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SALAIRE

Valeo : Gros malaise salarial et débrayages unitaires sur l’ensemble du groupe

23 février 2022 | Mise à jour le 23 février 2022
Par | Photo(s) : François Lo Presti/ AFP
Valeo : Gros malaise salarial et débrayages unitaires sur l’ensemble du groupe

Sur le site Valeo d'Etaples, la CGT estime que 150 salariés ont vu leur salaire rattrapé par la hausse du Smic.

Après un plan de compétitivité et deux ans d'austérité salariale, les propositions de la direction de Valeo d'une augmentation de 1,8% ou 2% ne passent plus. Phénomène nouveau, de jeunes ouvriers expérimentés démissionnent pour cause de salaires non-revalorisés depuis plusieurs années, constate la CGT.

Les 15 000 salariés de Valeo étaient appelés à un débrayage d'au moins une heure sur l'ensemble de ses sites le 22 février 2022. L'appel a été lancé par toutes les organisations syndicales du groupe et notamment, l'intersyndicale des syndicats représentatifs CGT-CFDT-FO-CFE-CGC. Une unité d’une telle ampleur a été rarement observée chez cet équipementier automobile. Au cœur du malaise, les salaires avec en ouverture des NAO (négociations annuelles obligatoires) des propositions de la direction situées entre 1,8% et 2%. Sachant que le chiffre d'affaires du groupe atteint plus de 17 milliards en 2021, soit une hausse de 5% par rapport à l'année précédente, l'ensemble des syndicats a rejeté cette proposition.

La CGT réclame 150 euros pour tous

Patrice Caux coordinateur CGT Valeo, raconte la genèse de ce mouvement : « Pour les NAO, nous savions dès le départ qu'elles ne seraient pas au niveau attendu par les salariés. La CGT avait une revendication coordonnée pour l'ensemble des sites afin de se positionner pour un mouvement le 22 février 2022. Les autres organisations syndicales voyant qu'on allait faire bouger les choses ont décidé de nous rejoindre. Le mouvement est très suivi. Sur le site de Sablé-sur-Sarthe (72), l'action est partie dès le lundi et a été reconduite le lendemain avec le mouvement dans l'ensemble du groupe, sur 18 sites. La CGT réclame une augmentation de 150 euros mensuels pour tous. »

La CFDT demande une prime et 2,75%

Pas facile de se mettre d'accord sur le niveau de la revendication. C'est là où le bât blesse explique encore Patrice Caux: « Les revendications des autres syndicats ne sont pas à la hauteur de ce que nous réclamons, mais nous avons décidé d'agir ensemble, car de toute manière, le revendicatif, ce sont les salariés qui vont le définir et non tel ou tel syndicat. Le plus gros problème, c'est quand même la revendication de la CFDT, qui réclame une prime de 500 euros et une enveloppe de 2,75%. C'est en dessous de l'inflation de l'année dernière et laisse une opportunité à la direction de s'y inscrire. Et on voit venir d'ici une proposition patronale du style + 2,4% et une prime selon les sites. Sauf que les salariés ne sont pas près d'accepter cela ! » estime le militant CGT.

Deux années de vaches maigres

Le coordinateur CGT décrit encore le contexte de ces NAO pas comme les autres : « Nous venons de subir un plan de compétitivité. Un million d'euros d'économies a été réalisé par Valeo sur le dos des salariés et c'est à comparer aux 800 millions qu'il a injecté pour le rachat de Siemens. C'est là que les salariés s'aperçoivent que les efforts qu'ils ont consentis étaient vains. La CGT les avait avertis que ce plan de compétitivité était sans aucun fondement. Il s'est décliné de multiples manières : gel de l'intéressement et des salaires, diminution de certaines primes d'ancienneté, suppression de journées de congés. Cette multitude de mesures a impacté chaque salarié de manière différente. Une forme assez pernicieuse, qui fait que certains ont plus sacrifié à la cause que d'autres. Et les ouvriers ont certainement été plus mis à contribution que les cadres. »

Des jeunes ouvriers démissionnent

Le militant note en outre un phénomène nouveau qui traduit le mécontentement chez les ouvriers et notamment les jeunes : « Le fait qu'il y a eu le télétravail ou de l'activité réduite leur a permis de chercher du travail ailleurs. Et là on constate une vague de salariés ayant une ancienneté de 15 à 20 ans qui quittent Valeo. Ils s'aperçoivent qu'ailleurs ils peuvent gagner 30% de plus. Il y a ainsi des démissions en nombre et sur des profils auxquels nous n'étions pas habitués. » C'est par dizaines qu'on les recense sur l'ensemble des sites.

Le parcours des démissionnaires est assez homogène : de jeunes ouvriers avec de l'expérience, mais qui n'a pas été valorisée au cours de ces dernières années. « Ils ont été recrutés en bas de l'échelle, mais comme elle n'avait pas de barreaux ils n'ont pas réussi à la gravir. Ils ont aujourd'hui acquis une expérience non-valorisée. Quand au bout de dix ans, ils ne bénéficient que des augmentations générales autour de 1%, cela ne permet même pas de combler l'inflation. »

L'électrochoc Smic

Paradoxalement, c'est une augmentation de salaire, celle du Smic, qui en novembre 2021 aurait amplifié les mouvements de démissions. En tout cas, Patrice avance l'hypothèse que cela a contribué à la prise de conscience du problème salarial : « Beaucoup ont été effrayés de constater que leur salaire était rattrapé par le SMIC. Nous-mêmes, syndicalistes, avons été surpris de l'ampleur du phénomène un peu partout dans le groupe. Ainsi, sur le site Valeo d'Etaples (Pas-de-Calais), c'est 150 personnes qui ont été rattrapés par le SMIC, sur Angers (Maine-et-Loire), c'est 130. C'est quand même navrant pour un grand groupe comme Valeo ! » Assurément, la question de la stagnation salariale des ouvriers de la métallurgie couplée à la diminution de leurs garanties collectives avec la récente adoption d'un dispositif conventionnel dégradé commence à poser de graves problèmes d'attractivité et de renouvellement des générations dans ces professions. Valeo ferait bien d'en tirer les enseignements en augmentant les salaires.