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Un peuple et son roi, un titre fort évocateur pour le nouveau film de Pierre Schoeller, plongée vibrante dans la Révolution française entre le 9 avril 1789 et l'exécution de Louis XVI, le 21 janvier 1793.
En ce jeudi saint du 9 avril 1789, Louis XVI procède au lavage des pieds des enfants pauvres. Et l'on sent bien que ce rituel est l'une des rares occasions pour le souverain de côtoyer une fraction — en apparence innocente — de « son bon peuple ».
Mais lorsque l'une des gamines, pieds nus et en chemise déclare au roi « Un jour j'aurai des sabots », c'est toute cette distance entre Un peuple et son roi, la misère profonde, mais pas résignée qui transparaît dans les mots de l'enfant…
Rares sont les films de fiction français qui ont montré de si près les conditions de vie du petit peuple de Paris à cette période, et, servi par une distribution étincelante (presque trop !) le cinéaste évite pourtant le misérabilisme. La pauvreté n'empêche ni la dignité ni la conscience que la monarchie a atteint un point de non-retour. Louis le XVIe paiera de sa vie l'absolutisme de Louis XIV et Louis XV, mais aussi ses propres trahisons. En convoquant — dans un cauchemar de Louis XVI — le roi Soleil, les représentants de la noblesse et du clergé qui n'entendent pas alors céder une once de leur pouvoir, Pierre Schoeller rappelle qu'il s'agit bien là d'une lutte de classes…
L'habileté du film de l'auteur de L'exercice de l'État, outre l'exactitude des paroles prononcées lors des États généraux puis des différentes assemblées, jusqu'à celle qui votera la mort du roi est aussi d'avoir mis en exergue des personnalités politiques marquantes de la période. Sans mettre plus en avant les plus célèbres (Danton et Robespierre) en confiant au génial Denis Lavant le rôle de Marat, personnage flamboyant d'électron libre. Clivages politiques, présence du peuple aux assemblées, petites trahisons des uns, violence des autres, courage de beaucoup rappellent l'importance de la vigilance populaire. L'arrogance des puissants ne peut durer éternellement, fut-elle dite « de droit divin »…
Évitant le cours d'histoire, le réalisateur nous invite à réfléchir sur ce moment unique de la fin d'un système politique — la monarchie — et la douloureuse naissance de la République française.
À l'heure où la Ve République montre l'immensité de ses failles et de ses dérives monarchiques, Un peuple et son roi, sous l'apparence d'un film historique, est en fait un film éminemment politique.
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