« Le juste prix, c'est celui qui paie le travail »
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C'est la batterie du téléphone qui faiblit, la courroie de transmission du véhicule qui lâche, l'ordi qui devient hyper-lent… Hasard ou coïncidence, la panne arrive souvent quelques jours après la fin de la garantie.
Les pièces de rechange ? Introuvables ou hors de prix. La mort dans l'âme, on se résout à jeter l'objet défectueux pour racheter du neuf. Mais si tout ceci était voulu, voire « programmé », afin d'alimenter sans fin la machine à consommer ?
Le premier cas avéré « d'obsolescence programmée » nous vient des fabricants d'ampoules. En 1924, ceux qu'on baptisera le « cartel de Phœbus » se réunissent pour limiter la durée de vie de leurs produits à mille heures.
Le concept d'« obsolescence planifiée » est théorisé quelques années plus tard durant la grande dépression : pour soutenir l'industrie, il faut pousser les Américains à consommer.
Dans les années 1940, la firme DuPont de Nemours en fait l'expérience avec un produit miracle, un bas de nylon si solide qu'il ne file pas. Les consommatrices sont ravies, mais les ventes stagnent. Les ingénieurs changent alors la formule pour réduire la solidité des bas…
En une génération, la durée active des équipements électroniques – plus sophistiqués mais moins résistants – a été divisée par trois. « Si ces appareils tombent en panne ou ne remplissent plus leurs missions, c'est avant tout parce qu'ils sont bourrés d'électronique », estime le journaliste Michel Ebran, dans un rapport édité en 2010 par les Amis de la terre.
Si les produits sont conçus pour avoir une durée de vie réduite, les cas de sabotage avérés, à l'instar des imprimantes Epson équipées d'une puce arrêtant l'appareil après 18 000 impressions, sont limités. Chez UFC-Que choisir, on préfère donc parler « d'obsolescence organisée ».
« Cela passe par différentes techniques, énumère Cédric Mussot. L'une d'entre elles consiste à introduire des pièces plus fragiles que par le passé, par exemple des composants en plastique dans votre machine à laver qui vont céder plus facilement. Ou à rendre indisponibles ou hors de prix les pièces détachées, ce qui oblige à renouveler l'ensemble de l'équipement. » Qu'un seul accessoire lâche, et il faut tout racheter…
Avec six modèles d'iPhone en cinq ans, l'entreprise Apple est passée maîtresse dans l'art de rendre très vite obsolètes ses produits phares. En rendant notamment impossible le changement des batteries, moulées dans le plastique des téléphones.
Ou en titillant notre goût pour la nouveauté. Car l'obsolescence est aussi d'ordre « psychologique », publicité et marketing nous poussant à changer de modèle tous les deux ou trois ans, ce qui réduit encore le cycle de vie des appareils.
Une course à l'innovation au prix écologique élevé : le renouvellement accéléré de nos équipements génère un gaspillage sans précédent des ressources naturelles et une production exponentielle de déchets. Selon un rapport présenté par l'Organisation des nations unies, ce sont près de 49 millions de déchets électriques et électroniques qui ont été jetés en 2012 à travers la planète.
Soit, pour chaque Français, pas moins de 21 kilos par an.
Et les filières de recyclage ne suivent pas. « Ce sont des appareils avec des composants particulièrement toxiques et de plus en plus complexes, donc difficiles à recycler, la déconstruction n'étant pas dans les préoccupations des fabricants », souligne Laura Chatel, du Centre national d'information indépendante sur les déchets.
La loi sur la transition énergétique, adoptée en octobre 2015, sanctionne désormais « l'obsolescence programmée », assimilée à une « tromperie ». À condition d'être avérée, celle-ci peut valoir jusqu'à deux ans d'emprisonnement et 300 000 euros d'amende.
« C'est au mieux un signal fort, estime Cédric Mussot. Mais il faut pouvoir démontrer que l'obsolescence a un caractère intentionnel. C'est assez difficile. » D'autres pistes pourraient être explorées.
Comme l'extension obligatoire de deux à cinq ans de la durée de garantie qui obligerait les industriels à faire le choix de la durabilité des produits. Du côté des consommateurs, des solutions collaboratives émergent : réseaux d'échanges sur le Net (Leboncoin), rendez-vous de bricoleurs dans les Repair Cafés, les Ateliers du bocage lancés par Emmaüs pour redonner vie aux appareils en panne…
Côté industriels, certains font, à contre-courant, le pari de la durabilité. Tel le téléphone Fairphone, entièrement réparable et recyclable, garanti sans métaux rares provenant de pays en guerre. L'écoconception des produits, un remède au tout-jetable à encourager.
« Les fabricants, en changeant certaines pièces maîtresses, font en sorte d'amener l'appareil vers une mort certaine après une durée d'utilisation prédéterminée.» Serge Latouche, auteur de Bon pour la casse.
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