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UBÉRISATION

Le mouvement des coursiers à vélo s’étend et se structure

2 septembre 2019 | Mise à jour le 3 septembre 2019
Par | Photo(s) : Benjamin Polge / Hans Lucas/AFP
Le mouvement des coursiers à vélo s’étend et se structure

Dijon, Mulhouse, Strasbourg, Paris ou encore Bordeaux… Les coursiers des plateformes de livraison de repas à domicile Deliveroo, Uber Eats et autres Stuart étaient une nouvelle fois en grève au soir du dimanche 1er septembre.

Le dernier épisode, au soir du dimanche 1er septembre, du mouvement de protestation des coursiers à vélo contre la décision prise de manière unilatérale le 29 juillet dernier par Deliveroo d'abaisser la rémunération des courses « petites distances », de 4,50 à 2,50 euros, témoigne d'une chose : la colère s'étend, touche de plus en plus de ces travailleurs.

« Évidemment que l'on ne s'y retrouve pas », ironise Arthur Hay, coursier indépendant à Bordeaux, et secrétaire du Syndicat CGT des coursiers à vélo de la Gironde, qui remarque que « l'augmentation des courses les plus longues », annoncée par Deliveroo pour faire passer la pilule, ne s'est toujours pas vraiment concrétisée.

Dur à avaler lorsqu'on est payé à la course, à la tâche. « Si l'on veut que ce genre de choses n'arrive plus, il faut que l'on puisse instaurer des organes de représentation des coursiers pour construire nos conditions de travail et négocier réellement de manière constructive, et obligatoire, avec les plateformes.  Et ce, pour ne plus se faire imposer tous les deux ou trois mois de nouvelles conditions », affirme Arthur Hay.

Les coursiers revendiquent des organes de représentation auprès des plateformes

S'unir pour mieux se défendre, c'est justement ce que vient de faire un groupe de livreurs de Dijon qui, depuis juin dernier, a rejoint la CGT pour se regrouper au sein du Sccud, le Syndicat CGT des coursiers unis dijonnais. « Sur le papier, nous sommes coursiers “partenaires” », explique Cyril Jeanpierre, l'un des fondateurs du Sccud et coursier pour Uber Eats à Dijon. Dans les faits, les plateformes soumettent le coursier à des liens de subordination qu'elles cachent de moins en moins, tout en faisant en sorte de rester à la limite de la légalité. »

Une « limite de la légalité » qui se traduit concrètement par une dépendance totale à l'algorithme mis en place par la plateforme de livraisons gérant les courses ; donc les rémunérations, attribuées à chacun des autoentrepreneurs que sont les coursiers. Tout en leur laissant le soin de payer eux-mêmes les cotisations sociales, de Sécurité sociale ou de retraite, afférentes à leur activité.

« Nous revendiquons, bien entendu, une meilleure rémunération et de meilleures conditions de travail », explique Cyril.  Mais aussi une couverture d'assurance spécifique aux plateformes, notamment concernant les risques que nous prenons et la protection de nos outils de travail, vélo et portable. »

La vraie question, ce n'est pas tant l'ubérisation que la précarité des conditions de travail qui s'accroît de manière générale. Ludovic Rioux, cofondateur des Coursiers de Lyon en lutte

Pas inutile quand on sait que cet investissement peut atteindre 2 000 euros. « La vraie question, ce n'est pas tant l'ubérisation que la précarité des conditions de travail qui s'accroît de manière générale », renchérit Ludovic Rioux, l'un des initiateurs de Coursiers de Lyon en lutte, syndicat crée au sein du Comité national CGT des travailleurs privés d'emploi et précaires de Lyon.

« Cette attaque sur nos rémunérations arrive en même temps que toutes celles contre les cotisations sociales. La part patronale socialisée du salaire brut, versée avec les cotisations, est en train de disparaître. Cette question concerne tout le monde, tous les syndicats. »Bien plus qu'une « révolution numérique, c'est avant tout une révolution de l'exploitation », constate Arthur Hay.