Le fascisme ne passera pas ?
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écrivait Robert Louis Stevenson. Placée en exergue de l'album « Un certain Cervantès », que signe Christian Lax, la phrase du romancier écossais résume pleinement le parcours de Mike Cervantès, revenu de la guerre en Afghanistan avec un avant-bras en moins.
Comme son homonyme, Miguel de Cervantès, qui perdit l'usage de son bras gauche lors de la bataille navale de Lépante contre l'empire ottoman, quatre siècles auparavant, c'est un homme révolté qui retrouve une Amérique frappée de plein fouet par la crise des subprimes. Un pays qui barricade ses frontières, où une moitié de la population surveille l'autre et où les inégalités et la voracité de quelques-uns laissent beaucoup d'autres au bord du chemin.
Mike Cervantès va donc entamer sa croisade contre ses propres moulins, mais ceux-ci ne sont pas imaginaires, comme nous le précise Christian Lax : « Il y a aussi des inquisitions aujourd'hui. Et lorsque Mike Cervantès revient d'Afghanistan, il est de ces vétérans un peu déboussolés dont le retour est difficile. Il a perdu un bras dans une croisade voulue par G.W. Bush et quelques “faucons” américains, où beaucoup ont eu le sentiment d'appartenir à une sorte d'Invincible Armada. »
« Il revient d'une guerre sans images, presque virtuelle et incompréhensible, et trouve un pays en crise. Mike repart donc en guerre : contre l'injustice, contre la censure, contre la voracité des banques et des spéculateurs. C'est un combattant de l'impossible. »
Les personnages, profondément humains, nés sous la plume de Christian Lax, ont en commun d'avoir du panache, de la générosité et un brin de folie qui fait converser Mike avec Miguel de Cervantès ou choisir pour Sancho Panza un clandestin péruvien qui n'en demandait pas tant, avec lequel il devra se cacher en territoire navajo…
Comme Amédée, son héros de « L'aigle sans orteils » (Éd. Dupuis), Mike doit surmonter son handicap : « Comme le faisait mon frère Yves, qui était un vrai conquérant, au point qu'on en arrivait à oublier son fauteuil roulant », précise Christian Lax.
L'auteur de « Don Quichotte » ne manquait pas d'éclat non plus, qui eut une vie chaotique, souvent misérable, mais authentiquement romanesque. Après un voyage dans les paysages fascinants de l'Ouest américain, Christian Lax, qui pensait depuis longtemps à une adaptation contemporaine de Don Quichotte, a voulu y placer son héros, mais aussi rendre hommage aux écrivains rebelles de la littérature américaine, les John Fante, Charles Bukowski, Hubert Selby.
Il le fait de belle manière, car « Un certain Cervantès » explore une palette grisée animée de dominantes rosées, bleutées, ocre, etc. avec les clins d'œil aux gravures de Gustave Doré, de vraies trouvailles comme cette poudre émiettée qui imite parfaitement les flocons de neige, et le trait fin, précis et expressif qui est la marque de ce grand dessinateur.
« J'ai besoin d'admirer mon personnage, de m'y attacher. Pour cela, il faut qu'il y ait de la chair, comme dans les personnages de Germinal, le premier livre qui m'ait marqué. J'admire Mike Cervantès car il passe à l'acte.
Et, à l'heure où l'on détricote tous les acquis sociaux, je veux mettre en avant ceux qui en bavent. Quand je me demande ce qu'on va laisser à nos enfants. J'aimerais bien qu'un jour mes petits-enfants lisent cet album et se disent : “ Tiens, notre grand-père, il pensait ça”… »
Gageons qu'en découvrant ces quelques planches, ces bonnes feuilles extraites de l'album, le lecteur s'attachera aussi à ce personnage déjanté mais chevaleresque.
Un Certain Cervantès,
de Christian Lax,
éditions Futuropolis,
204 p., 26 euros
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