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Automobile

Renault doit réintégrer les fonderies Saint-Jean Industries d’Ingrandes

5 décembre 2018 | Mise à jour le 6 décembre 2018
Par | Photo(s) : Alain Jocard / AFP
Renault doit réintégrer les fonderies Saint-Jean Industries d’Ingrandes

Depuis leur externalisation de Renault en 1998, les ex-fonderies du Poitou ont été séparées en deux. La partie « fonte » essuie aujourd'hui un PSE, et la partie « Alu » vient d'être placée en redressement judiciaire. Les salariés se mobilisent pour réclamer leur retour dans le giron de Renault.

C'est le 29 novembre 2018 que le tribunal de Commerce de Lyon a pris la décision de mettre en redressement judiciaire la fonderie Alu (ex-fonderies du Poitou d'Ingrandes-sur-Vienne, dans la Vienne). Ce jour-là, la fonderie était en grève et le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, avait fait le déplacement pour soutenir les salariés de cette entreprise qu'il connaît bien pour y être allé à plusieurs reprises lors leurs précédents combats.

La fonderie Alu et ses quelque 350 salariés en CDI attendaient avec angoisse la décision du tribunal qui a donné un délai de deux mois (jusqu'au 28 janvier 209) pour trouver un repreneur. Une seconde décision de justice devrait quant à elle intervenir le 13 février 2019. « Aujourd'hui, nous attendons la nomination d'un administrateur, la solution passerait soit par un industriel qui diversifierait les commandes, soit par la réintégration dans Renault » affirme Jery Begeault, secrétaire du CSE de Saint-Jean Industries. « Mais nous travaillons à 99 % pour Renault, c'est donc eux qui ont les clés en main… ».

La réintégration des fonderies a connu des précédents

Ce n'est pas la première fois que la CGT bataille pour réintégrer les fonderies que Renault a imprudemment externalisées depuis 1998. À cette époque, Renault s'était séparé de sept fonderies pour se conformer à sa stratégie dite de « recentrage sur le cœur de métier. » Sans Renault et sans les investissements nécessaires pour le maintien de l'outil, les fonderies livrées aux prédateurs et autres fonds de pension intéressés par la seule rentabilité à court terme ne peuvent tenir dans la durée.

À deux reprises, les combats menés notamment par la CGT pour la réintégration se sont terminés par de belles victoires ; qu'il s'agisse de la SBFM de Caudan (Morbihan) ou de la fonderie de Cléon (Seine-Maritime). Outre une dégradation des conditions sociales des salariés, le mauvais calcul d'une externalisation visant à économiser sur le dos d'entités devenues sous-traitantes avait fini par poser des problèmes de qualité ou de régularité de livraison.

Vingt ans d'errance

Parmi les sept fonderies externalisées par Renault, la fonderie du Poitou Aluminium (FDPA) a connu un sort chaotique jusqu'en 2011, passant des mains du groupe Teksid (Fiat) à celui d'un fonds de pension américain et d'un groupe allemand, avant d'être ensuite reprise par le groupe Montupet. En 2011, Montupet veut mettre en place un plan de compétitivité qui prévoit une baisse de 25 % des salaires ou le licenciement. Un conflit social de grande envergure éclate, et c'est cette année-là que la FDPA devient Saint-Jean Industries. Une reprise qui sauve 400 emplois.

Bien que demeurant physiquement sur le même site, FDPA est aujourd'hui séparée en deux entités distinctes, avec d'un côté Saint-Jean Industries Alu et de l'autre la fonderie fonte. Tandis que la fonderie Alu est actuellement en redressement judiciaire, la fonderie fonte fait actuellement l'objet d'un plan social. Celui-ci prévoit la suppression de 103 postes.

La région Nouvelle-Aquitaine a annoncé qu'elle pourrait débloquer une enveloppe de trois millions d'euros pour venir en aide à la fonderie fonte (mais n'a rien précisé concernant la fonderie Alu). Les salariés s'interrogent toutefois, car cette somme est insuffisante pour mettre en œuvre un projet global.

Renault et l'État ont les cartes en mains

Durant les années Ghosn, Renault a fait le choix de délocaliser une grande part de sa production de véhicules, ainsi qu'une partie de son ingénierie vers les pays low cost, notamment la Roumanie et la Turquie. La firme au losange envisagerait encore aujourd'hui la construction d'une nouvelle fonderie en Turquie. Cette situation alarme les salariés des deux entités des fonderies du Poitou.

La masse des aides que perçoivent les constructeurs automobiles — notamment au travers du CICE — et qui s'opère souvent au détriment des sous-traitants ne saurait être utilisée à favoriser de telles stratégies contraires aux intérêts de la filière automobile française.

Alors que le PDG cost-killer vient d'être incarcéré pour fraude fiscale, il serait peut-être d'actualité de réviser la stratégie mise en œuvre qui a conduit à dévitaliser la filière automobile française. Pour la CGT, au vu des 5 milliards de bénéfices engrangés cette année par Renault, la réintégration de l'ensemble des ex-Fonderies du Poitou dans Renault n'est pas de nature à mettre le constructeur en difficulté.

À moins de vouloir rejouer le le scénario du sous-traitant automobile GM&S, l'État et Renault pourraient ainsi montrer leur volonté de mettre un terme à la destruction d'une filière industrielle stratégique pour le pays.

 

Le communiqué de presse des élus CGT, FO et CFE-CGC des Fonderies du Poitou