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Unedic. Les privés d’emploi paient la facture

8 avril 2014 | Mise à jour le 4 mai 2017
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Unedic. Les privés d’emploi paient la facture

Les faits. Un accord national interprofessionnel sur l'indemnisation du chômage a été signé le 22 mars entre le patronat et trois organisations syndicales.  Le contexte. Avec 31 500 privés d'emploi supplémentaires de catégorie A en février, le gouvernement a évoqué des mesures destinées à redresser les comptes de l'Unedic. Il s'agirait, aussi, d'« inciter » les privés d'emploi à retrouver un travail.  Les enjeux. Des droits rechargeables sont constitués. Mais la CGT refuse un accord qui fait payer entièrement l'addition de la crise aux privés d'emploi, salariés intérimaires, intermittents du spectacle ou cadres.

Dans un contexte de chômage record, les négociations sur la nouvelle convention d'assurance chômage se sont conclues le 22 mars par un accord national interprofessionnel entre le patronat (Medef, CGPME et UPA) et trois organisations syndicales (CFDT, FO et CFTC). Il entrera en application, après agrément ministériel, à partir du 1er juillet pour une période de deux ans. Un texte qui porte « des sacrifices ou des reculs pour les demandeurs d'emploi », a déclaré Éric Aubin, secrétaire confédéral et chef de file de la délégation CGT pour la négociation.

 

1. Ce que dit l'accord

L'accord prévoit 800 millions d'euros de « mesures de redressement », et 400 millions d'euros seront alloués au financement des droits rechargeables, issus de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013. « L'effort est raisonnable, dit le communiqué du gouvernement, puisqu'il représente de l'ordre de 1 % des dépenses », quand, dans le même temps, l'économie réalisée sur le dos des 2,2 millions de chômeurs indemnisés réduira de 10 % le déficit actuel du régime d'assurance chômage.
Les droits rechargeables

L'instauration de droits rechargeables était déjà prévue dans le cadre de l'accord de janvier 2013 sur la sécurisation de l'emploi. L'objectif est de permettre au chômeur qui retrouve un emploi avant la fin de ses droits à indemnisation de ne pas perdre ses droits non consommés. S'il se retrouve à nouveau au chômage, il sera indemnisé sur la base de ce capital initial, puis, lorsque celui-ci sera épuisé, une nouvelle durée d'indemnisation sera calculée en prenant en compte toute la période de reprise d'emploi, dès lors qu'il aura travaillé au minimum 150 heures. Actuellement, c'est l'option la plus favorable qui prévaut, entre les droits acquis dans la situation antérieure à la reprise d'un travail et les nouveaux droits ouverts grâce à la reprise d'un emploi. Avec cet accord, le principe est que plus une personne travaille, plus elle accumule des droits à l'assurance-chômage. C'est le sens de « l'incitation à la reprise d'emploi ».

 

Délai de carence prolongé pour les indemnités supra légales de départ

Lorsqu'un salarié perçoit une indemnité « ­supra légale », c'est-à-dire une indemnité dont le montant est supérieur au montant prévu par la loi (calculé en fonction de son ancienneté), dans le cadre d'une rupture de contrat de travail, le délai de carence était jusqu'ici de 75 jours au maximum. Il pourra désormais aller jusqu'à 180 jours (six mois). Plus l'indemnité touchée sera importante, plus le délai de carence sera long. Cette réforme concerne notamment les cadres touchant d'importants chèques de départ, la pratique des indemnités de rupture conventionnelle, mais pas les licenciements économiques.

 

Cumul indemnités-emploi précaire

Le dispositif « activité réduite », qui concerne actuellement plus d'un million de personnes, permet aux chômeurs de retravailler à temps partiel sur de courtes périodes sans perdre leur droit à indemnisation. Jugé trop complexe, il génère des « trop-perçus » que les chômeurs doivent ensuite rembourser. Il sera « simplifié » par la suppression des plafonds actuels, qui obligent la limitation des revenus à 70 % de l'ancienne rémunération et imposent que l'activité n'excède pas 110 heures par mois.

L'objectif est le même que pour les droits rechargeables : il s'agit de pousser toujours plus le travailleur à la reprise d'un emploi, fût-il précaire, à temps partiel ou peu payé, en permettant de cumuler un salaire avec l'indemnisation en cours de son chômage.

Les privés d'emploi pourront désormais cumuler leurs allocations avec leurs revenus professionnels sans aucune limitation de durée, mais dans la limite d'un certain montant seulement : le cumul des indemnités avec la rémunération de l'activité ne pourra pas dépasser le niveau du salaire antérieur qui a servi à calculer les droits à indemnisation. Les anciens seuils de volume d'heures ou de rémunération seront remplacés par la règle de calcul suivante : allocation mensuelle due = allocation mensuelle sans activité – 70 % de la rémunération brute issue de l'activité.
Cette disposition s'applique aussi aux intermittents du spectacle et aux intérimaires. Ils conservent cependant – pour le moment – le bénéfice de certaines règles spécifiques à leurs statuts respectifs (définis aux annexes 4, 8 et 10 de la convention de l'Unedic), concernant la détermination du salaire journalier de référence, la prise en compte du travail à temps partiel et les modalités de calcul du différé d'indemnisation (la période de carence).

 

Les intermittents du spectacle

Le patronat et le gouvernement rêvaient de supprimer leur régime spécifique. Les 112 000 intermittents du spectacle, fortement mobilisés tout au long des négociations, le conserveront, mais leur indemnisation sera plafonnée à 5 475 euros bruts mensuels. Les cotisations augmenteront, passant de 10,8 à 12,8 % (8 % côté employeurs, 4,8 % côté salariés). Rien de définitif cependant : le texte de l'accord réclame l'ouverture de discussions avec l'État, avant la fin de l'année, en vue d'une « réforme en profondeur ».

 

Les seniors

Les salariés de plus de 65 ans, jusque-là exonérés de cotisations, seront désormais mis à contribution pour financer l'assurance chômage, à hauteur de 4 % pour la part employeur et de 2,4 % pour la part salarié. Par ailleurs, l'âge à partir duquel les chômeurs âgés inscrits à Pôle emploi bénéficient du maintien de leurs allocations jusqu'à la date de liquidation de leur retraite à taux plein va être progressivement repoussé pour tenir compte du report de l'âge légal de départ à la retraite.

Actuellement accordé à 61 ans, il sera fixé à 61 ans et 2 mois pour les salariés nés en 1953 ; 61 ans et 7 mois pour ceux nés en 1954 ; 62 ans pour ceux nés à partir du 1er janvier 1955. Selon la même logique, le versement des allocations de chômage prendra fin à l'âge ouvrant automatiquement droit à la retraite au taux plein : 66 ans et 2 mois pour ceux nés en 1953, 66 ans et 7 mois pour ceux nés en 1954 et 67 ans pour ceux nés à partir du 1er janvier 1955.

 

2. Sur le dos des privés d'emploi

Les derniers chiffres du chômage annoncent un triste record : en février, la France compte 3 347 700 chômeurs de catégorie A (n'ayant pas du tout travaillé dans le mois). Ils sont 31 500 de plus qu'en janvier 2014 et 149 800 de plus qu'en février 2013. Toutes catégories confondues, plus de 2 millions de personnes sont désormais inscrites à Pôle emploi depuis plus d'un an, dont la moitié depuis plus de deux ans, et la durée moyenne d'inscription atteint 272 jours (neuf mois).

 

Le Medef aux manettes

Devant « l'urgence et la gravité » de la situation de l'assurance chômage, a déclaré le Medef dans un communiqué en date du 22 mars, « des efforts supplémentaires devront être engagés à terme. C'est pourquoi les partenaires sociaux se sont engagés à se revoir tous les six mois, en commençant dès l'automne pour examiner la situation et envisager la poursuite de réformes structurelles ». La menace est à la hauteur des mesures initialement proposées par l'organisation patronale – et qui n'ont pas été retenues, telles que faire varier le taux d'indemnisation en fonction du taux de chômage (plus le chômage est élevé, moins on indemnise), faire cotiser obligatoirement à l'Unedic les employeurs et les contractuels de la fonction publique et supprimer le statut des intermittents du spectacle.

Dans une déclaration à la presse le 25 février, Éric Aubin soulignait que le document du Medef, publié en février, « a été présenté comme un texte cadre pour un accord […]. Nous ne pouvons plus accepter que la négociation se déroule au Medef, sur une présidence et à partir d'un document du Medef ». Car bien évidemment, laisser la main au patronat, dont la ligne d'action ne varie guère, revient à faire porter toute la charge des économies à réaliser sur les privés d'emploi et à ne pas envisager de recettes nouvelles pourtant indispensables.

 

Un marchandage de droits

En échange de ces « droits supplémentaires » que seraient les droits rechargeables et des nouvelles règles de cumul indemnité-emploi, le Medef a obtenu le grignotage d'autres droits : plafonnement des allocations pour les intermittents et augmentation de leurs cotisations, quasi-alignement du statut des intérimaires sur le régime général, moins favorable, délais de carence largement augmentés, cotisations des seniors. Par ailleurs, le « taux de remplacement » des indemnités versées aux chômeurs dont le dernier salaire est supérieur à 2 000 euros brut devrait passer de 57,4 % à 57 %. Mais aucune nouvelle cotisation des entreprises n'a été prévue, y compris pour celles qui ont le plus recours à la précarité.

 

3. Pour une véritable sécurité sociale professionnelle

Mieux indemniser, mieux former et mieux lutter contre la précarité : tels sont les axes de la CGT, développés dans son projet d'accord relatif à l'indemnisation du chômage.

 

Droits à indemnisation augmentés

Le chômage des jeunes, des seniors et celui de longue durée explosent. La CGT propose, en premier lieu, de porter la durée d'indemnisation maximale, actuellement de 24 mois, à 36 pour tous les demandeurs d'emploi et à 60 pour les seniors (aujourd'hui à 36 mois). Les jeunes, et tous ceux qui ont des difficultés à travailler quatre mois pour se voir ouvrir des droits en tant que primo-accédants, devraient y accéder dès deux mois de travail.

 

Renforcer la formation professionnelle qualifiante

Tout le monde reconnaît que la formation qualifiante aide au retour à l'emploi. Les mesures prises dans l'accord du 14 décembre sur la réforme de la formation professionnelle sont insuffisantes. Des mesures sont indispensables, telle la portabilité du CIF, qui permettrait de ne pas perdre ses droits à la formation professionnelle dès lors que l'on est au chômage. Un dispositif pour tous les demandeurs d'emploi qui n'ont pas bénéficié de formation dans les deux ans avant d'avoir perdu leur emploi pourrait être créé et financé à 50 % par l'organisme paritaire collecteur agréé (OPCA) auquel le demandeur d'emploi appartenait et à 50 % par Pôle emploi, la région et l'entreprise lorsqu'elle existe encore.

 

Surcotisation employeur pour les contrats courts

Plus de la moitié des inscriptions à Pôle emploi sont des fins de contrats précaires, et les ruptures conventionnelles représentent 80 % du déficit annuel de l'Unedic. Or, bien que l'accord de janvier 2013 prévoie une surcotisation pour les contrats courts, beaucoup d'entre eux passent à travers les mailles du filet. La CGT propose une contribution de 10 % pour les ruptures conventionnelles des moins de 50 ans, de 15 % pour les 50-55 ans et de 20 % pour les plus de 55 ans.

 

Négocier pour obtenir une vraie sécurité sociale professionnelle

La CGT propose une négociation tripartite (incluant l'État) sur l'allocation équivalent retraite, l'allocation spécifique de solidarité et la situation des jeunes. Et qu'une négociation spécifique s'ouvre sur le statut des intermittents du spectacle.
Selon Éric Aubin, « voilà ce que doit être pour la CGT une négociation qui prend en compte l'environnement, la situation des différentes populations et la difficulté déjà avérée des demandeurs d'emploi. Face à l'augmentation de la précarité, nous œuvrons à une vraie sécurité sociale professionnelle : faire reculer le recours aux contrats précaires, et assurer des droits nouveaux à celles et ceux qui la vivent ».