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HÔPITAL

Rébellion « symbolique » et inédite de plus de 1 000 médecins de l’hôpital public

15 janvier 2020 | Mise à jour le 15 janvier 2020
Par et
Rébellion « symbolique » et inédite de plus de 1 000 médecins de l’hôpital public

En conférence de presse, les chefs de services des hôpitaux publics annoncent leur démission des tâches administratives.

Une rébellion « symbolique », mais « sans précédent » : plus de 1 100 médecins hospitaliers se sont engagés mardi à démissionner de leurs fonctions administratives si Agnès Buzyn n'ouvre pas de « réelles » négociations sur le budget de l'hôpital et l'augmentation des salaires.

« L'hôpital doit être réformé, mais il n'y a pas de grande réforme possible sans moyens », écrivent les signataires d'une lettre adressée à la ministre de la Santé et publiée par Libération, dénonçant « l'insuffisance » du plan d'urgence dévoilé fin novembre.

« C'est pour vous alerter solennellement que nous avons pris en toute responsabilité la décision inédite et difficile de démissionner collectivement à partir du 14 janvier 2020 si à cette date des négociations ne sont pas engagées », préviennent ces « chefs de service, responsables d'unités fonctionnelles » et autres « responsables de pôles » issus de toute la France.

Tous réclament « une revalorisation significative des salaires, en plus des diverses primes annoncées », une rallonge supplémentaire de 600 millions d'euros pour les hôpitaux en 2020 et « une révision profonde » de leur mode de financement et de leur gouvernance.

Pas d'arrêt des soins, mais arrêt des tâches administratives

Pas question d'arrêter les soins. Il s'agit d'abandonner le rôle de « chef d'orchestre » et d'interlocuteur avec l'administration, notamment pour la gestion des plannings ou lors de réunions « dont le seul thème est financier ou économique », a expliqué le professeur Stéphane Dauger, membre du collectif Inter-Hôpitaux et chef du service de réanimation pédiatrique à Robert Debré, lors d'un point presse à la Pitié-Salpêtrière.

Un rendez-vous auquel s'est rendue la professeure Agnès Hartemann, cheffe « démissionnaire » du service de diabétologie du même établissement, avec « émotion » et « l'impression d'aller à un enterrement », celui de son « titre » et « un peu celui de l'hôpital public ».

Manque de personnel, course à l'activité et « tableaux Excel » chronophages, sensation d'être « un robot » obsédé par la date de sortie des malades, surcharge de travail telle qu'il faut « trier les patients » pour ménager les infirmières… Le tableau dressé par la Pr Hartemann, « éthiquement insupportable », n'est pas nouveau.

Pénuries d'infirmières

Mais la crise a franchi un palier avec la pénurie d'infirmières, « parties les unes après les autres », s'alarme-t-elle.

« Il y a 400 postes d'infirmiers vacants rien qu'à l'Assistance publique — Hôpitaux de Paris », où 900 lits ont été fermés faute de personnel, a rappelé son confrère, le Pr Xavier Mariette, chef du service de rhumatologie de l'hôpital Bicêtre.

D'où la revendication première d'une augmentation de 300 euros net des salaires, reprise au collectif Inter-Urgences, à l'origine de la grève inédite qui s'est étendue depuis mars à tout l'hôpital et touchait toujours 267 services d'urgences début janvier.

« Goutte d'eau »

Point d'orgue du mouvement, soutenu notamment par les syndicats, plusieurs milliers d'hospitaliers avaient défilé partout en France le 14 novembre.

Une « grève du codage » — c'est-à-dire de la transmission d'informations permettant aux établissements de facturer leurs actes à l'Assurance maladie — a également été lancée dans certains services il y a plus de trois mois.

La réponse du gouvernement ? « Un plan de 1,5 milliard sur trois ans qui en fait, quand on le décortique, n'est que de 200 millions par an », une « goutte d'eau » comparée au budget annuel de l'hôpital, de « 85 milliards », s'est indigné le Pr Mariette.

La ministre assure qu’elle va recevoir les personnels

Agnès Buzyn a assuré mardi devant le Parlement qu'elle « recevrai (t) le collectif en fin de semaine » pour « leur expliquer à quel point aujourd'hui les mesures proposées répondent exactement aux enjeux » pointés. Notamment la reprise d'un tiers de la dette hospitalière sur trois ans (10 milliards d'euros), qui permettra de dégager entre « 800 millions et 1 milliard de trésorerie par an », soit « bien plus que ce que le collectif réclame ».

Mais c'est un « correctif budgétaire » que réclament les démissionnaires, déjà soutenus par quelque 5 000 professionnels de santé, signataires d'un texte également publié dans Libération.

Une centaine de blouses blanches se sont ainsi réunies dans le hall de la faculté de la Pitié à la mi-journée pour applaudir les participants de la conférence de presse. Et une nouvelle journée de mobilisation le 14 février est à l'étude avec les syndicats, le collectif Inter-Hôpitaux prévoyant de se réunir en assemblée générale nationale le 26 janvier.