3 septembre 2019 | Mise à jour le 3 septembre 2019
Les partenaires sociaux sont attendus jeudi et vendredi à Matignon pour un nouveau round de concertation sur la réforme des retraites, sur fond de cacophonie gouvernementale et de rumeurs de remaniement.
On prend les mêmes et on recommence : après 18 mois de discussions sur le futur « système universel » de retraite avec le haut commissaire Jean-Paul Delevoye, syndicats et patronat reprennent le chemin de la négociation, cette fois-ci avec Édouard Philippe. Aux côtés du Premier ministre, M. Delevoye sera peut-être promu au rang de ministre, deux ans après sa nomination au poste de haut commissaire à la réforme des retraites.
Agnès Buzyn sera également présente, la ministre des Solidarités et de la Santé restant attachée à ses prérogatives : « C'est moi qui porte les retraites », rappelait-elle encore la semaine dernière. C'est pourtant bien M. Delevoye qui devrait conduire la « concertation citoyenne » voulue par Emmanuel Macron, et dont les détails seront présentés aux partenaires sociaux.
« Je tiens à un grand débat », a prévenu Emmanuel Macron, souhaitant que ce chantier « incarne le changement de méthode » initié après la crise des « gilets jaunes ».
Des couacs en série au sein de l’exécutif
Pour l'instant, c'est la durée de cet exercice qui semble faire débat au sommet du pouvoir. Vendredi, Gérald Darmanin a évoqué « un petit peu moins d'un an », avant que M. Philippe corrige son ministre des Comptes publics : le projet de loi « sera présenté au Parlement, comme je m'y suis engagé, dans les mois qui viennent ».
Un cafouillage qui rappelle celui sur l'âge de départ en retraite, qui avait agité l'exécutif au printemps. Le sujet n'est d'ailleurs toujours pas clos, puisque le chef de l'État a remis en cause la principale proposition du rapport de M. Delevoye.
Au lieu du fameux « âge du taux plein » à 64 ans, M. Macron a lui-même indiqué qu'il « préfér (ait) un accord sur la durée de cotisation ». Une volteface en forme d'« ouverture à la CFDT », a expliqué M. Darmanin, tandis que la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, a assuré que « l'idée de l'âge pivot » n'était « pas enterrée ».
Sur le qui-vive
Face à tant de contradictions, Laurent Berger demeure sur ses gardes. « Ce n'est pas un geste à notre égard, c'est une parole, ça reste une parole », a-t-il répliqué lundi.
Le leadeur de la centrale réformiste, seule organisation favorable à un « système universel », est surtout « inquiet » de la volonté du président de la République que ce régime « soit équilibré financièrement » quand il entrera en vigueur en 2025. « La CFDT est claire, il n'y a pas besoin d'élément de réforme financier », a mis en garde M. Berger, rappelant que la durée de cotisation doit déjà augmenter jusqu'à 43 ans d'ici 2035.
« Il faut s'en tenir à cela, il n'y a pas besoin d'aller au-delà », a-t-il insisté avant d'énumérer ses « conditions » pour un éventuel compromis : pension minimum à « 100 % du Smic », retraite progressive, prise en compte de la pénibilité, des carrières longues ou encore des « discriminations dont sont victimes les femmes ».
La CFDT seul syndicat à être aussi conciliant
Les autres syndicats ne seront pas aussi conciliants. Opposé au « principe d'un système unique par points », Yves Veyrier estime qu' « on peut améliorer les dispositions dans le cadre des régimes existants ». Le numéro un de Force ouvrière ne voit « aucune raison de défaire » le cadre actuel « qui garantit une retraite convenable ». Après avoir séché le dernier entretien avec M. Delevoye en mai, il ira bien à Matignon, tout en préparant une journée de mobilisation samedi 21 septembre.
Son homologue de la CGT, Philippe Martinez, tient le même discours: « Il y a besoin d'améliorer ce système, mais pas de tout changer », affirme-t-il, jugeant que « le système par points est injuste ».
« On va aller le redire au Premier ministre », mais « si c'est pour botter en touche ou noyer le poisson… On a des doutes », a-t-il ajouté, déjà tourné vers sa propre manifestation programmée le mardi 24.