Fichiers de police : en attente d’un jugement sur le fond
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On a beau nous marteler que les Français attendent avant tout des réponses fortes à l'insécurité et qu'un silence assourdissant semble accompagner l'état d'urgence mis en place par le gouvernement, il n'empêche que des voix s'élèvent pour défendre les libertés menacées.
Ainsi, l'appel des 333 pour lever l'état d'urgence, rassemblant intellectuels, élus ou syndicalistes, lancé le 3 décembre contre « un renforcement considérable du caractère autoritaire de la Ve République », rassemble quelque 10 000 signataires aujourd'hui. Un meeting d'unité est prévu le samedi 23 janvier à 14 h 30 à l'espace Charenton1.
Le lendemain, à partir de 14 heures, un collectif d'artistes de la région parisienne, à l'origine d'un appel pour une « Veille artistique et citoyenne », organise une première réunion publique au 6B à Saint-Denis2. Comme l'explique Chloé Lavalette, « il s'agit d'organiser chaque mois dans un lieu différent, théâtre ou mairie, une réunion avec des gens de tous horizons pour discuter d'une lutte politique à réinventer. Des petits groupes sont conviés à plancher sur une performance artistique, l'élaboration d'une pancarte ou d'un projet de loi ».
Parce que, comme le souligne leur appel : « Il est temps de constituer un espace de confrontation citoyenne, où, dans le trouble et la richesse de nos identités, nous pourrons nous interroger sur notre champ d'action ». Avec cette même idée forte qui traverse ces collectifs : que les citoyens se réapproprient le débat politique.
« Nos organisations exerceront une vigilance permanente afin que nos droits et libertés soient préservés et que nul ne soit victime de discrimination. » Pour s'opposer à l'entrée dans la Constitution de l'état d'urgence comme à la déchéance de la nationalité, un appel unitaire « Nous ne cèderons pas ! » a été lancé par une centaine d'associations et de syndicats, dont la Ligue des droits de l'homme, Attac, le MRAP ou la CGT. Un appel, suivi d'une pétition, signée à ce jour par quelque 35 000 personnes. Une manifestation est prévue samedi 30 janvier dans toute la France et à Paris, place de la République, à 14 h 30.
« À la veille de la réforme constitutionnelle, il est important de nous rassembler et de nous faire entendre, explique Céline Verzeletti, de la CGT. Même chose dans les entreprises, il faut libérer la parole. Dans ce climat de peur et de suspicion, beaucoup craignent de témoigner et font profil bas ». Et de citer le cas d'un salarié de la RATP, licencié parce soupçonné d'extrémisme, qui a porté plainte au commissariat et s'est vu perquisitionné dès le lendemain. « Plus on aura des remontées sur ces dérives, plus on sera à même de les combattre », martèle Céline3.
Autre riposte à ne pas perdre de vue, celle de créer un conseil d'urgence citoyenne. Les initiateurs parmi lesquels l'historienne Sophie Wahnich, l'avocat Jérôme Karsenti, Séverine Tessier, créatrice de l'association anticorruption, Anticor ou Paul Alliès, de la Convention pour la 6e République, rappellent que « L'État de droit n'est pas soluble dans l'urgence policière ».
L'idée est évidemment de combattre le déploiement de l'état d'urgence comme le projet de déchéance de la nationalité, mais aussi de « démocratiser nos institutions en mettant le citoyen au cœur de la prise de décision politique ». Pour se faire, constituer des comités locaux, organiser des débats, élaborer des projets de loi, consigner des cahiers de vigilance et de propositions. Déjà des conseils se mettent en place à Lyon, Lille, Strasbourg, Nantes ou en région Paca.
Ainsi à Carpentras, Adèle Côte qui anime un café citoyen depuis trois ans, a réuni une quinzaine de personnes le 14 janvier pour créer un conseil. « Je fais la révolution », déclare-t-elle, en rappelant les textes fondateurs de notre République. Date est prise le 3 février, pour initier dans chaque conseil une « grève citoyenne », sans que la forme qu'elle prendra soit encore vraiment définie.
Difficile de savoir sur quoi déboucheront ces conseils d'urgence citoyenne, mais la volonté est là de recréer une dynamique de réappropriation de la vie politique. Et c'est déjà beaucoup.
(1) Espace Charenton, 327, rue de Charenton, 75012 Paris. Voir « Pour la levée de l'état d'urgence »
(2) Dimanche 24 janvier à 14 heures au 6B, 6-10 Quai de Seine, 93200 Saint-Denis. Voir www.facebook.com/events/558096097698914/
Contact : veilleartistiqueetcitoyenne@gmail.com
(3) La CGT a mis en place un dispositif d'alerte contre les dérives de l'état d'urgence : dlaj@cgt.fr
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