12 septembre 2025 | Mise à jour le 13 septembre 2025
Fitch est la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure ? La France a perdu son AA- pour être rabaissé à un petit A+ pour cause « d’incertitudes budgétaires ». Le gouvernement démissionnaire « prend acte ». Le nouveau Premier ministre devra faire avec. Zoom sur le rôle des agences de notation. Un article paru dans la Vie Ouvrière-Ensemble d’avril 2024.
L’agence de notation Fitch a abaissé vendredi soir la note souveraine de la France, à A+, sanctionnant le pays pour son instabilité politique persistante et les incertitudes budgétaires qui contrarient l’assainissement de ses comptes publics très dégradés.
Ouvrant le bal des revues d’automne des agences de notation, Fitch dresse un constat sévère de la situation des finances publiques dans la deuxième économie de la zone euro, quatre jours après la chute du gouvernement Bayrou et la désignation d’un nouveau Premier ministre, le troisième en un an.
Un alibi pour justifier des coupes dans les dépenses publiques
Officiellement, ces entreprises privées (Fitch, Moody’s, Standard & Poors’) se chargent d'évaluer la solvabilité des émetteurs de dettes – dont les gouvernements.
Les agences de notation financière affectent donc le coût d'emprunt et la confiance des investisseurs… et peuvent aussi servir à justifier un tour de vis budgétaire dans les dépenses publiques. Leurs notes arrivent à un moment opportun, quand l'exécutif procédait, par voie de décret, à une coupe budgétaire de dix milliards en 2024. « Nous faisons un seul choix […] Il doit nous amener sous les 3 % de déficit public en 2027 et à un budget à l'équilibre en 2032. Réduire les seules dépenses de l'État à hauteur de dix milliards d'euros est une première étape […]. La deuxième pourrait être un projet de loi de finances rectificative à l'été, si nécessaire. La troisième, ce sera le projet de loi de finances de 2025, dans lequel nous devrons trouver au moins douze milliards d'euros d'économies », annonçait Bruno Le Maire, alors ministre de l'Économie, dans une tribune accordée au Monde, l’an dernier.
Des dés pipés
Un message auxdites agences, à qui la France présenterait ainsi des gages de bonne gestion budgétaire, affirment les porte-parole de l'exécutif. Le tour paraît joué pour convaincre l'opinion, mais en réalité les dés sont pipés, explique Thomas Porcher, économiste. « Pour justifier les dix milliards d'économies supplémentaires qui s'expliquent principalement par la baisse d'activité, il fallait trouver une justification et aller chercher des dépenses publiques qui étaient déjà budgétisées. L'argument est de dire : on est sous le radar des agences de notation, on va donc le faire. Mais, sans celles-ci, ils l'auraient quand même fait. Ce fut le cas des retraites, de la baisse des dotations des collectivités locales par François Hollande en 2013, du pro-gramme de 120 000 postes de fonction-naires en moins de Macron en 2017, des 25 milliards d'économies, de la baisse de dix milliards sur l'assurance-chômage. La casse du service public est dans l'ADN de cet exécutif. »
Un maillon du libéralisme
La note de la France a déjà été dégradée en 2013 : de AAA en 2012, elle était tombée à AA+. « On nous prédisait la catastrophe, il ne s'est rien passé », rappelle l'économiste. Ces agences sont tout compte fait un maillon du système ultralibéral, celui qui permet, entre autres, aux seuls groupes du CAC 40 de réaliser près de 140 milliards d'euros de bénéfices en 2023, et aux millionnaires d'atteindre un nombre record. Entre-temps, « le gouvernement sacrifie l'avenir avec ces coupes drastiques dans les dépenses publiques plutôt que de s'attaquer aux 200 milliards d'aides aux entreprises », dénonce Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT sur son compte X. Et il agite pour ce faire l'épouvantail de la finance internationale.
Aujourd’hui, la médiocre note « A+ » ne va pas inverser la tendance.