
Fret ferroviaire : la CGT s'insurge contre un scandale d'Etat
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Un véritable casse-tête, non pas chinois mais italo-allemand. IDFM a découpé le réseau de bus francilien en 12 lots qui seront attribués à des compagnies privées par son conseil d'administration. Chaque lot devra être opéré par une filiale de droit privé différente, même si celles-ci peuvent appartenir à la même entreprise. Seront concernées 315 lignes et près de 19 000 travailleurs. Et 12 millions d'habitants.
La société Transdev va récupérer 19 lignes au nord et à l'est de Paris. Cette multinationale deviendra bientôt allemande puisque la Caisse des dépôts, actuelle détentrice de la majorité du capital, va vendre ses parts au groupe d'outre-Rhin Rethmann, qui en possède déjà 34 %. En parallèle, l'opérateur des transports milanais Azienda Trasporti Milanesi (ATM) obtient 18 lignes de bus dans les Hauts-de-Seine (92), à l'ouest de la capitale. Le groupe italien opère déjà au Danemark et en Grèce. C'est la première fois qu'une société étrangère se voit confier des transports en commun à Paris.
En 2007, le parlement européen vote une loi au nom oxymorique de « obligation de service public » (OSP). Oxymorique car elle impose à tous les états membres d'ouvrir à la concurrence leurs services de transports, c'est-à-dire de laisser la possibilité à des entreprises privées de s'attribuer des portions de réseau public. La France ne se fait pas attendre et le gouvernement Fillon fait voter dès 2009 une loi qui prévoit la libéralisation du transport dans le pays, et donc la fin du monopole public.
Ça commence dès 2021 avec les Trains à grande vitesse (TGV) et les Transports express régionaux (TER) de la SNCF. Et cela continue aujourd'hui avec la RATP, qui avait déjà vu l'opérateur Transdev récupérer certaines de ses lignes de bus et de tramway en grande couronne, c'est-à-dire dans les départements de Seine-et-Marne (77), des Yvelines (78), de l’Essonne (91) et du Val-d’Oise (95).
Valérie Pécresse, présidente de l'Île-de-France (LR), se montre plus royaliste que le roi dans sa région en interdisant aux entreprises publiques de candidater aux appels d'offres, ce qui n'est pas prévu dans la loi européenne. La RATP a dû ouvrir une filiale de droit privé nommée RATP Cap Île-de-France. Nombre de travailleurs sont ainsi passés d'un contrat public à un contrat privé.
Valérie Pécresse, défend ce démantèlement en avançant l'idée libérale selon laquelle la concurrence entrainerait mécaniquement une baisse des prix et une meilleure offre. Pourtant, le bilan de l'ouverture à la concurrence en grande couronne est plus que mitigé.
« On comptabilise depuis septembre 2024 entre 1500 et 1900 courses supprimées par semaine » affirme Céline Malaisé, élue (PCF) au Conseil Régional. « Souvent elles sont dues au manque de chauffeurs, de maintenance ou de matériel. »
Des lacunes qui s'expliquent structurellement : le critère principal d'IDFM pour sélectionner un candidat en appel d'offre est le prix proposé. Les entreprises sont donc encouragées à réduire les coûts au maximum. Or, pour une entreprise de transport, 70 % du coût de fonctionnement, c'est la main d’œuvre. Ces sociétés baissent donc les salaires, les conditions de travail se dégradent et par conséquent la fluidité du réseau aussi.
Chaque lot sera opéré par une filiale différente, ce qui veut dire qu'au lieu d'une régie, il y en aura 12 différentes, étanches juridiquement et financièrement. « C'est un retour en arrière » pour Vincent Gautheron, secrétaire de la CGT RATP. « Le réseau de bus constitué de plusieurs opérateurs a existé avant la Seconde Guerre mondiale. Mais les autorités, à l’époque, s’étaient rendues compte que les entreprises privées ne remplissaient plus leur rôle en termes de services rendus, donc il avait été décidé d'unifier. »
Demain, en cas d'incident sur le RER ou le métro, mettre en place un système de bus de substitution devra se faire en coordonnant 3, 4 ou 5 opérateurs différents.
La RATP existe depuis 1948, tout comme le statut spécial de ses employés. 2 600 travailleurs et travailleuses vont dans les prochains mois être transférés de force vers Transdev ou ATM. Mais même ceux qui demeureront à la RATP travailleront en réalité pour sa filiale de droit privé RATP Cap Île-de-France, et non plus pour le public. Ils devront se contenter d'une garantie salariale d'une durée de quinze mois, après quoi, plus rien ne sera assuré.
La CGT est la première organisation syndicale à la RATP, avec 35 % des voix lors des dernières élections professionnelles en 2021. Elle voit dans cette privatisation du réseau parisien une forme de dumping social, c'est-à-dire la mise en concurrence de travailleurs avec ceux d'autres pays où le salaire est plus bas et la protection sociale moins solide. La CGT RATP appelle à un rassemblement le 10 avril au moment du conseil d'administration d'IDFM, au métro Mairie de Saint-Ouen à 12h.
À Cergy-Pontoise, dans le Val d'Oise (95), 480 salariés ont fait grève pendant plus de quatre mois, de novembre 2024 à mars 2025, pour protester contre la dégradation de leurs conditions de travail suite à la récupération de leurs dépôts par le groupe privé Lacroix Savac.
En Seine-Saint-Denis, certains employés sont préoccupés de voir leur dépôt cédé à Transdev. « Beaucoup de machinistes qui travaillent dans cette partie-là sont des anciens machinistes de Transdev » explique Vincent Gautheron, « comme ils y avaient des conditions salariales et de travail dégradées, ils ont souvent quitté la société pour aller travailler à la RATP. Donc il y a une grosse inquiétude sur ce lot-là parce qu’ils ne veulent surtout pas être rebasculés sous Transdev ». Si un salarié refuse son transfert, il est licencié « pour motif personnel ». Il ne perçoit donc pas d'indemnité chômage.
Côté ATM, l'opérateur milanais, ce n'est guère plus encourageant. Leur stratégie est de proposer un salaire extrêmement bas en espérant avoir un taux de refus de transfert important. De cette façon, ils pourront engager de nouvelles personnes, sans payer les garanties salariales dues aux anciens de la RATP. Pour Céline Malaisé, « ils s'engouffrent dans une zone grise. C'est parfaitement lisible dans leur réponse à l'appel d'offre ».
Que ce soit pour la RATP, la SNCF ou encore EDF, l'ouverture à la concurrence privée fragilise toujours le service public. Et ce qu'on donne au marché, il est très difficile de lui reprendre. Pour Vincent Gautheron : « C’est une question de fond sur le devenir de la région Île-de-France, parce qu’on risque de renfermer encore des territoires enclavés. Alors, c’est le droit à la mobilité universelle qui est en jeu. »
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