Où est passée la démocratie sociale ?
De contre-réforme en contre-réforme, le pouvoir d’agir des syndicats a été affaibli et, par ricochet, les droits des salariés s’en trouvent amenuisés. La négociation... Lire la suite
« CSE : quels enjeux ? Quelle stratégie syndicale adopter ? » Ces questionnements étaient au cœur de la matinée de formation organisée par l'Ugict-CGT, le 11 juillet, à Montreuil, en direction de plusieurs dizaines d'ingénieurs, cadres et techniciens dont une moitié l'ont suivie sur place et l'autre moitié aux quatre coins de la France grâce à un dispositif de vidéoconférence.
« Comme tous les salariés, les cadres doivent être vigilants sur la mise en place des CSE, note Michelle Kauffer, membre du secrétariat de l'Ugict CGT. Les risques psychosociaux qui les impactent particulièrement et la question du droit d'alerte et d'initiative sont parmi les questions prioritaires pour ces catégories de personnel. » Plusieurs aspects de cette nouvelle instance représentative du personnel sont abordés comme la base de données économique et sociale (BDES). « La version prévue par la nouvelle législation est clairement low cost alors que c'est un des domaines essentiels pour nos catégories », note Philippe Masson, du bureau de l'Ugict-CGT. Pour lui, si on veut que les CSE et les délégués syndicaux gardent une information efficace sur l'état de l'entreprise « il faut que cette BDES soit non seulement complète, mais actualisée régulièrement. Or, les dispositions d'ordre public sont squelettiques sur ce sujet. Elles prévoient uniquement que la base de données soit disponible et actualisée sans autre précision. Elle ne sera donc rafraîchie selon les consultations ponctuelles que si un accord le prévoit ».
« Toute cette réflexion nous interpelle sur notre démarche syndicale et notre stratégie, ajoute Michelle Kauffer. Sachant qu'on a quand même beaucoup privilégié, ces dernières années, l'aspect représentatif et l'institutionnel. On ne peut pas prendre les choses sous l'angle des élections professionnelles, mais bien par le biais d'une démarche syndicale qui nous permettrait d'inverser le processus. C'est en réinstaurant un rapport de force, par la syndicalisation et le redéploiement du travail revendicatif et de nos forces que ça passe. » Sauf que sur le terrain, les élus peinent à intéresser les salariés à la question des CSE qui leur paraît bien lointaine. Leur parler des jours fériés qu'ils pourraient perdre ? Des acquis concrets dont ils bénéficient et qu'ils pourraient perdre ? Les enjeux sont pourtant importants.
« Notre direction aborde la mise en place des CSE dans une logique de réduction de la représentativité des salariés, explique Patrick Mottier, secrétaire du CE de la SSII One Point, qui compte 98 % de cadres. Elle veut par exemple réduire les trois CE en un seul CE national alors qu'il y a des établissements importants en province. […] Cette formation m'a servi à confirmer que la négociation de l'accord pour le dialogue social et la mise en place du CSE revêt des pièges. Il va falloir travailler pour se préparer d'autant que chez nous, les négociations commencent en juillet. Tout s'enchaîne comme si la direction voulait faire démarrer les négociations et les faire aboutir le plus vite possible, en catimini, durant les congés, quand le personnel est peu présent. » Le but ? « Que tout soit fixé à la rentrée alors que les élections ne sont prévues qu'en mars prochain. » C'est bien cette tonalité de menace à craindre qui se dégage parmi les élus CGT participants.
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