La fin de quatre ans de présidence Trump
Joe Biden a remporté l’élection présidentielle contre Donald Trump et sera le 46e président des États-Unis. Dans un pays profondément divisé, les travailleurs et leurs... Lire la suite
Accablé par la diffusion, par le Washington Post, d'une vidéo où il explique en termes obscènes comment multiplier les conquêtes féminines, puis par des accusations d'attouchements, le candidat républicain, Donald Trump, dénonce désormais le trucage des élections, accuse pêle-mêle presse et « élites », et a même menacé de jeter en prison sa concurrente démocrate, Hillary Clinton, si lui était élu…
Près de huit ans après l'arrivée de Barack Obama à la Maison Blanche, la campagne pour l'élection du prochain président des États-Unis (le 8 novembre prochain) aura aussi bousculé bien des certitudes ou des clichés sur le « rêve américain ».
Certes, comme c'en est devenu une triste habitude pour la démocratie, une grande partie des électeurs boudera vraisemblablement encore les urnes cette année, ou en sera tout bonnement exclue, faute de papiers ou d'adresse valide, ou bien suite à des condamnations, La bipolarisation de la vie politique américaine s'accommodera encore une fois d'un taux de participation beaucoup trop faible. Mais, du côté républicain comme du côté démocrate, des lignes ont bougé, des verrous ont sauté.
Chez les républicains, le milliardaire Donald Trump, magnat de l'immobilier, a déjoué les pronostics des primaires en éliminant les autres prétendants. Son atout : le jeu dangereux du « politiquement incorrect », ce qui signifie bafouer toute éthique, nourrir un populisme qui prétend prendre sa revanche sur les « élites » alors que lui-même jongle avec les millions, faire des travailleurs migrants des boucs émissaires faciles pour tous ceux que le système économique exclut, promettre des murs contre l'immigration, multiplier les diatribes contre l'islam, se permettre tous les dérapages violents, souvent sexistes, presque toujours xénophobes, faire de ses vulgarités les preuves de son anti-élitisme, ne pas hésiter à additionner les contre-vérités, puis, tandis que les sondages annoncent sa déroute, jouer de thèses complotistes et se présenter en victime…
Pour séduire certaines « minorités », il a su s'opposer à des thèses traditionnelles et traditionalistes des caciques républicains, notamment quant au droit de tous et toutes au mariage. Mais il a aussi cherché à aguicher les laissés-pour-compte d'un système qui l'a enrichi, en dénonçant le libre-échange et en se faisant le chantre à la fois du protectionnisme économique et du non-interventionnisme sur la scène internationale. Et, se faisant aveugle aux inégalités qui s'accroissent, il a préféré se présenter lui-même, fort de sa fortune, comme la preuve de la réussite individuelle et du « rêve américain » toujours possibles…
Chez les démocrates, c'est Hillary Clinton qu'ont désignée les primaires. Sénatrice de l'État de New York, déjà candidate aux primaires de 2008, puis secrétaire d'État des États-Unis, l'épouse de l'ancien sénateur de l'Arkansas devenu président des États-Unis (de 1993 à 2001) n'a rien d'une débutante. Si elle se présente comme la première femme potentiellement éligible à la Maison Blanche, son parcours n'en est pas moins des plus classiques.
Pour autant, elle doit tenir compte de ce qu'il est possible de qualifier d'événement dans le camp démocrate : son challenger, Bernie Sanders, a obtenu aux primaires les voix de quelque 12 millions d'électeurs. Sénateur du Vermont, ce militant, qui n'hésite pas à parler de socialisme aux États-Unis, s'est illustré tant dans les domaines économique et social, en refusant par exemple les exemptions d'impôts aux plus riches, qu'en politique étrangère, en s'opposant, à l'inverse d'Hillary Clinton, à l'invasion de l'Irak.
Soutenu par nombre d'économistes hétérodoxes, il a axé sa campagne sur la justice sociale et la lutte contre les inégalités. Et contraint Hillary Clinton à tenir compte davantage des attentes de ses électeurs en matière sociale, qu'il s'agisse de santé ou de minimum salarial…
C'est qu'en dépit des immenses attentes suscitées par Barack Obama, en particulier lors des deux premières années de son premier mandat alors qu'il disposait d'une large majorité au Congrès, la fin de la crise bancaire et de la récession de 2008, avec une croissance de 2,4 %, n'a pas signifié sortie de crise pour tous, loin s'en faut. Elle n'a en fait profité qu'aux plus riches, tandis que les inégalités et la pauvreté se sont considérablement accrues. Les expropriations qui ont suivi la crise des subprimes se sont poursuivies au bénéfice des banques qui l'ont pourtant engendrée, et qui ont bénéficié des largesses de l'État pour se rétablir.
Si le chômage a baissé, c'est au prix de l'augmentation considérable du nombre de travailleurs pauvres, privés de logement, voire de cartes bancaires. Dans les quartiers populaires, les « check cashers », où l'on prête de petites sommes à très fort taux d'intérêt, pullulent. On estime à près de 50 millions les Américains mangeant dans les soupes populaires, dont la moitié sont des enfants.
La mise en place d'un système de santé plus solidaire et ouvert au plus grand nombre est restée au milieu du gué. L'accès aux études devient inaccessible à une grande part des enfants des classes moyennes elles-mêmes. Leur coût exorbitant contribue au surendettement des familles qui en ont encore les moyens et de jeunes qui remboursent en plusieurs décennies.
<a href= »https://data.oecd.org/chart/4Exx » target= »_blank » data-mce-href= »https://data.oecd.org/chart/4Exx »>Graphique OCDE: Dette des ménages, Total, % du revenu disponible net, Annuelle, 2014</a>
Quant aux villes transformées, telles Detroit, en déserts industriels, elles se voient peu à peu privées de services publics, sinon soumises à des tutelles administratives qui suppriment ces services, réduisent le nombre des fonctionnaires, baissent leurs salaires et pensions… Un cercle vicieux dont les populations les plus fragiles et les plus précaires font les frais.
Les prisons, pour beaucoup privées ou abandonnées à des shérifs locaux, deviennent pour certains des sources de profits considérables.
Quant au racisme contre les Afro-Américains, il grandit à la vitesse des crimes impunis de certains policiers blancs… Dans un tel contexte, les prédicateurs de toutes sortes font leurs choux gras.
Et progressent, de façon radicalement opposée, d'un côté les thèses populistes, xénophobes et islamophobes, de l'autre les exigences d'égalité de mouvements citoyens nouveaux.
Aussi est-ce sous la présidence d'Obama qu'est né le mouvement Occupy Wall Street et qu'ont eu lieu les grandes grèves organisées par les syndicats dans les fast-foods et la grande distribution, en particulier pour des salaires moins indécents et d'autres droits de salariés aujourd'hui si facilement licenciables… L'exigence d'un salaire horaire minimal de 15 euros fait ainsi son chemin.
Sous sa présidence aussi s'est structuré le mouvement « Black Lives Matter » (« Les vies des Noirs comptent »), qui proteste notamment contre le harcèlement raciste et la multiplication des assassinats de Noirs par des policiers blancs et contre leur quasi-totale impunité.
Hillary Clinton a donc dû en tenir compte : réforme de la finance, augmentation du salaire minimum (à 12 et non 15 dollars de l'heure), droits nouveaux pour les familles, meilleure « intégration » des immigrés… s'affichent aujourd'hui à son programme. Avec le soutien du mouvement syndical, à la fois exigeant et vigilant.
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