28 juin 2015 | Mise à jour le 7 mars 2017
Déjà mobilisés en mai, les professionnels de la petite enfance, rassemblés en intersyndicale, réclament des effectifs supplémentaires et un système de remplacement. Ils seront à nouveau en grève le 29 juin, en plein conseil de Paris.
«Ces derniers mois, la situation n'a cessé de se dégrader au sein des structures d'accueil de la petite enfance, mettant à mal les conditions de travail des personnels et d'accueil des jeunes enfants.».
C'est en ces termes que l'intersyndicale – CGT, Unsa, CFTC, FO, SUPAP-FSU – s'adressait aux parents d'enfants accueillis en crèche à Paris pour annoncer leur mobilisation du 18 juin dernier. Déjà mobilisés les 28 et 29 mai (35% de grévistes, 50% des établissements entièrement ou partiellement fermés) à l'initiative de la CGT, le personnel des crèches a à nouveau fait grève mi-juin (25% de grévistes) à l'appel de l'intersyndicale et s'apprête à se remobiliser le 29 juin, à l'occasion de la tenue du conseil de Paris.
RATIO PÉRIMÉ
Les motifs ? «Sous-effectif structurel et pas de système de remplacement, résume Guillaume Floris, de la CGT petite enfance. Du coup, des conditions de travail délétères qui supposent des absences plus nombreuses et entrainent un cycle infernal de situations tendues, génératrices de souffrance au travail.»
Pour rappel, c'est un décret national (et historique) qui régit le taux d'encadrement de l'accueil de la petite enfance selon lequel il faut un professionnel pour 5 bébés et un professionnel pour 8 enfants qui marchent. La Ville de Paris a adopté une moyenne de 6,5 professionnels. Issu de l'après-guerre, à l'époque où prévalait le modèle hospitalier voué à lutter contre la mortalité infantile, ce ratio apparaît aujourd'hui archaïque : «Les aspects de développement psychologique et moteur sont absents. La CGT revendique le respect des standards danois ou suédois : un professionnel pour 4 enfants», analyse le syndicaliste.
RATIO THÉORIQUE
L'autre versant de la discorde, «c'est que ces ratios sont complètement théoriques». Ils ne correspondent pas à la réalité puisqu'ils ne tiennent pas compte de l'amplitude horaire quotidienne – de 7h30 à 18h30 – et que les professionnels du secteur ne travaillent pas 11 heures par jour, mais 7 heures 45 en moyenne. «On le voit, le ratio n'est pas respecté de façon journalière, il l'est encore moins à l'année quand on y ajoute les congés.»
Toutes ces tensions expliquent que les mouvements à la petite enfance soient récurrents, tous les deux ou trois ans, et qu'ils se cristallisent sur l'amélioration des conditions de travail, avec en particulier des besoins en personnel supplémentaire et un système de remplacement efficace. En effet, le recours à la mobilité géographique forcée – balader des agents d'un établissement à l'autre selon les absences – va complètement à l'encontre d'un accueil de qualité qui suppose la continuité des soins, la référence professionnelle. Pis, parallèlement, la polyvalence s'est imposée : sans formation pour cela, le personnel technique est sollicité pour encadrer des enfants. «On bidouille pour remplacer le personnel absent.»
UN CALENDRIER
La mobilisation a permis l'instauration du dialogue et de petites avancées : «On admet par exemple que l'heure de grossesse accordée aux professionnels ne peut être soumise à nécessité de service comme ces derniers temps, note Guillaume Floris. Depuis, la direction reconnaît les difficultés – à la cellule d'écoute de souffrance au travail à la ville, 40% des consultations proviennent d'agents des crèches –, admet que des postes supplémentaires sont nécessaires mais, «contrainte budgétaire, désengagement de l'Etat, obstacles techniques, absence de diagnostic clair, etc.».
Concrètement, pas de solution. Mais un calendrier de travail avec l'objectif de créer des postes supplémentaires en 2016 et d'évaluer et améliorer le dispositif de remplacement. «On reste vigilants et mobilisés, conclut le syndicaliste. D'autant que l'accueil de la petite enfance est une vitrine politique et que nous avons bénéficié d'une grande solidarité de la part des parents qui ont pu se rendre compte des dysfonctionnements.»
La petite enfance à la Ville de Paris en chiffres
La Ville de Paris compte 65 000 agents dont 8 500 à la petite enfance (personnel administratif compris), 465 établissements (crèches, crèches familiales, PMI) avec des compétences diverses (agents techniques, auxiliaires de puériculture et de soin, des éducateurs de jeunes enfants, des puéricultrices et puériculteurs, des psychologues et des médecins, des agents administratifs). |