Extension du domaine syndical
Deux militants californiens du parasyndicalisme (US) et un militant du ReAct ont rencontré l’Urif-CGT pour parler syndicalisation, actions locales et interactions. Ils tirent... Lire la suite
Suite de notre article d’hier sur la rencontre entre militants californiens et syndicalistes de l'Union régionale d’Île-de-France : Extension du domaine syndical
Une illustration à travers la bataille de 25 femmes de chambre philippines employées dans un hôtel d'une base militaire, qui s'étaient mises en grève pour des impayés de salaire. À ce seul motif, elles ont toutes été licenciées.
« Le centre du travail les a d'abord renseignées sur leurs droits, puis, nous les avons convaincues de se syndiquer pour constituer un bloc de travailleurs et avons défini ensemble une stratégie d'actions qui a permis de toutes les réintégrer », explique Kent Hudson militant du collectif « Pouvoir d'agir », qui interagit avec l'ERC et le ReAct (réseau pour l'action collective transnationale).
Acquises au militantisme actif, ces femmes philippines ont mené et gagné une deuxième bataille décisive : obtenir de l'état fédéral californien que toutes les cartes d'adhésion au syndicat soient imprimées en mode bilingue, la majorité d'entre elles ne parlant pas la langue anglaise.
Fortes de cette victoire, ces 25 Philippines ont pu convaincre 3 000 autres, qui travaillaient dans la même chaîne hôtelière, de se syndiquer. « Depuis, tous les bulletins syndicaux sont désormais bilingues, dans toutes les langues de toutes les communautés de l'État », précise Kent Hudson.
La démarche de syndicalisation de l'ERC a fait ses preuves. Y compris auprès des chauffeurs de taxi, catégorie pourtant non salariée, mais dépendante d'une plate-forme de réservation privée. Essentiellement issus de la communauté africaine, ces chauffeurs de taxis ne revendiquaient rien de moins qu'une modification législative pour l'obtention de leur licence afin de pouvoir travailler en toute légalité.
La bataille, très politique, a été gagnée grâce à une longue et vaste mobilisation collective qui a rassemblé bien au-delà de la seule communauté africaine. Le syndicat des taxis créé pour mener cette bataille fédère aujourd'hui 600 adhérents. Leurs cotisations financent leurs luttes, la solidarité en soutien d'autres luttes, mais aussi les salaires des responsables permanents.
À leur tour, ils forment des leaders syndicaux afin d'assurer le développement de l'activité syndicale, y compris au sein d'autres communautés. « La clé de cette dynamique, c'est ce travail réticulaire de ponts, de liens, de contacts très serrés un grand nombre d'associations qui militent sur les questions de justice sociale, ça nous permet d'identifier tous les travailleurs que nous ne voyons pas, dans les quartiers, et pas juste dans les entreprises », assure Kent Hudson.
La force du réseau, Kent et Peter l'ont expérimentée à grande échelle lors de la bataille « Fight for 15 » engagée par les salariés de McDonald's. Au départ, une poignée de salariés engagent, sans trop y croire, une lutte pour le doublement du minimum horaire, de 7,20 $ de l'heure dans toute la restauration rapide.
Via l'ERC, le ReAct est mis dans la boucle et apporte ses méthodes d'action et la puissance de son propre réseau de partenaires. Une vaste campagne revendicative à base d'opérations coup de poing est déployée et sans cesse relayée dans les magasins de l'enseigne, grâce au concours de militants organisés en « alliances citoyennes ».
Résultats en cascade : les 15 $ de l'heure sont d'abord gagnés dans un premier restaurant ; puis, sous l'effet de la pression incessante des actions, plusieurs villes adoptent le minimum horaire, qui s'étend par contagion à d'autres enseignes de fast-food dans ces mêmes villes, obligées de s'aligner.
La victoire sera totale lorsque l'état fédéral de Californie adoptera ce taux horaire de 15 $ comme minimum légal fédéral pour l'imposer à toutes les professions. « C'est ce que, modestement, nous venons de gagner, et cela ouvre des formidables perspectives pour l'action syndicale ».
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