1 avril 2020 | Mise à jour le 2 avril 2020
La FTM-CGT se lance dans la bataille pour protéger la santé des salariés exposés à la pandémie, faire arrêter les activités non-vitales et obtenir le chômage partiel payé 100 %. Une pétition est en ligne et d'autres actions sont engagées explique Frédéric Sanchez, secrétaire général de la FTM-CGT.
La CGT Métallurgie vient de lancer une pétition pour la protection des salariés et l'arrêt des activités non vitales. Qu'est-ce qui a motivé cette démarche ?
Frédéric Sanchez : Nous avons décidé de cette pétition au président de la République afin de le mettre devant ses responsabilités et pour qu'il donne un message clair par rapport à la situation. Aujourd'hui, il y a beaucoup de flou et de non-dit.
Il déclare que les activités considérées comme vitales doivent continuer à fonctionner en garantissant tous les moyens de sécurité nécessaires aux salariés, mais on ne voit pas ce qu'il y a derrière le mot vital puisqu'il n'y a pas de définition précise.
La CGT a donc commencé un travail de recensement de ce que nous considérons comme vital. Il y a des secteurs qui ne doivent pas continuer à fonctionner, comme l'industrie automobile, l'industrie aéronautique, l'industrie navale. Et en revanche, il y a des métallurgistes qui travaillent pour la santé, pour le pharmaceutique, des activités qu'il faut poursuivre en prenant toutes les précautions, car elles sont d'intérêt national.
Au-delà du gouvernement, on a aussi un patronat qui se cache derrière le discours présidentiel pour continuer à faire fonctionner les entreprises en se foutant — et je pèse mes mots — de la santé des salariés. Si la pétition peut aider les salariés, les syndiqués, les structures dans les territoires et y compris d'autres fédérations, ce sera bénéfique pour nous tous. Elle commence à être connue par un grand nombre de salariés et plus largement par une partie de la population.
Comment les salariés de la métallurgie traversent-ils cette crise ?
Nous avons des situations diamétralement opposées, d'une entreprise à l'autre, d'un groupe à l'autre et y compris dans une même filière. Certaines entreprises jouent le jeu et essaient de mettre à disposition des moyens pour assurer la santé des salariés. Des entreprises sont à l'arrêt avec les salariés en chômage partiel, mais avec des conditions qui ne nous satisfont pas.
La CGT réclame l'indemnisation du chômage partiel à 100 %, étant donné que les salariés ne sont pas responsables de cette situation. En d'autres endroits, il y a un nombre important de droits d'alerte déposés par les organisations syndicales, parfois par la CGT seule. Là aussi, on voit des employeurs qui jouent le jeu et d'autres non, allant jusqu'à utiliser la menace, voire en faisant signer des décharges aux salariés pour déresponsabiliser leur patron en cas de problème.
Chez General Electric (GE)* notamment, le syndicat vient d'interpeler la Direccte. Tous les spécialistes affirment que pour freiner l'épidémie, il faut confiner. Or on voit des employeurs qui disent d'accord, vous ne venez pas travailler, alors on ne vous paie pas. Il y a des tentatives pour utiliser le contenu de ces ordonnances afin d'attaquer les droits des salariés. On ne peut accepter que ceux qui paient l'addition soient encore une fois les salariés, tandis que les employeurs s'en sortent bien.
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À part GE, avez-vous d'autres exemples où ça ne se passe pas bien ?
Il y a des usines comme HME Brass dans l'Orne, où le syndicat se bat face à une direction irresponsable qui dit : vous pouvez prendre vos congés payés et RTT, vous pouvez rester chez vous, mais vous ne serez pas payés. Mais il y a aussi des mobilisations gagnantes, par exemple chez PSA à Valenciennes (Nord), la Française de Mécanique à Douvrin (Pas-de-Calais).
À la Française de Mécanique, il y a eu une tentative de faire reprendre l'activité lundi 30 mars 2020, et la réaction des organisations syndicales l'en a empêché. On a une CGT en ordre de bataille, réactive aux situations, qui essaie de répondre au mieux à ce que vivent les salariés.
C'est bien sûr plus compliqué, là où la CGT n'est pas organisée et où c'est souvent l'employeur qui décide de tout. Nous avons des résistances avec des résultats. La fédération va continuer à aider ses syndicats, les syndiqués et salariés avec un objectif, le seul qui nous intéresse aujourd'hui : la santé des salariés.
Aujourd'hui, on donne des primes aux salariés qui acceptent de venir travailler. C'est le salaire de la peur. On ne laissera donc pas faire les employeurs et on a informé le gouvernement. Pour la CGT, la ligne est claire : on met à l'arrêt ce qui n'est pas vital. Là où c'est vital, on crée les conditions pour que les salariés soient protégés, et lorsqu'il y a chômage partiel, il faut que les salariés soient payés à 100 %.
Par ailleurs, en plus des mobilisations, nous n'hésiterons pas à saisir tous les leviers législatifs possibles. Notre fédération vient ainsi de décider que sur le caractère vital ou non vital des activités, nous allons saisir le Conseil d'État.
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