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Automobile

Du plan de compétitivité au plan industriel

30 juin 2014 | Mise à jour le 25 avril 2017
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Du plan de compétitivité au plan industriel

SAM Technologies, un équipementier automobile qui emploie près de 500 salariés à Viviez (Aveyron), a connu quatre jours de grève en mai dernier. Une action qui a permis à la CGT d'imposer l'annulation du plan de compétitivité, une augmentation des salaires et la mise en place d'un plan d'investissement.

C'est à un retournement total de situation qu'a abouti la lutte qui s'est déroulée fin mai chez SAM Technologies. En effet, depuis dix-huit mois, la direction de l'entreprise s'acharnait à mettre en place un accord de compétitivité vécu comme une véritable machine de guerre contre les salariés. « Ce plan prévoyait l'allongement du temps de travail à salaire égal, un recul des acquis sociaux et mettait une pression permanente sur les salariés avec un chantage à l'emploi », rapporte Thierry Bruni, secrétaire CGT du comité d'entreprise.

La direction conditionnait l'obtention d'un gros contrat avec Daimler à la signature dudit accord de compétitivité. L'argument ne convainc guère cependant au vu de la consultation organisée en avril 2013 : 80 % des personnels se prononcent contre la signature de cet accord. Un rejet qui devait être réitéré par un vote à mains levées lors d'une AG du personnel en février dernier. « Nous leur avons dit qu'avant d'allonger le temps de travail, il fallait commencer par nous donner les moyens de travailler correctement. Depuis quelques années, le manque d'entretien et d'investissement dans les machines a eu pour conséquence une multiplication des pannes et une augmentation des rebuts », témoigne Gislaine Gistau, secrétaire du syndicat de la SAM. Parallèlement, le non-remplacement des personnels qualifiés partant en retraite confortait une désorganisation généralisée : « Nous avions un sentiment d'abandon depuis le départ de notre responsable de production », rapporte Sébastien Lallier, pilote d'îlot sur une presse à mouler de la fonderie.

Même constat ou presque du côté de l'usinage : « Notre chef d'équipe a été licencié sans être remplacé. L'organisation en pâtit. Les pannes machines sont fréquentes. Entre les régleurs et les manutentionnaires, tout cela génère beaucoup de temps d'attente », rapporte une opératrice. De l'avis des salariés, la volonté de la direction de rajouter du travail les samedis et dimanches ne visait ainsi qu'à compenser un fonctionnement qui s'était dégradé. « Aujourd'hui, nous produisons en sept jours ce qui nécessitait seulement cinq jours auparavant », résume Gislaine.

 

Une dégradation progressive

SAM Technologies fait partie du groupe Arche, une entreprise française qui compte aujourd'hui environ 1 100 salariés. Fabricant de pièces automobile (carters huile, boîtes support moteur…), son principal client est Renault (63 %), mais il y a aussi PSA, Valeo, Bosch.

Entre 1998 et 2008, Arche connaît un climat social satisfaisant avec des évolutions intéressantes en termes d'acquis sociaux perçues comme un juste retour social des investissements. Les salaires augmentent et les conditions de travail s'améliorent. Deux événements successifs vont rompre cet équilibre.

En 2007, Arche rachète Manzoni Bouchot Fonderie, un autre groupe constitué de quatre unités de production. La taille de MBF est équivalente à celle de la SAM, qui double donc en taille et en emplois (pour atteindre quelque 2 200 salariés). Un morceau peut-être un peu trop gros à avaler… Tandis que cette croissance génère une réorganisation qui mobilise énormément de ressources internes, voici qu'arrive l'année suivante une « crise de l'automobile ». C'est aussi le moment où les donneurs d'ordres font pression sur les prix afin de reporter les conséquences de l'effondrement du marché sur leurs sous-traitants. Le groupe se sépare d'une des usines en 2011 dans des conditions extrêmement défavorables, ce qui génère des pertes financières.

Chez SAM, à Viviez, les salariés constatent que les dépenses courantes d'entretien des machines et investissements sont quasiment réduits à néant depuis 2009. Le climat social se tend aussi peu à peu tandis que les notes de service sur les orientations de l'entreprise se substituent progressivement aux échanges avec les institutions représentatives du personnel.

LA CGT A MULTIPLIÉ CONTACTS
AVEC LES SALARIÉS,
CONSULTATIONS ET AG À
CHAQUE ÉTAPE

 

Les tensions s'exacerbent

Avec le plan de compétitivité présenté, le processus s'accélère début 2013. Il serait le seul moyen d'obtenir un gros contrat avec Daimler et d'éviter les externalisations de productions. La mise en place d'une nouvelle chaîne hiérarchique dans le groupe : les directeurs des six unités de production (cinq en France et une en Espagne) sont mis sous la responsabilité d'un directeur des opérations spéciales.

Et c'est à ce moment aussi qu'est proposé le nouveau. Par chance, la CGT, elle, ne désarme pas. Plus les remises en cause d'acquis s'accélèrent, plus elle multiplie les contacts avec les salariés, organisant systématiquement des informations et des consultations et AG à chaque événement important, notamment à l'occasion des négociations annuelles obligatoires (NAO). Une méthode qui, en tout cas, porte ses fruits en matière de renforcement et de résultats électoraux.

 

Le clash de mai

« Alors que nous venions de remporter les élections professionnelles avec 96 % de voix pour la CGT, nous avons appris qu'une réunion s'était tenue en préfecture avec la direction de la SAM, des élus locaux et les services de l'État », rapporte Thierry Bruni. Manifestement, la préfecture avait oublié d'inviter les premiers concernés. De quoi distiller de fortes inquiétudes, d'autant que le PDG, Patrick Bellity, déclarait au journal Centre Presse « ni infirmer, ni confirmer » un projet de déménagement de l'entreprise. Dans la foulée, la direction laissait filtrer des informations sur un possible transfert de production en Turquie et en Corée du Sud.

À ce contexte sont venues s'ajouter deux provocations. La première consistait à remettre en cause le détachement syndical du secrétaire général de l'UD CGT et la seconde à refuser l'ouverture des NAO.

La grève est votée et, du 20 au 24 mai, c'est le blocage de l'usine avec la participation de 90 % du personnel. Face à une telle détermination, un médiateur est nommé. Résultat : « Nous avons obtenu le remplacement du plan de compétitivité par un plan d'investissement », s'enthousiasme Thierry. Entre­tien et investissement dans l'outil de travail, nouvelle organisation des ateliers de production, augmentation des salaires (+1,5 %), c'est un succès sur toute la ligne.

Une réunion est aussi décrochée au ministère du Redres­sement productif avec les clients que sont Renault, Daimler et Bosch. D'ores est déjà sont acquis la garantie des emplois pendant trois ans, l'engagement de ne pas délocaliser des productions ainsi que des options sur de nouveaux marchés. Cerise sur le gâteau de la lutte, le détachement du secrétaire de l'UD a, bien sûr, été renouvelé.

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DEUX QUESTIONS À….

David Gistau,
secrétaire général de l'UD CGT Aveyron

 

« L'ÉTAT STRATÈGE DOIT JOUER SON RÔLE »

Qu'en est-il du plan industriel chez SAM Technologies ?

Prochainement va se tenir une table ronde entre le ministère du Redressement productif, les constructeurs, notamment Renault, et les représentants des salariés de SAM Technologies. Le gouvernement dit vouloir favoriser des champions de l'industrie française, or, le groupe Arche répond à ces critères, car nous sommes une entreprise industrielle à actionnariat 100 % français. Arche est donc éligible à des prêts de la Banque publique industrielle, lesquels seraient affectés à l'investissement dans l'outil de travail et l'automatisation. Cela permettra à la fois d'être plus compétitif et d'améliorer les conditions de travail. C'est ce à quoi doit répondre une politique industrielle créatrice d'emplois dans les territoires.

 

Réclamer des aides pour son entreprise, est-ce pertinent quand on voit l'utilisation du CICE ?

Lorsque, à l'époque, nous avons bénéficié de la prime d'aménagement du territoire, nous avons dit banco, mais à condition qu'il y ait un juste retour social. Nous y avons veillé et il y a eu des créations d'emplois, des augmentations de salaires et des investissements. Cela a eu un impact sur l'entreprise et le territoire : maintien et développement du service public, l'hôpital, la poste, le collège… L'Aveyron est assez atypique, parce qu'il y a beaucoup d'industriels locaux. C'est sans doute en raison de cet ancrage territorial qu'il n'y a pas de financiarisation et que l'Aveyron est relativement épargné par le chômage. La CGT réclame que les aides soient conditionnées à l'emploi, à l'investissement et aux rémunérations. Chez SAM Technologies, nous avons besoin de 10 millions d'euros pour automatiser un certain nombre d'îlots et nous permettre de capter de nouveaux marchés. L'État stratège doit jouer son rôle.

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