10 octobre 2023 | Mise à jour le 10 octobre 2023
« Il y a le feu ». C'est en ces termes que la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet concluait le colloque organisé « contre les idées d'extrême droite, non au racisme et à l'antisémitisme », dans le patio de la centrale jeudi 5 octobre 2023.
Et de rappeler qu’il y a d’autant plus urgence que l’absence de prise en compte des questions environnementales exacerbe l’insécurité sociale et la violence des rapports de classe. Ce colloque fut aussi l'occasion d'inaugurer le parvis Henri Krasucki, ancien leader cégétiste, résistant juif des francs-tireurs et partisans-main-d'œuvre immigrée. Devant un parterre de 400-450 militants issus de territoires et de professions variés, la secrétaire générale de la CGT soulignait à quel point les idées du Front National rebaptisé Rassemblement national ont gagné du terrain, y compris dans des territoires, des professions qui jusqu'à présent résistaient plutôt bien (la Bretagne, les fonctionnaires…). En atteste les résultats du parti de Lepen aux élections, 88 députés à l'Assemblée nationale, 3 sénateurs étiquetés RN.
Un rempart fragile
Si le syndicalisme constitue encore un rempart contre les idées nauséabondes, celui-ci se fissure progressivement. Pour rappel, en 2022, selon un sondage sorti des urnes d'Harris Interactive, Marine Le Pen avait recueilli 22% des suffrages chez les sympathisants de la CGT, en hausse de 7 points par rapport à 2017. « L’imposture sociale véhiculée par les partis d’extrême droite se propage dans les entreprises, collectivités et services. Dans un monde où les repères idéologiques sont brouillés, le RN se pose en défenseur des catégories populaires. Ne soyons pas dupes de ce jeu malsain dont l’objectif est uniquement d’accéder au pouvoir », lançait Nathalie Bazire, secrétaire confédérale.
« Ne nous trompons pas. Si le Rassemblement national devait un jour accéder au pouvoir, la CGT serait en haut de la pile des opposants à briser ». Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT
Déjà, durant cette journée, plusieurs militants ont témoigné des menaces qu'ils subissaient de la part de la fachosphère.
Déconstruire les idées d’extrême droite
« Le syndicat doit se mettre au niveau de la lutte contre le racisme au travail, de la même manière qu'il le fait en matière de lutte pour l'égalité hommes-femmes. Mais nous ne pouvons pas nous limiter à un discours sur les valeurs prônées par l'extrême droite, nous devons aussi démontrer le danger que représente le Rassemblement national en matière de politique économique et sociale. Nous devons mettre toute notre énergie dans nos luttes, qui par définition rassemblent des travailleurs de toutes origines. Nous devons sans faillir soutenir les travailleurs sans-papiers à s'organiser pour acquérir de nouveaux droits », concluait Sophie Binet. Ces propos faisaient écho notamment à ceux de Mornia Labssi, inspectrice du travail, militante CGT et coordinatrice pour la défense des habitants des quartiers populaires, qui dénonçait « un racisme structurel dans le monde du travail. On accepte que les noirs et les arabes occupent les postes les plus pénibles. Il est grand temps que la CGT s'empare de ces inégalités de traitement qui gangrènent toute la société ». « La plupart des pays européens sont aussi touchés par cette montée des idées d'extrême droite. Le risque est grand de voir l'extrême droite encore progresser lors des élections européennes de juin 2024 », s'inquiétait Nathalie Bazire. En a témoigné Monica Ceremigna, conseillère à l'espace Europe et International, membre du syndicat italien CGIL. Pour mémoire, ce syndicat a vu ses locaux saccagés en octobre dernier par des manifestants chauffés par le parti néofasciste Forza Nuova, alors que dans le même temps, la postfasciste Giorgia Meloni devenait présidente du conseil des ministres.