Jupiter ne peut pas tout faire
La nouvelle est presque passée inaperçue dans l'Olympe médiatique et pourtant ce n'est pas une mince affaire. Jupiter a avoué sa défaite. Ou plutôt non, il a reconnu « que l'exécutif n'a pas réussi à honorer sa promesse » ce qui est presque pareil, mais en mieux dit.
Le sujet de sa flagellation devant les journalistes de l'Association de la presse présidentielle (où la NVO ne compte autant adhérent) ? Ces salauds de pauvres qui vivent presque tous de leur plein gré dans la rue selon Christophe Castaner, porte-parole de La République en Marche.
Ces femmes et ces hommes, on ne les nomme plus que par trois lettres majuscules : SDF. Un sigle qui dit l'absence de toit, mais tait tout le reste : le froid, la peur, la saleté, la solitude, l'anxiété, la maladie, les troubles mentaux…
Que Jupiter se penche sur ces pauvres hères et qu'il reconnaisse avec des airs de curé contrit, pull noir, teint blafard et raie sage sur le dessus du crâne, qu'il n'a pas pu tenir sa promesse de tout jeune Président, à savoir que « plus personne ne dorme dans la rue avant la fin de l'année 2017 » (lors de son discours d'Orléans en juillet 2017), voilà qui grandit sa présidence bienveillante ! Reste que, au palmarès des promesses non tenues, il y en a pour tous les goûts. La palme de la plus farfelue revient à Jacques Chirac quand, en 1988, le fringuant maire de Paris, ami intime de tous les pollueurs, jurait que « dans cinq ans », il se baignerait dans les eaux claires et saines de la Seine. Quant à la « fin des SDF », elle a tout du passage obligé pour qui brigue les ors bien chauffés de l'Élysée. Lionel Jospin, Nicolas Sarkozy aussi visaient « le zéro SDF ». C'était en 2002. Le temps passe et des SDF trépassent.
Heureusement, une nouvelle ère commence avec Jupiter. Désormais, on peut toujours dire n'importe quoi et toujours ne rien faire pour aider les plus démunis et, ô vertu de la confession médiatique, se faire absoudre en reconnaissant ses failles et ses faiblesses. C'est le petit côté sado-maso de Jupiter.
Alors, imaginons que la confession présidentielle crée un précédent. Verra-t-on Muriel Pénicaud, ministre du Travail, nous faire part de ses condoléances pour la mort d'un code du travail lorsqu'elle s'apercevra que, contrairement à son crédo libéral, faciliter les licenciements ne va pas favoriser l'emploi ? Ou Agnès Buzyn, ministre de la Santé reconnaitre après le passage du typhon CAP 2022 et la suppression programmée de 120 000 fonctionnaires, que — ça alors — la casse de notre système de santé n'a rendu pas « plus responsables » les malades ?