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DISCRIMINATION SYNDICALE

Répression antisyndicale à La Poste

2 novembre 2014 | Mise à jour le 18 avril 2017
Par
Répression antisyndicale à La Poste

Menacé de licenciement « pour prises de parole récurrentes et illégales », le postier et leader syndical niçois Alexandre Latruffe a finalement été mis à pied. 
Cette sanction disciplinaire, qui a pris effet le 29 septembre dernier, s'inscrit dans un climat de répression antisyndicale exacerbé au sein de l'entreprise.

nvo : Comment La Poste justifie-t-elle votre mise à pied ?

Alexandre Latruffe* : J'ai été convoqué le 11 août dernier à un entretien préalable pouvant aller jusqu'au licenciement, au motif de « prises de parole récurrentes et illégales ». Je suis ensuite passé en conseil de discipline, le 29 août, conseil à l'issue duquel m'a été notifiée ma mise à pied d'un mois.

Il m'était notamment reproché d'avoir perturbé le cours d'une réunion… à laquelle je n'ai jamais assisté. D'avoir refusé de sortir des catalogues… alors que j'étais en détachement à la date des faits présumés. La Poste avait même envisagé un temps de me poursuivre pour séquestration, au motif que j'avais envahi, avec d'autres collègues, le bureau du chef d'établissement, pendant 15 minutes, en juin dernier ! Il faut savoir que ce jour-là, nous réclamions simplement le droit d'être reçus par la direction, afin de dénoncer un projet d'enquête interne mettant injustement en cause le secrétaire du CHSTC, lui-même militant à la CGT.

 

Vous n'êtes donc pas le seul militant CGT dans le collimateur ?
Ma mise à pied est, au contraire, représentative d'un climat de répression syndicale généralisée. Depuis le début de l'année, Alexandre Pignon, secrétaire départemental à la communication de la CGT 06 est passé en conseil de discipline, puis il y a eu ce projet d'enquête interne contre le secrétaire du CHSTC du bureau de Nice Thiers et ma mise à pied. On notera que les faits reprochés à Alexandre Pignon, à savoir l'envahissement du bureau de la direction le 17 octobre 2013, se sont déroulés dans le contexte d'une mobilisation collective, réunissant 150 postiers !

Alors qu'il se contentait d'informer ses collègues facteurs dans le cadre de son mandat syndical, Michel Lannez, secrétaire départemental des postaux de Paris, est également passé en conseil de discipline le 1er octobre pour… « prise de parole illégale ». Quel message nous adresse La Poste, en sanctionnant les militants syndicaux à chaque fois qu'ils jouent leur rôle, qui consiste justement à informer, à mobiliser et à défendre la cause des salariés ? Difficile de ne pas y voir une forme de chantage.

Quels sont les enjeux liés à cette répression syndicale ?

La poste cherche à nous faire taire alors qu'elle est engagée dans un processus de restructuration que, nous, militants syndicaux dénonçons à haute voix parce qu'il est contraire à sa mission fondatrice de service public. Ce processus se traduit par des réorganisations permanentes de l'activité courrier, tous les 18 mois, dans l'ensemble des bureaux. Chaque réorganisation entraîne la réduction du nombre de tournées et donc du nombre d'emplois.

Grâce à la mobilisation du personnel, mon bureau de Nice Thiers en a perdu 9 au lieu de 22 comme initialement prévu par le projet de La Poste. Bien sûr, on parle peu de licenciement, on joue surtout sur les départs anticipés, les mobilités, le reclassement, mais les partants ne sont jamais remplacés. Au niveau national, 100 000 postes ont ainsi été détruits depuis 2005.

ON VEUT 
TRANSFORMER LES POSTIERS 
EN PRESTATAIRES DE SERVICE
SOUMIS À DES OBJECTIFS 
DE RENTABILITÉ

Notre charge de travail a donc explosé, d'autant plus qu'on nous demande désormais d'installer la TNT aux domiciles des particuliers, de contrôler les compteurs butagaz, de livrer des courses dans le cadre du programme « bonjour mamie, bonjour papi ». Car tel est l'objectif inavoué du plan La Poste 2020, dévoilé en janvier : dégraisser le mammouth et transformer les postiers en prestataires de service soumis à des objectifs de rentabilité.

 

Les mobilisations vont donc continuer ?

Bien sûr, parce qu'elles payent ! Les deux journées de grève des postiers du bureau de Nice Thiers, les 11 et 29 août, ont dissuadé La Poste de me licencier, comme elle en avait certainement l'intention. « Quand un militant CGT est touché, c'est toute la CGT qui est touchée » n'est pas qu'un slogan. Toute la CGT s'est mobilisée derrière moi. Depuis ma section locale à la fédération nationale FAPT CGT en passant par les 54 syndicats départementaux qui ont envoyé une motion de soutien à mon sujet. Cette solidarité fait chaud au cœur et rend plus fort. Je vais maintenant aller aux conseils des prud'hommes contester ma mise à pied.
*Alexandre Latruffe est membre de la commission exécutive de la FAPT CGT