Fichiers de police : en attente d’un jugement sur le fond
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8 mai 1945. Voici 70 ans, l'Europe célèbre la fin de la Seconde Guerre mondiale, au lendemain de la capitulation de l'Allemagne nazie. L'acte de reddition a été signé le 7 à Reims, tandis que les combats se poursuivent dans l'océan Pacifique. Le Japon en effet capitule le 2 septembre 1945; sa population civile, elle, aura subi les explosions des bombes atomiques de Hiroshima et Nagasaki, les 6 et 9 août 1945. Mai 1945, c'est aussi la libération pour les survivants des camps de concentration et d'extermination nazis.
La progression des forces soviétiques vers l'Ouest – au prix de millions de morts en leur sein – avait permis la découverte et l'ouverture du centre de mise à mort de Maïdanek, dans la nuit du 22 au 23 juillet 1944. Puis celles de Treblinka. Le 27 janvier 1945, l'Armée rouge était parvenue au camp d'extermination d'Auschwitz, y découvrant ses chambres à gaz et ses crématoires. Seuls y survivaient encore quelques milliers de déportés. Les autres avaient été contraints peu avant par les SS de marcher vers la frontière du Reich (1). Une marche de la mort.
Mai 1945. Les troupes américaines ont progressé elles aussi. Le camp de Mathausen, ceux d'Amstetten, d'Ebensee… enfin, sont ouverts. Les derniers déportés libérés devront encore tenter de survivre avant de réapprendre à vivre. L'Europe mettra du temps à prendre conscience de l'ampleur du génocide des juifs d'Europe. Et du processus d'extermination par les nazis des Tsiganes, des homosexuels…. Du 20 novembre 1945 au 1er octobre 1946, le procès de Nuremberg intenté par les puissances alliées contre certains des principaux responsables du Troisième Reich définira les crimes de guerre, crimes contre l'Humanité, crimes de génocide, étape fondatrice d'une justice internationale encore à construire.
C'est donc enfin la victoire des alliés, et des résistances – intérieures et extérieures – notamment en France.
Au sein du mouvement syndical, les Accords du Perreux ont consacré le 17 avril 1943, dans la clandestinité, la réunification de la CGT-U (unitaires, proches des communistes, représentés par André Tollet et Henri Raynaud), et de la CGT (confédérés, représentés par Louis Saillant et Robert Bothereau). Ils décident l'unité dans la Résistance à l'occupation et à la collaboration de Vichy, comme la reconstitution d'une CGT unie à la Libération, à l'instar de ce qu'elle était en 1936, avec une représentation plus importante des ex-unitaires. Si certains syndicalistes ont activement collaboré – comme René Belin –, participé aux organisations corporatistes mises en place par Vichy, le syndicalisme en tant que tel sortira grandi de sa participation à la Résistance.
En 1941 a eu lieu la grande grève des mineurs du bassin du Nord-Pas-de-Calais, occupé notamment pour son charbon, ressource stratégique. D'autres actions, comme celles des cheminots ou des salariés télécommunications… s'avèrent essentielles. Plus tard s'imposeront des figures comme celles d'Henri Krasucki, jeune ajusteur, et responsable de la FTP-MOI, arrêté le 23 mars 1943 et torturé avant d'être déporté à Auschwitz. Il deviendra longtemps après directeur de La Vie Ouvrière, puis (de 1982 à 1992 ) secrétaire général de la CGT. À la libération, le syndicalisme devient une force incontournable, de plusieurs millions d'adhérents, qui pèse sur les orientations du pays, et singulièrement ses choix sociaux;
La Libération, ce sera aussi le début de la mise en œuvre du programme du Conseil national de la Résistance (qui se définit comme «les représentants des organisations de la Résistance, des centrales syndicales et des partis ou tendances politiques groupés au sein du CNR»).
Le «programme d'action de la Résistance», dès 1944, appelle à renforcer la résistance, armée ou non, et comporte un «plan d'action immédiate », dont « en accord avec les organisations syndicales résistantes, combattre pour la vie et la santé des Français pour une lutte quotidienne et incessante, par des pétitions, des manifestations et des grèves, afin d'obtenir l'augmentation des salaires et traitements, bloqués par Vichy et les Allemands, et des rations alimentaires et attributions de produits de première qualité, réduites par la réglementation de Vichy et les réquisitions de l'ennemi, de façon à rendre à la population un minimum de vital en matière d'alimentation, de chauffage et d'habillement». Il porte aussi une série de «mesures à appliquer dès la libération du territoire», tant politiques qu'économiques et sociales. Ce seront les « Jours heureux », en dépit des ruines et des difficultés économiques : généralisation d'une Sécurité sociale fondée sur la solidarité –notamment grâce au travail d'Ambroise Croizat-, nationalisations, retour à la liberté syndicale, loi sur les comités d'entreprise, lois sur la presse…
Cependant, de l'autre côté de la Méditerranée, le 8 mai 1945, l'armée française massacre des milliers d'Algériens, à Sétif et à Guelma. Comme l'écrit l'historien Mohammed Harbi (3) «Désignés par euphémisme sous l'appellation d' »événements » ou de « troubles du Nord constantinois », les massacres du 8 mai 1945 dans les régions de Sétif et de Guelma sont considérés rétrospectivement comme le début de la guerre algérienne d'indépendance. (…) À Sétif, la violence commence lorsque les policiers veulent se saisir du drapeau du PPA, devenu depuis le drapeau algérien, et des banderoles réclamant la libération de Messali Hadj et l'indépendance. Elle s'étend au monde rural, où l'on assiste à une levée en masse des tribus. À Guelma, les arrestations et l'action des milices déclenchent les événements, incitant à la vengeance contre les colons des environs».
Après les exactions massives de civils européens et de la police, la réouverture de charniers vise à empêcher toute enquête. «Quant à l'armée, son action a fait dire à un spécialiste, Jean-Charles Jauffret, que son intervention « se rapproche plus des opérations de guerre en Europe que des guerres coloniales traditionnelles ». Dans la région de Bougie, 15 000 femmes et enfants doivent s'agenouiller avant d'assister à une prise d'armes. Le bilan des « événements » prête d'autant plus à contestation que le gouvernement français a mis un terme à la commission d'enquête présidée par le général Tubert et accordé l'impunité aux tueurs. Si on connaît le chiffre des victimes européennes, celui des victimes algériennes recèle bien des zones d'ombre.» Ce sera le début d'un autre mouvement pour la liberté, celui des combattants de l'indépendance de l'Algérie et de la décolonisation.
Notes
1. Le Mémorial de la Shoah organise un cycle de manifestations autour de la libération des camps, notamment trois journées de témoignages pour donner la parole à celles et ceux qui ont vécu ces événements historiques. Voir également www.fondationshoah.org
2. Mohammed Harbi, auteur, avec Benjamin Stora, de « La Guerre d'Algérie, 1954-2004, la fin de l'amnésie », Robert Laffont, Paris, 2004 : «La guerre d'Algérie a commencé à Sétif».
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