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FORMATION PROFESSIONNELLE

Compte personnel de formation : coup de rabot dans les droits des salariés

13 décembre 2022 | Mise à jour le 14 décembre 2022
Par | Photo(s) : Romain Longieras / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP
Compte personnel de formation : coup de rabot dans les droits des salariés

Un amendement du gouvernement au projet de loi de finances 2023, déposé samedi 10 décembre, prévoit un « reste à charge » pour les salariés qui veulent bénéficier de leur compte personnel de formation. Une attaque en règle aux droits des travailleurs.

Alors que les salariés supportent déjà le coût d’une inflation galopante (6,2% depuis un an en octobre 2022 selon l’Insee), le gouvernement souhaite qu’ils mettent également la main à la poche pour utiliser leur compte personnel de formation (CPF). Ce samedi 10 décembre, un amendement au projet de loi de finances 2023 a été déposé par l’exécutif pour « instaurer une participation du titulaire, quel que soit le montant de droits disponible sur son compte  ». Le texte précise que la participation du salarié   »sera proportionnelle au coût de la formation, dans la limite d'un plafond ou fixée à une somme forfaitaire  », selon des modalités qui seront définies par décret. La mesure ne s’appliquera pas aux demandeurs d'emploi et aux salariés inscrits dans une formation « co-construite » avec leur employeur.

Un « coût » du CPF à relativiser

Lancé en 2014, le CPF a remplacé en 2019 les droits individuels à la formation. Autrefois crédités sous forme de droits en heures, les droits à la formation sont désormais monétisés et utilisables via une plateforme en ligne, sans l’intermédiaire de conseillers. Cette libéralisation du secteur de la formation professionnelle, enclenché par la ministre du travail Muriel Pénicaud a généré l’explosion du nombre d’offres de formation disponibles de même que nombre d’escroqueries. Un phénomène largement documenté.

Pour justifier son amendement, le gouvernement Borne communique aujourd’hui sur le coût du CPF, avançant le chiffre de 6,7 milliards d’euros. Pour l’exécutif, ce montant s’expliquerait par le succès du dispositif, qui aurait généré cinq millions d’inscriptions depuis son ouverture. Mais pour Angeline Barth, secrétaire confédérale de la CGT, ce coût du CPF est à relativiser :  » le budget du CPF pour 2022, c’est 2,6 milliards d’euros tandis que celui de l’apprentissage c’est 10,5 milliards d’euros, alors même que l’objectif d’un million d’apprentis voulu par le gouvernement n’est pas atteint. »

Politique de soutien à l’apprentissage

En arrière-plan, le déficit structurel colossal de plus de 11 milliards d’euros de France compétences, l’organisme chargé de réguler la formation professionnelle et de répartir les fonds aux différents acteurs du secteur. La politique gouvernementale de soutien à l’apprentissage pèse lourd dans le budget de l’établissement public. L’aide financière exceptionnelle de l’État versée aux employeurs qui recrutent un apprenti s’élève à 5000 ou 8000 euros, ce qui a mécaniquement engendré une forte hausse du nombre de contrats d’apprentissage. Dans le même temps, cela a contribué à augmenter les financements que France compétences doit allouer aux centres de formation des apprentis (CFA). « La principale dépense de France compétences aujourd’hui , c’est le soutien à la politique et au développement de l’apprentissage voulu par le ministère du travail  » poursuit Angeline Barth.

Le choix retenu par le gouvernement de faire payer aux salariés le déficit structurel de France compétences s’inscrit dans la lignée des politiques menées en faveur du capital :  » le gouvernement ne veut imposer aucune obligation aux entreprises » analyse Angeline Barth. « Plutôt que de s’attaquer aux vraies racines de ce déficit en conditionnant les aides aux entreprises à l’insertion des jeunes, à des questions d’égalité femmes-hommes ou au respect de clauses environnementales, le gouvernement a décidé de s’attaquer au droit des travailleurs. » De son côté, la CGT appelle à augmenter les contributions des entreprises à la formation professionnelle à hauteur de 1,6 %, soit le taux auquel elles étaient soumises jusqu’en 2014.