15 avril 2020 | Mise à jour le 6 mai 2020
Face à la surmortalité des personnes âgées liée à la pandémie de Covid-19, les syndicats de retraités et de salariés du secteur médicosocial interpellent le Préfet de Paris et le ministère de la Santé. Ils réclament les moyens matériels et humains promis depuis mars par le gouvernement et toujours pas honorés.
Dans sa lettre du 14 avril adressée au Préfet de Paris, l'intersyndicale de retraités CGT, CGT-FO, CFTC, CFE-CGC, FSU, Solidaires, FGR-FP et LSR prévient : « Nos demandes sont d'autant plus pressantes qu'après un silence de plusieurs semaines sur la situation des âgés en établissements ou à domicile, la transparence est loin d'être faite sur le bilan des besoins à satisfaire et sur les mesures prises par les pouvoirs publics ». Le ton est donné.
Dans cette même veine, une autre lettre ouverte est adressée le même jour par l'USD CGT 94 au ministère de la Santé pour dénoncer, pêle-mêle, la persistance de la pénurie de moyens matériels et humains ; les promesses non tenues ; les conséquences, en milliers de morts advenues et à venir de l'impéritie du gouvernement dans la gestion de la crise sanitaire. Et pour réclamer pour la énième fois les moyens humains et matériels pour faire face à la pandémie.
Affiner la stratégie du confinement
Depuis le début de cette crise, on ne compte plus les cris d'alarme adressés chaque jour aux autorités sanitaires par les personnels (infirmiers aide-soignants, médecins, aides à domicile…) en charge la vieillesse en Ehpad, HAD ou en gériatrie hospitalière.
On ne compte pas davantage le nombre de décès en Ehpad, faute de tests de dépistage pré et post-mortem qui permettraient de dissocier les morts pour causes naturelles de celles dues au Covid 19 et d'affiner ainsi la stratégie du confinement, lourde de séquelles psychopathologiques chez les plus âgés.
Généraliser le dépistage dans tous les établissements
Et cela, alors que depuis le 13 mars, « 75 laboratoires publics attendent le feu vert des autorités sanitaires pour produire des tests en quantité industrielle », soulignent les retraités dans la lettre au Préfet. Ils rappellent aussi la promesse du ministre de la Santé, Olivier Véran qui, le 6 avril, annonçait le dépistage systématique des résidents de deux EHPAD parisiens au moindre signe de contamination. Les retraités, eux, réclament la généralisation de ces dépistages à l'ensemble des établissements, « pour que cette démarche ait un sens », fait valoir Jean-Pierre Lablat de l'UCR-CGT.
Même combat s'agissant des moyens de protection des personnels soignants (masques, surblouses, gants, gel hydroalcoolique, oxygène, etc.) qui se font toujours attendre tandis que la pandémie essaime ses victimes, en priorité parmi les personnes âgées, mais aussi les soignants. « Le 24 mars, Olivier Véran avait promis l'envoi de 20 millions de masques qui n'arrivent toujours pas ou au compte-goutte », déplore Jean-Pierre Lablat.
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Surmortalité des résidents, épuisement des soignants
Ce qu'on mesure au jour le jour, en revanche, c'est la montée en flèche de la mortalité en Ehpad. « Rien qu'au sein de mon établissement, nous sommes passés de 13 décès le 2 avril à 98 le 13 avril », affirme Barbara Filhol, secrétaire générale de l'USD-CGT Santé et Action sociale du Val-de-Marne.
Elle dénonce, entre autres indigences, les impacts délétères de cette surmortalité : un épuisement généralisé, psychologique et physique des personnels qui luttent d'arrache-pied, 12 heures par jour minimum, contre le fléau du Coronavirus, sans moyens ou presque de s'en protéger et donc, d'en protéger leurs résidents et leurs proches.
Dernier cri d'alarme adressé aux ministres
« Applaudir au balcon à 20 h, c'est bien, mais ça ne suffira pas », prévient Barbara Filhol. Et d'évoquer pour exemple la longue bataille syndicale de 2018/2019 pour les moyens des Ehpad. Bataille restée sans réponse de la part du gouvernement, dont la crise du Covid-19 révèle aujourd'hui la tragique pertinence.
D'où cette lettre ouverte, en guise de dernier cri d'alarme adressé aux ministres afin que les annonces et promesses se traduisent en actes. Et cette conclusion en forme cet avertissement : « Nous n'attendrons pas la levée du confinement pour réclamer justice ».