14 mai 2020 | Mise à jour le 20 mai 2020
Loin devant les grosses boîtes largement médiatisées du CAC 40, les TPE représentent la grande majorité des entreprises françaises. Des entreprises dont le déconfinement est à leur image, hétérogène.
« Haut les cœurs et au boulot ! » Déconfinement oblige, le nouveau credo gouvernemental est désormais clair depuis le 11 mai : il faut sauver le soldat France. Et nos ministres d'appeler au sauvetage le plus rapide possible de l'économie, à une reprise de la production. Ce, en respectant toutefois quelques gestes de sécurité devenus aujourd'hui basiques, comme le port du masque ou le respect des distanciations physiques.
Les TPE : 94 % des entreprises, 20 % des salariés du pays
Un appel que n'ont d'ailleurs pas attendu les grands groupes industriels pour rouvrir leurs portes, au prix de quelques aménagements, et encore, mais auquel certaines TPE ont et auront plus de mal à répondre. Or les TPE, qui regroupent petits commerces alimentaires et assistantes maternelles, sous-traitants de la construction ou de l'automobile et cafetiers, secteurs de l'événementiel ou associatif, du tourisme ou des services… constituent 94 % des entreprises françaises et emploient environ 20 % des salariés du pays.
Alors que, pour certains secteurs (culturel, restauration…), le retour au travail n'est pas à l'ordre du jour – avec les menaces que cela fait peser sur les centaines de milliers d'emplois concernés –, pour les autres, « la question du déconfinement et les réalités que connaissent les salariés sont aussi disparates et hétérogènes que le sont les TPE », reconnaît Angeline Barth, représentante de la FNSAC-CGT *, rappelant que « certaines TPE ont été au front et n'ont pas arrêté leur activité ».
Quelle protection pour les salariés des TPE ?
« Là, il n'est pas question de déconfinement, par contre il est toujours autant question de protection des salariés », regrette la syndicaliste. Elle en veut pour preuve des remontées de terrain évoquant une situation « catastrophique » quant à la sécurité des personnels. Les salariés devant eux-mêmes se trouver des masques, « pas évident selon les territoires », ou se voyant dotés d'un seul masque « pour une semaine ».
Cette question, les TPE qui se remettent en état de marche devront également y répondre. « Est-ce que les employeurs vont pouvoir mettre à disposition des protections ? » Angeline Barth reste plus que dubitative. « Il y a une déresponsabilisation des entreprises sur ces questions-là depuis la crise du H1N1 [en 2009-2010, NDLR] et aujourd'hui, dans les guides négociés dans les branches ou dans les fiches du gouvernement, le port du masque n'est obligé qu'aux postes de travail où l'on ne peut pas respecter les gestes barrière. Or, on sait que, dans la construction, par exemple, la distanciation physique n'est pas possible. »
L'organisation patronale U2P dénonce des coûts supplémentaires à venir
Et l'U2P, l'Union des entreprises de proximité, organisation patronale réunissant artisans, commerçants et professions libérales, de monter au créneau, dénonçant des coûts supplémentaires à venir. « C'est vrai que ces mesures de protection, le coût des masques et des gels, la réorganisation du travail vont aussi impacter ces entreprises et être plus difficiles à mettre en place dans les TPE, mais la question de la sécurité y est tout autant importante qu'ailleurs », appuie Angeline Barth. « Surtout là où les salariés ont du mal à y avoir droit. »
La vigilance reste donc de mise, d'autant que, avec les dérégulations du Code du travail et/ou des conventions collectives, les dérogations permises par le gouvernement, entre autorisation de travailler davantage et découverte soudaine des bienfaits de la « continuité d'activité à domicile », « pas besoin d'acheter de masques, plus de frais de structures », certains employeurs pourraient en profiter.
Ce, alors que le secteur des TPE souffrirait déjà d'un sérieux manque de démocratie sociale. « Les commissions paritaires régionales mises en place, qu'elles soient de l'artisanat, interprofessionnelles ou pour les professions libérales, sont en dehors de l'entreprise et sont éloignées ou inconnues des salariés », souligne la représentante syndicale, qui revendique que « les mandatés de ces commissions puissent intervenir dans les entreprises, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui ».
« C'est là que la connaissance à la fois des fédérations, celles des secteurs d'activité et du territoire au niveau des UD, des UL vont être primordiales pour être au plus près des salariés », insiste Angeline Barth. Proximité nécessaire alors que les élections professionnelles dans les TPE « ont été décalées de deux mois et auront lieu du 25 janvier au 7 février 2021 ».
* Fédération nationale des syndicats du spectacle, du cinéma, de l’audiovisuel et de l’action culturelle