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PLAN SOCIAL

Sanofi : plan social annulé

25 novembre 2014 | Mise à jour le 13 juin 2017
Par | Photo(s) : DR
Sanofi : plan social annulé

Le PSE qui organisait la suppression de 709 postes chez Sanofi a été invalidé par la cour administrative d'appel de Versailles. Hervé Tourniquet, l'avocat qui représentait la fédération des industries chimiques CGT, revient sur les enjeux de cette décision.

NVO : Pourquoi la Cour administrative d'appel de Versailles a-t-elle annulé le PSE de Sanofi ?

Hervé Tourniquet : La loi du 14 juin 2013 a organisé un nouveau cadre pour les licenciements économiques : ceux-ci peuvent être le fruit d'une décision unilatérale de l'employeur, soumise à l'homologation de l'administration du travail ou d'un accord collectif, signé par un ou plusieurs syndicats majoritaires. Dans ce deuxième cas, il incombe à l'administration, avant de le valider, de vérifier que les signataires représentent au moins 50% des votants. Signé en janvier 2014, le plan Sanofi, auquel s'opposait la CGT, avait été paraphé par la CFDT et la CFTC.

Par ailleurs, le législateur a modifié en 2008 les règles de la représentativité syndicale: contrairement à ce qui se passait avant, les délégués doivent être redésignés à chaque renouvellement des instances élues. Or, il se trouve que les désignations des deux délégués centraux de la CFTC, signataires du PSE, remontaient respectivement à 2005 et 2007. Ces deux personnes n'étaient donc pas habilitées à parapher cet accord collectif car elles ne représentaient qu'elles-mêmes en janvier 2014. La cour administrative d'appel de Versailles a donc accueilli notre moyen, qui visait à contester le caractère majoritaire de cet accord puisque la CFDT, seule signataire valable in fine, était loin de représenter 50% des votants.

 

La victoire des Sanofi ne serait donc due qu'à un vice de forme ?

Tout le monde dit que nous avons gagné grâce à un vice de forme. D'abord je tiens à rappeler que ce PSE concerne la vie de 709 personnes. Et qu'il a fallu attendre de passer en appel pour que l'administration fasse appliquer ce qui constitue le B.A. BA du droit: on ne signe pas un contrat quand on n'est pas habilité à le faire! La loi du 14 juin 2013 est une vraie abomination puisqu'elle laisse entre les mains de l'administration le pouvoir d'homologuer – dans les cas des plans décidés unilatéralement par l'employeur – ou de valider – pour les plans issus d'accords collectifs – les licenciements.

Et depuis que cette loi est passée, c'est la première fois que la Dirrecte [Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, NLDR] invalide un accord collectif. Aujourd'hui, on doit donc se battre contre les patrons ET contre l'administration.

L'attitude de la Direccte dans ce dossier a d'ailleurs été tristement exemplaire : les dernières notes remises en délibéré ne m'ont pas été envoyées en copie, en violation du principe de la contradiction. Le ministère du travail ne souhaitait pas qu'on revienne sur ce plan, sous prétexte qu'il avait pris effet depuis janvier, que des départs volontaires avaient déjà été organisés…

 

Justement, quelles sont les conséquences de cette décision pour les 709 personnes concernées par le PSE ?

Les salariés licenciés dans le cadre de ce PSE peuvent aujourd'hui demander leur réintégration chez Sanofi ou des dommages et intérêts équivalents à un montant minimum de 6 mois de salaires. Les salariés ayant négocié un départ volontaire ont la possibilité de se prévaloir (ou pas) de cette décision juridique. Cela signifie concrètement que ceux qui souhaitent leur réintégration sont en droit de l'exiger, et devront dans ce cas reverser les indemnités perçues à leur départ, et que les autres (qu'ils soient en formation, employés ailleurs…) ne sont pas tenus d'agir s'ils ne le souhaitent pas. L'argument qui consiste à dire que l'invalidation de ce plan est ingérable, à cause des départs volontaires déjà négociés, ne tient donc pas.

 

Cette victoire est l'aboutissement de l'union entre combat juridique et mobilisation syndicale…

Effectivement, je n'aurai peut-être pas pensé à vérifier que les signataires de l'accord étaient habilités à le faire si les camarades de la CGT ne m'avaient pas fait remonter certaines informations, faisant état de désaccords au sein de la CFTC quant au PSE. Quand j'ai eu vent de ces désaccords, je me suis demandé si les signataires étaient vraiment représentatifs et j'ai donc exigé la production des pouvoirs des deux délégués, qui comme on l'a vu, n'avaient pas été redésignés. Le syndicat s'est battu de l'intérieur, n'a pas hésité à aller en appel. J'ai fait mon travail d'avocat de mon côté. Et c'est ensemble que nous avons gagné.