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Économie

Argent (public) trop cher

13 octobre 2015 | Mise à jour le 1 mars 2017
Par | Photo(s) : DR
Argent (public) trop cher

Le mirage MG Call / IRC (plateforme téléphonique et institut de formation associé) s'est évaporé moins d'un an après son apparition, à Tarbes. Reste le vide et une ardoise salée : plusieurs millions d'euros publics dilapidés et 150 personnes jetées à la rue. La liquidation judiciaire des deux entreprises a été prononcée le 5 octobre.

Enfin ! Un mois de lutte pour décrocher, notamment, 12 mois de prise en charge au titre de la formation professionnelle et de la rémunération de fin de formation (RFF), et la saisine du procureur de la République au titre de l'article 40 du Code de procédure pénale. La victoire des salariés de MG Call et IRC a un goût amer.

Non, ils ne sont pas responsables de la partie de poker menteur qu'a jouée leur patron avec les élus et les pouvoirs publics. Mais oui, ils passent leur tour. Retour à la case précarité. Tout ça, pour ça…

« Ça », c'est une fable qui endort l'État, les collectivités territoriales et Pôle emploi : remise à neuf d'un bâtiment à hauteur de 500 000 € par le Grand Tarbes, qui offre également de différer le paiement du loyer pour 12 mois ; exonération des cotisations patronales ; mobilisation à hauteur de 1 million d'euros du fonds de formation professionnelle et aides à la mobilité par Pôle emploi…

L'argent public coule à flots pour soutenir le projet de Mohamed Gueday : l'installation de 2 entreprises sur le télésite de Bastillac et la création de 400 emplois le 1er décembre 2014. Le nouveau patron, lui, pose sur la table 1 500 € (1 000 pour la plateforme téléphonique, 500 pour l'institut de formation associé).

« La promesse était belle, surtout pour un bassin touché par le chômage (11,4 % au 1er semestre 2015 selon l'Insee, NDLR), mais comment Monsieur Gueday a-t-il pu créer une affaire sans que personne n'ait vérifié sa viabilité et sa crédibilité ? » Brigitte Sorin s'interroge, sans décolérer, sur les raisons d'un énorme gâchis : la mise sur le carreau de 150 personnes et la dilapidation de l'argent public.

UN EMPLOI, PAS AU PRIX D'UNE VIE

Elle avait pourtant besoin de cet emploi de téléconseillère : « J'étais sans revenu, raconte la quinquagénaire. Et quand ma fille, qui travaillait aussi pour la plateforme téléphonique, m'a fait part des embauches possibles, je me suis dit que j'avais là une opportunité d'assurer ma retraite et de finir tranquillement ma carrière. »

Mina Bacallado, elle, a rompu un CDD (contrat à durée déterminée) pour rejoindre l'entreprise. « J'ai été embauchée le 5 janvier. J'étais contente d'intégrer une entreprise, en CDI en plus, à un poste et à une fonction qui me faisait envie, raconte la jeune femme de 36 ans, qui devient formatrice chez IRC.  Les conditions de travail, au démarrage de l'activité, étaient très sommaires, mais elles ne m'ont pas choquée. Peu de mobilier et un bâtiment en travaux, je me suis dit que c'était normal. Jusqu'au mois de mars… »

Les recrutements tardent. La fiche de paie affiche un zéro pointé sur la ligne des heures travaillées. Les salariés de MG Call et IRC ne le savent pas encore, mais ils sont au chômage partiel depuis le mois de janvier. Si certains s'accrochent et résistent pour faire valoir leurs droits, d'autres allongent la liste des licenciements pour faute grave ou rupture conventionnelle.

Les arrêts maladie pleuvent. Et puis, le 10 septembre, la colère explose : le salaire d'août ne tombe pas. Il ne tombera jamais. Les salariés serrent les coudes pour jeter à la figure des élus et des services de l'État leur vérité et leur détresse…

Un mois est toutefois nécessaire pour que leur voix soit entendue. Enfin. « Le cas MG Call / IRC révèle une hystérie qui consiste à ouvrir les vannes de l'argent public au nom de l'emploi et de la compétitivité, sans contrepartie, ni contrôle, ni suivi, conclut François Dousseau, secrétaire de l'union départementale CGT des Hautes-Pyrénées. Le rapport de force et l'action collective ont permis aux 150 salariés de se faire entendre, mais la bataille pour le contrôle des attributions de fonds publics continue. »