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TRAVAILLEURS SANS PAPIERS

Racisme et exploitation chez Pinault-Gapaix : les sans-papiers des chantiers amiantés bientôt régularisés

4 avril 2019 | Mise à jour le 10 avril 2019
Par | Photo(s) : Bernard Rondeau / Photosociale
Racisme et exploitation chez Pinault-Gapaix : les sans-papiers des chantiers amiantés bientôt régularisés

15 travailleurs sans papiers ont occupé le siège de l'entreprise de désamiantage Pinault-Gapaix à Bobigby, pour laquelle ils ont travaillé comme intérimaires pendant plusieurs années.

La NVO révélait fin mars l'exploitation et le racisme dont étaient victime quinze travailleurs sans papiers exposés à l’amiante pendant des années par leur ex-employeur, le démolisseur Pinault-Gapaix (Bobigny). À la suite de leur mobilisation et des deux rassemblements devant la préfecture de Bobigny organisés par la CGT, ils vont être régularisés temporairement.

Le sésame du titre de séjour d’un an renouvelable leur sera être remis vendredi 5 avril par la préfecture de Seine-Saint-Denis. Une reconnaissance minimale de la part des services de l'État, mais décisive pour ces quinze travailleurs illégalement exploités pendant des années comme « chair à chantier » dans les poussières et les fibres d’amiante des travaux de démolition. Depuis une dizaine d’années, pour certains d’entre eux, et sans avoir jamais bénéficié du moindre suivi médical ni contrôle post-professionnel.

Mise en danger d’autrui, traite des être humains et conditions de travail indignes

Dénoncée auprès de la CGT de Seine-Saint-Denis en mars 2018, après leur brusque licenciement par l’agence d’intérim RSI qui les recrutait pour le compte du donneur d’ordres, Pinault-Gapaix, leur situation d’exploitation a fait l’objet d’une enquête approfondie menée par l’inspection du travail. En rendant ses conclusions, le 28 février 2019, l’inspecteur du travail a saisi le procureur de la République pour des infractions pénales, à savoir : mise en danger de la vie d’autrui, traite des êtres humains, soumission de personnes vulnérables et dépendantes à des conditions de travail indignes. À la suite de quoi le Parquet a ouvert une enquête judiciaire dans laquelle les quinze ex-employés de Pinault-Gapaix sont susceptibles d’être entendus en qualité de témoins et de lanceurs d’alerte sur leurs conditions d’exploitation.

Obtenir la reconnaissance de l’exploitation passée

Informés par courrier des conclusions de l’enquête de l’inspecteur du travail, les quinze, soutenus par la CGT, ont alors décidé de se rappeler au bon souvenir de leur ex-employeur, monsieur Bruno Gapaix. Le 18 mars au matin, accompagnés de toutes les organisations de la CGT concernées par leur dossier (construction, intérim, unions départementale et locale), ils ont envahi le siège de l’entreprise de Bobigny dans le but d’obtenir un dialogue social en vue d’une reconnaissance des conditions de leur exploitation passée et bien sûr, des dédommagements.

Mal leur en a pris. Alerté par son épouse de cette visite impromptue, le patron a déboulé en trombe sur sa moto dans la cour de l’entreprise. Manifestement emporté par la fureur, l’ex-employeur s’est d’abord posé en victime: pour la fuite de son chien Kiki (retrouvé quelques heures après), puis, en refusant de s’entretenir avec l’un de ses ex-employés au motif qu’il se sentait menacé. Enfin, en s’abritant derrière les conseils de son avocat, joint par téléphone, qui lui a recommandé de ne « surtout pas dialoguer avec la CGT ».

Face à cette impasse et craignant des représailles y compris physiques au vu des injures racistes et haineuses proférées par certains employés de Pinault-Gapaix durant l’occupation du local, les quinze ont alors renoncé à leur projet initial d’occupation de l’entreprise et activé leur plan B : mettre les services de l'État face à leurs responsabilités.

La préfecture assume la protection des témoins

Invitée par la CGT à déclencher une procédure de régularisation expresse afin de protéger ces travailleurs en situation irrégulière, appelés à témoigner dans le cadre de l’enquête judiciaire, la préfecture de Bobigny a décidé de donner suite à cette demande. Et d’accorder un titre de séjour d’un an renouvelable aux quinze victimes. En cas de victoire en justice, les quinze Maliens et Sénégalais pourront par la suite prétendre à la délivrance d’une carte de résident.

DOCUMENT NVO – Des travailleurs sans-papiers, exploités dans le désamiantage, subissent les insultes racistes de leur employeur