
Hard-discount : la sueur de l’affront
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De gauche à droite: Benjamin Gouézigoux et Hervé Ménager. Carrefour Alma Rennes
« On nous a dit que c’était une entreprise à l’esprit familial. Ça m’a mis la puce à l’oreille » se rappelle Hervé Ménager, secrétaire CGT du CSE du magasin quand il rencontre les directeurs de la société Almadis (Alma Rennes Distribution) Bernard et Pierre-Luc Guillerm. Egalement à la tête du groupe finistérien Pont de Bois, ces derniers prennent l’hypermarché en location-gérance en mars 2022. Amorcé par Carrefour France depuis 2017, ce changement de gestion est annoncé fin 2021 et concerne en France environ 70 magasins. Carrefour conserve la propriété des murs et du fonds de commerce mais « on passe dans une nouvelle entreprise » éclaire Benjamin Gouézigoux, délégué CGT. Avec ses nouvelles règles qui inquiètent de suite les syndicats. « Du patronat autoritaire à l’ancienne », favorisant la rentabilité aux salariés.
Après 15 mois de maintien des droits, c’est la dégringolade. Finis les roulements de planning les week-ends et les jours fériés, la gestion des horaires des caissières entre elles, la prime d’intéressement, la promesse d’une sixième semaine de congés payés et les tickets restaurant pour les nouveaux salariés. Le congé pour enfant malade passe de 6 à 2 jours et la carence en cas d’arrêt maladie à 7 jours. « On est un commerce alimentaire et au contact de plein de gens mais on vient bosser malade » soupire Hervé Ménager. « Ils veulent aussi nous imposer des horaires de coupure », complète Benjamin Gouézigoux.
S’ajoute à cet inventaire alarmant un stress constant et des renvois aux motifs douteux. Benjamin Gouézigoux résume l’état d’esprit des nouveaux patrons : « le directeur dirige, les manageurs managent, les employés travaillent ». En silence de préférence. Ils chargent un consultant extérieur de « fliquer » le personnel par tous les moyens possibles. « Il surveille même qu’on ne prenne pas nos pauses à l’extérieur du centre commercial ! » souffle Hervé Ménager. Dès avril 2022 deux employées du drive du magasin sont mises à pied sans justification fondée. En novembre 2024, une autre employée de 62 ans dont 17 ans au Carrefour Alma, est virée de façon abusive, accusée à tort d’avoir publié un avis négatif sur la plateforme interne de Carrefour. « Elle alertait sur son mal-être au travail, jusqu’à avoir des pensées suicidaires » se désole Benjamin Gouézigoux. Au sein de ce magasin qui affiche un turnover impressionnant, ce ne sont pas les seules à être remerciées de la sorte, quand d’autres démissionnent les uns après les autres, essorés.
« Ils foutent en l’air leur propre magasin. On ne les laissera jamais faire » poursuit Benjamin Gouézigoux. Une quarantaine de salariés, sur les 216 actuels a de nouveau manifesté devant le magasin le 4 octobre. « On continuera à dire les faits et à les médiatiser, même si ça déplaît. » Les deux hommes tiennent à défendre leurs collègues du mieux possible. Hervé Ménager part à la retraite en février 2026, après 37 ans de boîte. « Je pensais m’acheter une voiture avec une bonne prime de retraite, je me contenterai d’un vélo. »

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