25 février 2015 | Mise à jour le 16 mars 2017
IGMetall vient d’obtenir une augmentation salariale de 3,4% après une série de «grèves d'avertissements». Un encouragement dans un pays de fortes disparités salariales et de croissance de la pauvreté.
3,4% d'augmentation salariale à partir du 1er avril. C'est ce que viennent d'obtenir, dans la nuit de lundi à mardi, les salariés de la métallurgie de la région du Bade-Wurtemberg, en Allemagne, à l'issue des négociations menées par IG Metall avec le patronat du secteur. Une victoire dont se félicite l'organisation syndicale, obtenue grâce à un mouvement très suivi de grèves ponctuelles dites «d'avertissement» qui se sont succédées depuis le début des négociations en janvier. «Depuis le début des grèves d’avertissement, environ 850000 employés ont fait grève», souligne le syndicat. Lundi, on comptait ainsi quelque 100000 salariés de 480 entreprises en grève. Au départ, l'organisation patronale, Gesamtmetall n'était prête à accepter qu'une hausse de 2,2%, quand IG Metall réclamait 5,5% sur un an. L'augmentation de 3,4%, assortie d'une prime unique de 150 euros pour chaque salarié, et obtenue à l’issue d’une quatrième session de négociations, concerne près de 4 millions d'employés et pourrait servir de base au secteur dans l'ensemble du pays, alors que les négociations sont menées dans chaque région. Elle pourrait être aussi un point d'appui pour les négociations salariales d'autres secteurs, de la chimie à la fonction publique. Avec un taux d'inflation estimé à 0,3% pour la période à venir, l'augmentation réelle avoisinerait les 3%. Pour IG Metall, il s'agit d'une bonne nouvelle non seulement pour les salariés, mais aussi pour soutenir la croissance par la demande intérieure qui peut en constituer l'un des principaux moteurs.
Inégalités salariales
Reste que les disparités salariales demeurent fortes dans le pays, plus de vingt ans après la réunification qui avait mis en lumière les fortes inégalités entre l'Ouest et l'Est. L'Allemagne a connu en effet au tournant du millénaire non seulement des années de «modération» ou de stagnation salariale, mais aussi une multiplication des emplois «atypiques». Les salaires réels nets avaient même –fait quasiment inédit- reculé entre 2004 et 2008(1), mais avec des inégalités entre les secteurs, les salariés de la métallurgie, de la chimie ou des banques s'en sortant mieux que ceux du commerce ou de la fonction publique et globalement ceux de l'industrie mieux que ceux des services. Les réformes du marché du travail (lois Hartz, agenda 2010…) ont par ailleurs mis à mal la situation des demandeurs d'emploi et le nombre des «mini-jobs» a explosé, temps partiels et non reconnaissance des qualifications faisant s'accroître le nombre des travailleurs pauvres…
Alerte pauvreté
Au point que, malgré les pressions patronales et un certain chantage à l'emploi, le Parti social-démocrate (SPD) avait fait de l'adoption d'un salaire minimum une condition de son entrée dans la coalition gouvernementale avec la CDU d'Angela Merkel. Il est entré en vigueur dans plusieurs branches au 1er janvier (fixé à 8,50 euros de l'heure) et devrait se généraliser d'ici deux ans.
La pauvreté a cependant atteint un niveau historique en Allemagne, selon une étude de l’organisation d’aide sociale Paritätischer Wohlfahrtsverband:environ 12,5 millions de personnes étaient touchées par la pauvreté en 2013, soit une augmentation de plus de 15% en un an. Selon le directeur de l'organisation, contrairement à ce que prétend le gouvernement, le fossé entre les riches et les pauvres continue de se creuser.
(1) voir à ce sujet: Adelheid Hege «Allemagne: une décennie de modération salariale. Quelle emprise syndicale sur la dynamique des salaires?», revue de l'Ires, n°73, 2012