26 novembre 2020 | Mise à jour le 30 novembre 2020
Le Conseil d'État a déclaré hier 26 novembre deux dispositions de la réforme de l'assurance illégales, car contraires au principe d'égalité et disproportionnées. Une première victoire syndicale contre cette réforme dont toutes les confédérations ont exigé l'abandon.
À la grande satisfaction de la CGT qui avec Solidaires, FO et la CGC avait saisi le Conseil d'État contre les décrets de la réforme de l'assurance chômage, deux de ses dispositions très contestées ont été annulées. Les syndicats se sont unanimement félicités de « cette première victoire ». « Il faut amplifier la lutte pour obtenir l'annulation totale d'une réforme profondément injuste », a réagi la CGT ; pour la CFDT, le gouvernement « doit plus que jamais renoncer à sa réforme ».
Cette décision n'a cependant pas d'impact immédiat puisque, du fait de la crise sanitaire et sociale, le gouvernement a suspendu l'application de la réforme, décidée par décret en juillet 2019, jusqu'au 1er avril 2021. Ce qui fait dire à la ministre du Travail que les concertations en cours avec les syndicats et le patronat pour tenir compte de la crise « permettront de proposer des solutions conformes à la décision du juge ». Les deux points retoqués concernent : le changement du mode de calcul de l'allocation chômage ; le changement du mode de calcul du SJR (Salaire journalier de référence) prévu au 1er avril 2020.
Calcul de l'allocation
Le Conseil d'État a estimé que cela « porte atteinte » au principe d'égalité entre allocataires. Pour la même durée de travail et le même salaire, deux personnes pourraient avoir une allocation du simple au quadruple, selon la façon dont les contrats se sont étalés dans le temps ou, au contraire, s'il s'agit d'un seul contrat continu.
« Le gouvernement entend calculer les allocations mensuelles non plus en se basant sur le total des salaires divisé par les jours de travail, mais sur ce total divisé par les jours correspondant aux périodes sur lesquelles les contrats ont eu lieu. Cela reviendrait à diviser par 2, 3 ou 4 les allocations mensuelles », rappelle la CGT.
Calcul du salaire journalier de référence
La réforme prévoyait que le salaire journalier de référence, base de l'allocation mensuelle, soit calculé non plus sur le total des salaires divisé par les jours de travail des 24 derniers mois, mais sur ce total divisé par l'ensemble des jours, y compris non travaillés, de la période. Une mesure très pénalisante pour les « permittents », ceux souvent précaires qui alternent chômage et contrats courts, notamment les intérimaires, saisonniers, extras hôteliers, CDD très discontinus qui permettait au gouvernement de réaliser presque la moitié des économies escomptées par le gouvernement.
« Du fait des règles qui ont été retenues, le montant du salaire journalier de référence peut désormais, pour un même nombre d'heures de travail, varier du simple au quadruple », constate le Conseil d'État. « Il en résulte (…) une différence de traitement manifestement disproportionnée au regard du motif d'intérêt général poursuivi ».
Report du bonus-malus
L'autre point annulé par le Conseil d'État est l'instauration d'un bonus-malus sur la cotisation d'assurance-chômage payée par les entreprises dans sept secteurs grands consommateurs de CDD courts et d'intérim (hébergement-restauration, agroalimentaire, transports, plasturgie…). Mais elle est annulée pour une raison mineure, le juge estimant que le dispositif de bonus-malus renvoyait, pour certaines modalités, à un arrêté là où il aurait fallu un décret.
Mobilisation le 5 décembre
Pour la CGT, « la seule chose qui reste donc de la réforme du gouvernement – que celui-ci entend toujours faire passer en force, malgré l'opposition unanime des organisations syndicales et le contexte de montée du chômage –, c'est une réforme anti-jeunes (les moins de 26 ans, souvent les moins qualifiés, sont les plus touchés par le relèvement des seuils d'accès) et anti-cadres (avec la dégressivité) » .
Dans le contexte de la crise sanitaire et sociale où se multiplient les licenciements et les PSE « souvent opportunistes », la CGT appelle à manifester « massivement et unitairement le 5 décembre pour : le droit au travail, l'emploi, contre le chômage et la précarité organisés par le gouvernement et le patronat et pour l'annulation définitive de cette réforme inique ».