OpenLux : le Luxembourg au cœur d’un nouveau scandale fiscal
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Il y a deux semaines sortait la liste des noms de riches personnalités qui avaient bénéficié d'aide à l'évasion fiscale par la filiale suisse de la banque HSBC, HSBC Private Bank. Aujourd'hui, c'est la chaîne de restauration rapide américaine McDonald's qui est accusée d'avoir minutieusement compartimenté ses bénéfices pour réduire ses impôts.
«La fraude et l'optimisation fiscale – illégale pour la première et légale pour la deuxième – ne sont pas des pratiques isolées. Elles sont révélées au grand public au coup par coup, avec des noms comme des arbres qui cachent la forêt. Mais elles sont très répandues dans le monde économique, elles font système», explique d'emblée Alexandre Derigny, secrétaire général adjoint de la fédération des finances CGT. Et de préciser: «l'optimisation fiscale a beau être une démarche légale, elle est moralement inacceptable et nous la condamnons».
«McDonald's a délibérément diminué son exposition fiscale [montant des bénéfices imposables – ndlr] en Europe pour un montant total de plus d'un milliard d'euros sur une période de cinq ans». Dans leur communiqué commun, la fédération syndicale européenne des services publics (EPSU), la fédération européenne des syndicats de l'alimentation, de l'agriculture et du tourisme (EFFAT) et l'union internationale des employés de service (SEIU) dénoncent un schéma d'optimisation fiscale qui aurait permis au géant de la restauration rapide en Europe de soustraire, entre 2009 et 2013, plus d'un milliard d'euros de recettes fiscales à plusieurs pays, au premier rang desquels figure la France.
Selon les calculs des trois organisations, au cours de la période, le roi du hamburger aurait fait remonter plus de 3,7 milliards d'euros de ses restaurants européens vers sa holding luxembourgeoise McD Europe Franchising, qui s'est acquittée de 16 millions d'euros d'impôts dans le Grand-duché. Or, si ces revenus avaient été imposés dans leurs pays d'origine, McDonald's aurait dû verser 1,05 milliard d'euros supplémentaires, principalement au fisc français, dont la perte de recettes est évaluée par les syndicats entre 386,2 et 713,6 millions d'euros, auxquels pourraient s'ajouter entre 308,9 et 570,9 millions d'euros de pénalités.
Selon Gilles Bombard, délégué CGT de la société McDonald's Ouest Parisien – 18 restaurants, près de 1000 salariés – le total des redevances versées au groupe atteint 19% à 24% du chiffre d'affaires des restaurants, essentiellement au titre des loyers et de l'utilisation de la marque. «Tous les surplus [de bénéfices – ndlr] remontent au siège et tous les restaurants sont déficitaires», ce qui permet à l'entreprise de ne pas payer d'impôt sur les sociétés et de faire en sorte qu'«aucun salarié ne touche de participation sur les bénéfices».
Une pratique «injuste pour les salariés et pour tous les contribuables qui en subissent le préjudice par ricochet». Et de s'étonner «qu'il n'y ait pas de réaction du gouvernement», alors que McDonald's est soupçonné d'évasion fiscale depuis plus d'un an.
Cette pratique est «malheureusement presque un classique, confirme Alexandre Derigny de la fédération des finances CGT. Nombre de multinationales bien connues pratiquent l'optimisation fiscale». Microsoft, Amazon, Google, Ikea, Apple et d'autres enseignes du quotidien ont déjà été montrées du doigt à ce sujet par le passé. Mais pour en rester aux chaînes de restaurants, le montage de Starbucks France suit le même modèle, elle «achète son café à prix d'or à sa filiale suisse et reverse des royalties pharamineuses à son siège irlandais – où les taux d'imposition sont bas – pour réduire ses bénéfices en France et ainsi payer le moins d'impôts possibles là où le régime fiscal est le plus astreignant».
«Nous demandons à la Commission européenne, aux autorités fiscales nationales, ainsi qu'à la commission spéciale du Parlement européen d'examiner de près les pratiques fiscales de McDonald's avant de prendre les mesures appropriées», réclament les trois fédérations syndicales.
Retrouvez l'enquête consacrée aux pratiques d'évasion et d'optimisation fiscale dans le mensuel «NVO» de mars 2015.
Voir notre article : Evasion fiscale : le hold-up du siècle
Voir le documentaire de Xavier Harel : « Evasion fiscale, le hold-up du siècle »
Voir notre article « Bénéfices privés contre bien commun » (2013)
Voir le documentaire de Pierre Oscar Levy : « Quand les entreprises jouent à cache-cash »
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