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LOI MACRON

Une loi à tiroirs… caisse

24 août 2015 | Mise à jour le 3 mars 2017
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Une loi à tiroirs… caisse

La cartographie des zones touristiques internationales et parisiennes – où le travail de nuit et le travail dominical seront autorisés – fait tache d'huile. Les syndicats du comité de liaison intersyndical parisien – le Clic-P – organisent la riposte.

Publiés en toute discrétion estivale, les décrets de la loi Macron parus au journal officiel le 18 août ne sont pas passés inaperçus des syndicats du commerce parisien. Et pour cause : « La carte des zones touristiques qui vient de leur être présentée va bien au-delà du périmètre initialement prévu lors des débats parlementaires et, pire encore, elle définit comme touristiques des zones qui ne le sont absolument pas », signale Karl Ghazi, porte-parole CGT du Clic-P, (l'intersyndicale du commerce parisien réunissant la CGT, l'Unsa, SUD et CFDT).

Ainsi, des quartiers tels que Rennes, Beaugrenelle, Ternes et – cerise sur les baguettes chinoises – Olympiades ont ainsi été classés en ZTI, « avec une zone Tang Frères internationale » ironise-t-on déjà au sein du Clic-P qui vient de rebaptiser les ZTI en zones de travail intensif. Difficile de qualifier cette définition d'usurpatoire quand on sait que, dans ces zones, le travail pourra être étendu à tous les dimanches de l'année et, mieux encore, qu'il pourra être prolongé tous les soirs jusqu'à minuit.

DÉCRET BOMPART

Autre entourloupe qui a fait bondir les syndicats : le classement de toutes les gares – et par ricochet de leur cortège d'enseignes marchandes – en ZTI, « y compris, et sans rire, les gares de Saint-Lazare et d'Austerlitz qui n'ont rien, mais alors rien, de touristique : c'est du foutage de gueule », s'indigne Karl Ghazi. Il y a en effet matière à s'insurger contre ne serait-ce que l'esprit du nouveau tracé touristique. Qui fait étrangement la part belle à certaines grandes enseignes, et tout particulièrement à la FNAC. Tous les magasins parisiens de l'enseigne culturelle se retrouvent miraculeusement catapultés en ZTI, au point que, sans risquer l'abus de langage, le Clic-P a renommé ce décret en « décret Bompart » (du nom de l'actuel PDG de la FNAC).

« Monsieur Bompart avait déposé un amendement en ce sens, mais il s'était fait retoquer ; à présent, il peut s'estimer satisfait », déplore Karl Ghazi. Dans les faits, la nouvelle carte confirme bien ce que le Clic-P n'a eu cesse de dénoncer ; à savoir que l'argument du tourisme international n'était en fait qu'un slogan, un prétexte servant à masquer l'objectif réel d'une généralisation du travail le dimanche. « Ce qui est désormais évident aux yeux de tous est que cette loi n'a pas été pensée pour répondre aux besoins des citoyens, mais aux attentes des seuls lobbies patronaux et, comble de la catastrophe, sans que ce gouvernement ne l'assume publiquement. »

GRAND BOND EN ARRIÈRE

Certes, gageons que les petites crapuleries estivales de monsieur Macron sauront réjouir un certain patronat très actif en lobbying de jour comme de nuit, dimanche compris. Tout à son credo du « tout marché », le Medef réclamait en effet depuis des lustres la libéralisation du secteur du commerce, truchement par lequel il visait en réalité la déréglementation totale de la législation sur le travail du dimanche et nocturne : nous y voilà !

Avec leurs petits amendements entre amis, Macron et Gattaz font donc coup double. Pour les salariés du commerce, en revanche, c'est le grand bond en arrière toute ; et qui en laisse présager d'encore plus funestes. À commencer par le travail des enfants de moins de 16 ans, ainsi que l'a argumenté sans vergogne un Alexandre de Juniac – PDG d'Air France KLM – très applaudi aux entretiens de Royaumont de 2014

REBOND SYNDICAL

Fort de ses victoires syndicales et juridiques contre de nombreuses grandes enseignes de la capitale, le Clic-P est déjà dans les starting-blocks pour faire monter la pression et croiser le fer avec le gouvernement. Dès la publication des décrets Macron au Journal officiel, le Clic-P interpellait la maire de Paris, Madame Hidalgo. Alors qu'elle s'était opposée à l'extension des ZTI lors des débats parlementaires, la maire n'a pas encore donné suite au Clic-P, arguant de temps nécessaire à l'étude des décrets.

Côté salariés du commerce, ils reprennent le chemin des mobilisations, avec une première assemblée générale programmée pour le 8 septembre. « Quand les salariés des commerces parisiens vont être plongés dans le concret de cette énième étape de dérégularisation et de détricotage de leurs droits, quand ils vont mesurer qu'ils viennent de perdre leur seul jour de repos commun avec le reste de la société pour le seul bénéfice du patronat, ils seront de nouveau vent debout pour obtenir le retrait de cette loi », assure Karl Ghazi. Comme par le passé, gageons qu'ils seront vite rejoints par les petits commerçants, autre catégorie sociale fragilisée par la loi Macron et l'avantage compétitif qu'elle réserve aux grandes enseignes.

Enfin, les citoyens parisiens pourraient à leur tour jouer les convergences de luttes : réunis en comités de quartier, les riverains des nouveaux ZTI ne semblent guère apprécier, et le font savoir, l'avènement d'une ville transformée en vaste zone de chalandise pour touristes supposément assoiffés de non-stop-shopping.


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