l'avionneur, ceux de ses sous-traitants également, en dépendent. Tandis que le leader mondial du secteur, devant Boeing, cumule les records de commande, le futur s'annonce tumultueux pour les effectifs de la filiale.
Le budget de la recherche et développement continue de fondre – 5,8 % en 2013, soit quelque 3 points de moins en 4 ans –, gelant le lancement de tout nouveau programme ; une première depuis trente ans. Les sous-traitants paient déjà un lourd tribut à cette baisse de charge au sein du bureau d'études, avec la destruction de 3 000 emplois en 3 ans, tandis que les actionnaires privés d'Airbus maintiennent à 10 % le seuil de rentabilité financière escompté. « Voilà pourquoi nous garderons le cap, avec les moyens et les représentants qui nous restent », affirme Philippe Fernin.
La loi du 20 août 2008, qui modifiait les règles de la représentativité syndicale, prévoit en effet qu'un syndicat est représentatif lorsqu'il recueille au moins 10 % des suffrages au premier tour des élections au comité d'entreprise. Or, seules les organisations représentatives participent aux négociations collectives. La voix de la CGT portera encore à l'échelle de la filiale, aussi sur les sites de Nantes et de Saint-Nazaire, mais plus sur celui de Toulouse.
« Notre souci majeur, le même depuis plusieurs années d'ailleurs, reste de faire entendre aux salariés qui s'estimeraient encore à l'abri, les dangers qui pèsent sur les conditions de travail et l'emploi. »
Si le contexte post-électoral semble défavorable au syndicat, les lignes bougent toutefois.
La CGT Airbus fait davantage entendre ses réflexions et ses revendications. Elle rencontre également de plus en plus les attentes des salariés. La sympathie acquise à la suite de la procédure engagée contre le processus d'évaluation P&D est révélatrice de ce changement, même si elle n'est pas seule suffisante. « Nous ne sommes pas encore vraiment en capacité de mesurer l'impact de notre démarche, mais les premiers signes sont encourageants, admet Philippe Fernin. Des salariés, des ingénieurs, des cadres et des techniciens que l'on avait du mal à approcher à Toulouse notamment, prennent contact avec nos représentants ou nos syndiqués. Les nouveaux adhérents n'hésitent pas à s'investir, en s'impliquant dans la vie syndicale ou en devenant candidats sur nos listes. »
L'audience du site internet constitue un autre indicateur, et un bon indicateur même : 30 000 connexions depuis sa création en février, et un intérêt accru pour la plaquette dédiée à la problématique des salaires. « Ces informations représentent des éléments d'enquête qui s'ajoutent à ceux que nous recueillons sur le terrain, conclut le militant. Elles orientent nos stratégies, syndicale et électorale : on sait de quoi parler et à quel moment. Elles rassurent aussi. »
La CGT Airbus a certes perdu des voix, mais elle gagne en réseau.
Les valeurs de la CGT Airbus Toulouse par cgtdescadres
Un site internet outillé par References-Syndicales.fr, la plateforme internet de l'UGICT-CGT (airbus31.reference-syndicale.fr), et un compte Twitter (twitter.com/CGTAirbus31) complètent la panoplie des militants qui peuvent désormais informer le plus grand nombre et élargir leur audience.