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ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Parcoursup, super discriminant

11 septembre 2018 | Mise à jour le 12 décembre 2018
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En cette rentrée universitaire, le nouveau dispositif d'accès à l’enseignement supérieur, Parcoursup, continue d’inquiéter. Les syndicats d’étudiants, de salariés et d’avocats restent mobilisés.

Sélection à tous les étages, destruction de la démocratie, aggravation des inégalités, discrimination territoriale… Lors de sa mise en place, Parcoursup, la nouvelle plateforme d'accès à l'enseignement supérieur, a attisé les feux de la critique. Et l'incendie n'est pas près de s'éteindre dans la mesure où les dysfonctionnements de ce logiciel, qui avaient été anticipés par les « anti-Parcoursup », sont tous en train de se vérifier. Enseignants, étudiants, syndicats, monde associatif, tous ont, en vain, multiplié les alertes auprès d'un ministère resté sourd à leurs inquiétudes.

Invitée de la matinale de RTL lundi 20 août, la présidente de l'Unef, Lilâ Le Bas, n'a pas mâché ses mots pour dénoncer un « bilan très inquiétant ». Ce seul chiffre suffit à justifier ses craintes : à la fin août, plus de 60 000 jeunes n'avaient toujours pas de réponses positives pour leur inscription en fac. Rapporté à un total de 586 660 candidats qui, eux, ont obtenu « au moins une proposition d'admission », les 60 000 candidats restant sans aucune perspective pourraient paraître insignifiants. Mais, il se trouve que ces laissés-pour-compte répondent bizarrement aux critères discriminants dénoncés par les détracteurs de Parcoursup. En région parisienne, par exemple, les élèves de Seine–Saint-Denis, du Val-de-Marne et de Seine-et-Marne étaient victimes, dès le mois de mai et en forte proportion, de « ségrégation spatiale », avec des taux de refus et/ou de mise « en attente » situés, selon les lycées, autour ou au-delà de 60 %. Rien de tel à Paris où, sur décision du rectorat, des établissements très réputés comme Paris-Diderot n'offrent plus que 3 % d'inscriptions aux candidats non parisiens (contre 40 % de places offertes à des candidats de banlieue ou de province l'année dernière).

Primauté parisienne renforcée

Quoi qu'en dise la ministre de l'Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, qui n'a eu cesse de promettre que les établissements de banlieue, ou en milieu rural, ne seraient pas discriminés par la loi ORE (Orientation et réussite des étudiants), les effets collatéraux sont patents. Et parfois aberrants, comme le rapporte, embarrassé, ce ­responsable de cursus de l'université Paris-Diderot, Benoît Piro, dans les colonnes du Figaro : « Dès la quatorzième place, nous avons un élève parisien à 8 de moyenne générale alors que, malgré ses 17,5 de moyenne, un candidat du Val-de-Marne lui, est relégué “en attente” à la 1010e place. » Cherchez l'erreur.

Pour Sabrina Chattaoui, qui vit en Seine–Saint-Denis et étudie l'histoire-géographie à la Sorbonne, le bug de Parcoursup est plus qu'un simple dysfonctionnement informatique. Plutôt l'expression d'une orientation politique très axée sur la sélection géographique et le tri social. Donc volontairement discriminante et en totale contradiction avec le principe républicain d'une éducation nationale ouverte à tous. L'étudiante, qui n'était déjà pas satisfaite du précédent système APB, l'est encore moins de l'actuel qu'elle considère profondément injuste : « Macron a décidé de nous trier, et moi, je veux que les gens d'ici puissent accéder à ce qu'ils désirent en refusant l'assignation territoriale ou sociale imposée par Parcoursup et la loi ORE. »

C'est pourquoi Sabrina a fondé un collectif d'information et de lutte contre Parcoursup. « Dès les premiers résultats d'inscription sur la plateforme, on a constaté que les bacheliers du 93 voyaient davantage leurs vœux rejetés qu'à l'échelle nationale. » Et de citer l'exemple flagrant d'une classe technologique de Bondy où 100 % des élèves ont été recalés. Hébergé à l'union départementale CGT 93, ce collectif, ouvert à tous, accueille, renseigne, accompagne les exclus de Parcoursup, les lycéens en quête d'informations et les insatisfaits de leur affectation arbitraire.

De son côté, la CGT n'est pas en reste. Partie prenante de l'intersyndicale UNEF, SAF, FCPE, UNL, Snesup, FERC-CGT, SNPTES, elle a décidé de saisir le Défenseur des droits, Jacques Toubon, afin d'obtenir la transparence de la procédure Parcoursup. Réclamée depuis mai, cette demande est restée pour l'instant lettre morte.

Or, au regard des dysfonctionnements avérés qui confirment, à ce stade, l'existence bien réelle de discriminations très problématiques, les syndicats sont fondés à « exiger le respect des droits et libertés des lycéens contre les discriminations, directes ou indirectes, occasionnées par la loi ORE et Parcoursup dans l'accès à l'enseignement supérieur », indique sur son site la FERC-CGT.