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TRANSPORTS

Hors les rails

18 octobre 2013 | Mise à jour le 13 février 2017
Par | Photo(s) : DR
Hors les rails

Le 9 octobre, la CGT appelle à une unité large en France et en Europe contre le quatrième paquet ferroviaire européen qui prévoit une ouverture à la concurrence généralisée en 2019, obligatoire pour le trafic voyageur. Quatre syndicats d'Île-de-France ont invité des syndicalistes grecs et britanniques.

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Giannis Kiousis (responsable transports athéniens) membre du PAME

NVO : Dans quelle situation se trouvent les chemins de fer grecs.

Giannis Kiousis : C'est le chaos. La ligne centrale qui reliait Athènes à la Grèce du Sud a été fermée. Le réseau a été quasi démantelé. Il y a trois ans, il y avait 7 500 travailleurs dans les chemins de fer grecs. Tous syndiqués. 3500 ont été renvoyés ou déplacés. Des conducteurs de train sont devenus brancardiers, gardiens de musée… Le salaire a baissé de 50 Toutes les conventions collectives ont été abolies. Mais certains secteurs peuvent encore rapporter: en ce moment, on négocie la vente de la partie exploitation, le fret, le transport passagers, la maintenance des supports techniques y compris les usines, la maintenance des lignes.

Dans les sociétés intéressées par le rachat, on trouve la SNCF, les Russes… La Grèce est un endroit clé pour les transports. Celui qui contrôle les transports, contrôle la marchandise et prend la meilleure place dans la concurrence entre pays impérialistes. Mais quel profit pour les travailleurs grecs et français? Le mouvement ouvrier n'est pas à la hauteur en Grèce. L'idée dominante est d'abord de se sauver soi-même. Quand les cheminots ont subi les licenciements, les travailleurs des hôpitaux n'ont rien dit car ils ne se sentaient pas concernés. Maintenant, que les hôpitaux ferment et que ces travailleurs font face aux mêmes problèmes que les cheminots, c'est au tour des conducteurs de bus de ne pas se sentir concernés… à placer leur argent

Qu'en est-il de la retraite des cheminots ?

Jusqu'à maintenant, les cheminots ayant commencé à travailler avant 1983 devaient cotiser 35 ans, peu importait leur âge. Ceux ayant commencé entre 1983 et 1990 devaient cotiser 37 ans. Mais ceux qui ont commencé après 1990 ont les pieds dans le tombeau… et ne toucheront pas de retraite! Je vais vous raconter une anecdote qui donne des frissons. Il y a quelques années, on a obligé les caisses de retraite à placer leur argent dans les banques en échange d'actions. Leur valeur a baissé de 70 Les 30sauvés ne suffisent plus à financer la retraite de ceux qui doivent actuellement partir. Un nouveau système est en train d'être voté qui concernera tous les travailleurs, peu importe où ils travaillent. Tout le monde touchera une allocation retraite de 350 euros. Le gouvernement est fier que cela touche tout le monde. Et en même temps, il est en train d'abolir les cotisations patronales: seul le travailleur paiera. Mais quelle cotisation peut-on prendre sur le salaire de 600 euros d'un cheminot.

Pourquoi avez-vous accepté l'invitation des syndicats français?

On voulait venir en France pour réexpliquer que les travailleurs grecs ne sont pas paresseux et que ce n'est pas ça, la cause de la crise. C'est encore ce que j'entends en Allemagne, en Serbie. La classe dominante cultive l'image des Grecs paresseux, de Grecs responsables de la crise. Or, nous entendons parler de la privatisation depuis notre entrée dans l'Union européenne. On vend nos entreprises publiques pour trois fois rien à une entreprise privée qui licencie les travailleurs et distribue des salaires de misère. Pendant quatre, cinq ans, l'entreprise privée prend ce qu'elle a à prendre puis la revend à prix d'or au service public. On vous parle des 400 milliards d'euros de la dette grecque, mais qui parle des 600 milliards d'euros des armateurs et Grecs capitalistes placés en Suisse.

Le gros marché d'affaires du rail britannique Mike Sargent, du syndicat britannique des chemins de fer RMT : « En 1990, il n'existait qu'une compagnie ferroviaire en Grande-Bretagne : la British Rail. En 1994, le gouvernement conservateur a décidé sa privatisation : c'est là que je suis devenu militant. Très vite, des lois sont passées. En 1999, j'ai reçu une lettre qui m'informait que je ne travaillais plus pour les services publics. Un désastre. Le Parti travailliste nous a dit : dans un an, si nous sommes élus, nous reviendrons sur cette privatisation. Devinez quoi ? Ils ont menti. Avec la privatisation, notre entreprise s'est transformée en douze sociétés. Et un seul syndicat. Le gouvernement a utilisé le législateur pour nous battre. On nous a présenté la privatisation comme un mieux. En fait, des lobbies agissent en sous-main et obtiennent des conditions de travail dégradées. Toutes les fonctions, tous les grades sont attaqués. Après vingt ans de privatisation, le chemin de fer est devenu un gros marché d'affaires qui se porte bien. Mais côté sécurité, c'est une catastrophe. »

Kareen Janselme