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SPECTACLE

Quel retour à la scène et à l’emploi pour les festivals ?

17 juillet 2021 | Mise à jour le 12 juillet 2021
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Quel retour à la scène et à l’emploi pour les festivals ?

Si la scène reprend (ici la compagnie Kiaï avec son spectacle Pulse), notamment lors des festivals d’été, les inquiétudes sur une « vraie » reprise et sur l’emploi demeurent.

Maintien sous des formes allégées, reports, annulations… Après une année sans, ou presque, des festivals devraient avoir lieu durant cet été 2021, en dépit de la crise sanitaire. Alors que le gouvernement annonce le retour à la scène, doit-on vraiment parler de reprise des festivals ? Et quelles sont les conséquences sur l'emploi ?

Cet été, la compagnie Kiaï devrait connaître une saison des festivals presque comme elle aurait dû la vivre l'an passé s'il n'y avait pas eu le coronavirus. Avec quatre présentations de son spectacle Pulse au festival de cirque d'Alba-la-romaine (Ardèche), et une vingtaine de spectacles programmés dans quinze festivals partout en France, cette troupe de danse va reprendre une activité quasi normale. « On a été très soutenus par les collectivités locales et les festivals. À Alba, les trois spectacles annulés en 2020 ont été payés et ils nous ont reprogrammés pour quatre dates cette année. À la fin de l'été dernier, on savait déjà à quoi pouvait ressembler notre été 2021 », constate Camille Talva, sa chargée de production. Du côté du plateau, la compagnie qui base son travail sur de la danse avec un trampoline, la « danse rebond », doit intégrer les jours de répétition (en plus) au temps de travail des artistes. Car les résidences de création qu'elle a faites tout au long de l'année n'ont pas suffi à maintenir en forme des corps mis rudement à l'épreuve par les pauses forcées.

Alerte sur l'emploi

Formules très allégées, reports à d'autres dates, aménagements des espaces et des lieux de travail des artistes, mise en place du pass sanitaire… le mot d'ordre pour les festivals cette année, c'est « plan B ». Au mois de février, dès les premières annonces de la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, précisant que les festivals pourraient se tenir assis à 5 000 personnes, le Hellfest, à Clisson (Loire-Atlantique), les Eurockéennes de Belfort (Territoire de ­Belfort) ont jeté l'éponge. Quant à la règle des 4 mètres carrés par spectateur pour les festivals debout, qui sera mise en place à partir de juillet, elle s'avère drastique. « Le secteur subventionné va pouvoir jouer, avec des programmations réduites. Mais le secteur marchand ne jouera pas », estime Philippe Gautier, secrétaire général de l'Union nationale des artistes musiciens de France (SNAM-CGT) : « Le gouvernement a préservé les structures mais pas l'emploi. En France, les subventions et le chômage partiel aident à tenir. Le danger, c'est pour les festivals qui ne sont pas subventionnés, ceux qui n'appartiennent pas à des groupes privés qui peuvent amortir le choc, et les plus jeunes festivals qui ne sont pas ancrés dans un territoire », constate Carole Meyer, coprésidente de la fédération De Concert !, qui représente une trentaine de gros rendez-vous musicaux dans toute l'Europe.

La CGT-Spectacle (FNSAC-CGT) alerte sur l'emploi. Habituellement, les rendez-vous estivaux permettent aux artistes et techniciens – intermittents du spectacle ­–, d'obtenir le gros de leurs cachets et de leurs 507 heures annuelles. « On est toujours dans une situation où une personne sur quatre va travailler durant la saison des festivals. C'est une catastrophe ! Il n'y aura pas une vraie reprise de l'activité et cela va avoir des répercussions sur les salaires des travailleurs et leurs droits sociaux », constate ­Ghislain Gauthier, secrétaire général adjoint de la FNSAC-CGT. La fédération du spectacle chiffre la perte de salaires pour les intermittents à 630 millions d'euros entre 2019 et 2020. La prolongation de l'année blanche jusqu'au mois de décembre s'avère insuffisante. Les festivals notent que de nombreux techniciens très qualifiés préfèrent quitter le métier et se recycler, quand les sociétés de prestation (son, lumière…) tirent la langue. « Ce qu'il faut comprendre c'est qu'il y a les festivals, mais aussi les festivités : les fêtes de village, les spectacles gratuits… Tout ce secteur associatif, occasionnel, souffre beaucoup et les mesures du gouvernement ont été très faibles », relève Philippe Gautier, du SNAM-CGT.

Programmation revue

À Coutances (Manche), le festival Jazz sous les pommiers va maintenir sa 40e édition anniversaire en dépit des grandes incertitudes de cette année. Habituellement au mois de mai, le rendez-vous normand a été déplacé du 25 au 29 août. L'enjeu, pour les organisateurs, a été de préparer une édition « Covid compatible ». « Il faut imaginer des soirées avec des musiciens qui ont une chance d'être là. On a très vite laissé tomber ceux qu'on accueille d'habitude, c'est-à-dire la tournée internationale d'un artiste américain qui passerait par douze pays d'Europe », explique Denis Le Bas, son directeur. S'il peut se tenir, c'est que le festival – organisé par le Comité coutançais d'action culturelle, l'association qui programme la saison du théâtre de Coutances – repose en bonne partie sur les subventions et non sur les fonds propres, comme la plupart des festivals de musiques actuelles (rap, rock, électro…) qui proposent des spectacles debout. Pour l'édition 2021, son budget doit avoisiner les 2, 1 millions d'euros. La part des subventions représente 59 %, tandis que ses ressources propres (billetterie, bars…) sont de 17,25 %. Cette année, le fonds de compensation du Centre national de la musique (CNM) pour compenser la perte liée à la billetterie représentera 8,5 % du budget total.

Si le gouvernement a signé au mois de mai une déclaration commune avec les collectivités locales pour annoncer 30 millions d'euros d'aides supplémentaires et encourager la tenue des festivals, un grand flou entoure l'été 2021. À la veille des États généraux des festivals, qui se tiendront lors du prochain Printemps de Bourges – lui-même reporté de fin mai à fin juin… –, l'optimisme est teinté d'inquiétude chez tous les acteurs des festivals.

Comme chaque année, la CGT-Spectacle sera présente au Festival d'Avignon, qui devrait se tenir du 5 au 25 juillet. Elle organisera deux grands débats, l'un sur les violences sexistes et sexuelles dans les métiers du spectacle et l'autre au sujet de l'avenir de la protection sociale après la crise du Covid-19. La saison des festivals s'annonce « tendue », annonce Ghislain Gauthier, secrétaire général adjoint de la FNSAC-CGT. Il s'agit de retrouver les équipes et de remettre de la visibilité sur les droits sociaux : la nécessité d'un plan pour l'emploi, la question de l'assurance chômage des intermittents du spectacle… Alors que les théâtres ont été occupés partout en France, l'été des festivals pourrait être le prolongement du mouvement parti de l'occupation du théâtre de l'Odéon, à Paris. Un mouvement qui demande une deuxième année blanche et le retrait de la réforme de l'assurance chômage.

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