Tel-Aviv choisit l’escalade
Jérusalem, Gaza : plusieurs dizaines de morts palestiniens, cinq morts israéliens, des centaines de blessés palestiniens… Alors que la politique israélienne d'expulsion des Palestiniens jérusalémites s'intensifie depuis quelques semaines, dans la bande de Gaza c'est l'escalade, avec de nouveaux bombardements massifs et meurtriers israéliens et, en face, des tirs de roquettes contre Israël qui poursuit un siège illégal depuis plus de douze ans.
Ratonnades anti-palestiniennes à Jérusalem
A Jérusalem-Est, illégalement occupée et annexée par Israël, la police israélienne a interdit aux Palestiniens depuis le début du mois de Ramadan l'accès à la Porte de Damas, l'une des principales entrées de la vieille ville menant à la mosquée al-Aqsa.
A cela s'ajoutent des opérations d'éviction des Palestiniens de leurs maisons, notamment dans le quartier de Sheikh Jarrah, par des colons israéliens soutenus par les forces armées, et de véritables ratonnades à l'appel des organisations suprématistes juives israéliennes aux cris de “morts aux Arabes”.
Ces ratonnades, dénoncées par les organisations de défense des droits humains israéliennes, sont soutenues par des députés d'extrême droite et des organisations avec lesquelles est allié le Premier ministre Benyamin Netanyahou.
Jérusalem : obsession démographique
La politique d'éviction des Palestiniens de leur ville, dont les frontières ont été considérablement repoussées par les dirigeants israéliens lors de son annexion illégale pour englober de nombreux villages et quartiers palestiniens, bien au-delà des limites historiques de Jérusalem, n'est pas nouvelle. Des quartiers entiers ont été éradiqués dès le début de l'occupation de Jérusalem-Est en 1967. L'enjeu, très officiellement annoncé par les dirigeants israéliens tant du pays que de la municipalité, consiste à obtenir une majorité démographique juive face aux Palestiniens.
Pour cela, non seulement les Palestiniens du reste de la Cisjordanie n'ont que rarement accès à la ville, qui est pourtant leur capitale, mais toute une série de dispositions israéliennes limitent les droits des Palestiniens nés dans la ville ou qui en sont originaires : statut de “résident”, lequel peut être définitivement retiré en cas de longues études à l'extérieur, par exemple ; interdiction aux couples mariés de vivre ensemble dans la ville si l'un des deux est originaire d'une autre ville de Palestine ; refus de permis de construire ; services sociaux a minima ; destruction de maisons et de lieux publics (dès 2019, l'association israélienne B'Tselem dénonce une accélération sans précédent de cette politique de destructions). Et interdiction de toute activité politique palestinienne dans la ville, Tel-Aviv y ayant fermé les bureaux de l'OLP et autres services palestiniens et y interdisant toute participation à des élections palestiniennes.
En outre, la colonisation, illégale, ne cesse de se développer dans Jérusalem-Est et tout autour de la ville pour la couper de son arrière-pays palestinien. Des murs jusqu'au sein de la ville enclavent des micro-quartiers.
Course à la guerre de Benyamin Netanyahou, sur le terrain religieux
Mais Benyamin Netanyahou choisit aussi l'escalade sur le terrain religieux en ciblant la mosquée al-Aqsa, comme l'avait fait son prédécesseur Ariel Sharon en 2000 pour mettre un terme à toute négociation.
Au nom de la répression de toute forme de résistance, les forces israéliennes sont allées jusqu'à bastonner et à asphyxier aux gaz lacrymogènes jusque dans al-Aqsa.
Ce choix est particulièrement explosif, bien au-delà de la Palestine. Benyamin Netanyahou le sait.
Mais s'il fait ce choix, c'est aussi dans l'espoir d'assurer son avenir à la tête du gouvernement israélien, alors que le pays est en crise profonde et a été contraint à quatre élections législatives anticipếes depuis 2019. En dépit de ses alliances avec l'extrême extrême droite, dont des héritiers du rabbin Meir Kahane et de son organisation Kach, interdite par la Knesset elle-même (le Parlement israélien) pour « racisme » depuis l'assassinat de fidèles musulmans au sein de la mosquée d'Hébron en février 1994. Or Benyamin Netanyahou est inculpé de corruption et de fraude. Se sortir de ses démêlés judiciaires suppose pour lui de rester au pouvoir. Et il le sait : la guerre, historiquement, a toujours soudé des consensus dans la société israélienne. Comme à chaque fois que les gouvernements israéliens ont choisi de bombarder la population civile de Gaza, au risque d'ailleurs des ripostes des formations gazaouies et de tirs de roquettes sur le sol israélien.
Douze enfants palestiniens tués
D'ores et déjà, les attaques israéliennes menées avec des avions de chasse et des hélicoptères de combat ont fait, au moment où ces lignes sont écrites (12 mai), au moins 35 morts palestiniens dont douze enfants, et au moins 230 blessés. En Israël, cinq personnes ont été tuées dans les tirs de roquettes et des dizaines d’autres blessées.
La récente décision de la Cour pénale internationale d'enquêter sur les crimes de guerre et possibles crimes contre l'Humanité israéliens, soutenue dans cette démarche par des organisations internationales comme Human Rights Watch qui dénonce la politique d'Apartheid d'Israël, n'arrête pas le Premier ministre dans cette course à la guerre. Et Benyamin Netanyahou va jusqu'à menacer directement l'Iran, au risque d'un conflit majeur, régional voire bien au-delà.
Protéger la population palestinienne, sanctionner Israël
Jusqu'où la “communauté internationale” est-elle prête à laisser aller le Premier ministre israélien ?
Une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU doit se tenir ce mercredi à huis clos, la deuxième en trois jours.
Membre permanent du Conseil de sécurité, la France se doit d'intervenir avec fermeté pour que le droit international soit enfin respecté par Tel-Aviv, dans l'intérêt des deux peuples, le peuple palestinien toujours sous occupation et le peuple israélien, mais aussi de toute la région.
Les appels à Israël à mettre un terme à l'escalade, qu'ils viennent de Joe Biden ou des dirigeants européens, ne sont, on le sait, d'aucune efficacité face à la détermination des dirigeants israéliens.
Aussi, dénonçant “la politique de nettoyage ethnique à Jérusalem-Est”, les bombardements meurtriers à Gaza, “les agressions racistes contre les Palestiniens” en toute impunité, le Collectif national pour une paix juste et durable entre Israéliens et Palestiniens, dont est membre la CGT, appelle la France à cesser de renvoyer “dos à dos l'occupé et l'occupant” et à agir.
“Toute politique crédible pour assurer les droits du peuple palestinien exige des actes forts : prendre des sanctions vis-à-vis d'Israël, soutenir la Cour pénale internationale (…), suspendre les accords commerciaux, militaires et sécuritaires, notamment l'accord d'association de l'Union européenne avec Israël” tant que cet État viole le droit international, rappelle le collectif qui demande la protection du peuple palestinien.
Le collectif national en appelle à un rassemblement aujourd'hui mercredi 12 mai à 16 heures, à Paris, au métro Invalides ainsi qu'à des initiatives en régions pour exiger la fin de la politique d'apartheid de l'État israélien, la protection du peuple palestinien et la fin de l'impunité d'Israël.