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L'intersyndicale a dû sortir son « arme fatale » en la personne de Danny Glover, héros du film du même nom, pour être reçue avec des salariés de l'usine Nissan de Canton au ministère du Travail, à Paris. À l'issue de cette rencontre avec le cabinet de Myriam El Khomri, il aurait été obtenu que le ministère intervienne auprès de direction de l'alliance Renault-Nissan pour l'enjoindre de ne plus faire obstacle à l'organisation d'élections dans son usine de Canton.
Patrick Corréa, conseiller de la fédération de la métallurgie CGT en charge des questions internationales, qui accompagnait la délégation, fait le point sur ce dossier et les pratiques des entreprises françaises outre-Atlantique.
Patrick Corréa : Oui, ce n'est pas la première action. Une autre délégation de quatre travailleurs de Canton Mississippi est venue en juillet pendant le comité de groupe de Renault Monde, et nous avons manifesté devant le bâtiment où il se tenait.
Pour créer un syndicat aux États-Unis, il faut que 30% des salariés demandent l'organisation d'une élection. Le syndicat ne sera alors reconnu dans l'entreprise que s'il recueille plus de 50% des voix lors du scrutin. Dès cet instant, il y a obligation d'ouverture de négociations avec le syndicat. Or, à ce jour, les élections n'ont toujours pas été organisées à Canton.
De plus, Nissan a des pratiques très antisyndicales : la direction reçoit individuellement chaque salarié en lui disant que si le syndicat s'implante, demain on va délocaliser et que cela va menacer son emploi. Elle passe des films antisyndicaux dans l'entreprise et les managers font pression sur les salariés à leur poste de travail ou vont même parfois jusqu'à leur domicile. C'est ainsi qu'ils les tiennent.
En effet, d'ailleurs, récemment, le Bureau national du travail des États-Unis a condamné la pratique discriminatoire de Nissan. Mais la condamnation est symbolique, car il s'agit de la pratique des États du Sud. Il faut préciser que la plupart des salariés sont des Afro-Américains. Ils ressentent donc cela comme une attaque communautaire, où se mêle donc une dimension de racisme.
Malheureusement non. Aux États-Unis, l'ensemble des multinationales délocalisent leurs établissements d'États plus favorables aux syndicats et ayant des conventions collectives vers des Etats où la législation est plus défavorable aux syndicats. De nombreuses entreprises pratiquent ainsi.
C'est le cas de General Electric, qui délocalise du Massachusetts et de l'État de New York vers le Texas, où les salariés ont plus de difficulté à créer un syndicat, où les pratiques antisyndicales sont notoire, et où, à coup sûr, les salariés sont payés beaucoup moins. Idem pour le Mississippi ou l'Alabama où Airbus s'est établi. Le PDG d'Airbus a même osé se féliciter d'implanter une usine dans cet État où il n'y a pas de syndicat.
Les conventions de l'OIT
Convention 87 de l'OIT sur la liberté syndicale.
Convention 98 de l'OIT sur le droit d'organisation et de négociation collective.
Convention 135 de l'OIT concernant les représentants des travailleurs.
Renault-Nissan est une alliance. Renault détient 40% du capital de Nissan. L'État français détient 40% du capital de Renault. Le groupe Renault a signé avec les syndicats un accord-cadre mondial sur sa responsabilité sociale, dans lequel il s'engage à respecter les conventions fondamentales de l'OIT pour lui et ses filiales et notamment les conventions 87 (sur la liberté syndicale), 98 (sur le droit d'organisation et de négociation collective) et 135 (concernant les représentants des travailleurs). Renault se retranche derrière le fait que Nissan n'est pas Renault puisqu'il s'agit d'une alliance.
Le concept de maison mère ou filiale serait donc flou, alors que le PDG de Renault, Carlos Ghosn, est aussi celui de Nissan. De plus, c'est Marie-Françoise Damesin, numéro 3 de l'alliance, DRH de Renault-Nissan, qui est signataire de l'accord-cadre mondial. On ne peut donc dire qu'il y aurait d'un côté Renault et de l'autre Nissan alors qu'aujourd'hui Renault va fabriquer des Nissan et qu'il y a des coopérations sur quasiment tous les modèles.
Aujourd'hui, avec Global Union, l'objectif n'est plus simplement de multiplier de tels accords, mais d'être beaucoup plus scrupuleux sur le respect de ces accords. Ici, nous sommes typiquement devant un cas de solidarité où les syndicats du monde organisent partout des actions pour faire plier Renault-Nissan à Canton Mississippi.
C'est ainsi que les syndicats brésiliens ont organisé une campagne de boycott de Nissan pour les Jeux olympiques, Nissan étant partenaire officiel. En France, ils ont participé à des manifestations, organisé des séminaires, interpellé des députés. Nous avions rencontré aussi le président du Comité olympique français en lui demandant d'intervenir car cette société est partenaire officiel mais ne respecte pas les droits fondamentaux.
Avec Global Union, l'idée est d'insister auprès du CIO pour que lors des prochains jeux, les entreprises partenaires officiels soient irréprochables, et ce sous le contrôle de l'OIT.
Nous sommes pour la création d'un réseau syndical mondial Renault-Nissan. Avec IndustriAll Global, on essaie de mettre l'ensemble des syndicats de Renault et de Nissan dans la même pièce pour discuter. Nissan Mississippi peut être l'élément de construction de la solidarité entre les salariés de Renault et de Nissan.
Les directions des syndicats soutiennent majoritairement Hillary Clinton, car ils savaient que c'était elle qui allait sortir du chapeau du côté démocrate, mais tout en n'en attendant pas grand-chose. Cependant, de l'intérieur, les syndicalistes étaient nettement plus nombreux à soutenir Bernie Sanders. C'est Sanders qui amène à Clinton à « gauchiser » son discours. Par exemple, la campagne sur le salaire horaire à 15 dollars a été dès le départ soutenue par Bernie Sanders. Clinton, qui ne s'était pas positionnée sur cette question, a fini par proposer 12 dollars dans un premier temps, avant d'arriver aux 15 dollars ultérieurement.
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