Le Medef en réclame toujours plus
Le Medef a tenu fin août son université d’été rebaptisée « Rencontre des entrepreneurs de France » sur le thème : « quel capitalisme demain ? ». Le patronat, satisfait... Lire la suite
Rebaptisé rencontres des entrepreneurs de France (Ref), le rituel réunit un aréopage de patrons, de gouvernants (Bruno Lemaire, Muriel Pénicaud, Agnès Buzyn, Nicolas Sarkozy) et même des personnalités de gauche ou de la société civile (Cécile Duflot, directrice générale d'Oxfam France, la Gilet Jaune Jacline Mouraud, le chef indien amazonien Almir Narayamoga Surui, l'urgentiste Patrick Pelloux) pour se donner un air d'ouverture.
Cette année, le patronat se penche sur l'avenir du capitalisme et les enjeux de société, avec un programme aux accents punk : « no(s) futur(s), climat, inégalités, conflits… quel capitalisme demain ? » Les inégalités, parlons-en ! « La distribution de dividendes a encore explosé au second semestre 2019 ; les patrons du Cac 40 ont touché en moyenne 5 millions d'euros en 2017, soit l'équivalent de 280 Smic », dénonce Thierry Dumez, secrétaire de l'Urif CGT, juché sur une tribune improvisée avec des palettes.
Les politiques sociale, fiscale menées par le président Emmanuel Macron accentuent le fossé entre riches et pauvres et fracturent un peu plus les protections sociales. « Emmanuel Macron a entamé son quinquennat avec la suppression de l'impôt sur la fortune, aujourd'hui Bernard Arnault est devenu la deuxième fortune mondiale ! Le symbole est extrêmement choquant », martèle Benoît Martin, de l'UD CGT de Paris, qui se félicite de la démarche unitaire du rassemblement.
Parmi les manifestants, plusieurs vivent au quotidien les inégalités de traitement, les entorses au droit du travail. Ces figures du nouveau prolétariat se battent bec et ongles pour faire valoir leur dignité. La présence de travailleurs sans-papiers employés par Chronopost est remarquée. Depuis le 11 juin 2019, ils campent devant l'agence d'Alfortville pour demander leur régularisation. Mama Ndiaye et Olga Mansang Muhong, elles, sont femmes de chambre et militantes CGT à l'hôtel IBIS de Clichy Batignolles.
Elles font partie des employées du sous-traitant STN en grève depuis mi-juillet 2019. Ces deux femmes puissantes revendiquent notamment le paiement des heures supplémentaires, la baisse des cadences, la reconnaissance des qualifications, leur intégration au sein du donneur d'ordres Accor. « Les femmes de chambre font en moyenne 3,5 chambres par heure, pour un salaire variable entre 900 et 1100 euros. Un abattement sur nos salaires nous pénalise pour nos retraites », explique Mama Ndiaye.
Dans un genre différent, Jérôme Pimot, figure des coursiers à vélo, coordinateur du CLAP, compare le sort des livreurs à celui des chômeurs qui attendaient au bon vouloir d'un employeur place de la grève. « Aujourd'hui, les coursiers se rendent place de la République et attendent qu'un algorithme leur donne du travail. Demain, les plateformes de mise en relation peuvent ubériser des pans entiers du travail, et pisser sur le droit du travail ».
Au-delà de sa coquetterie rebelle, le Medef enjoint surtout le gouvernement à maintenir le cap en matière de réduction des dépenses publiques et d'exonérations de cotisations sociales. À l'hôpital de Pontoise, Christine Appiani, secrétaire adjointe de l'USD CGT du Val-d'Oise note que « l'hôpital a perdu 200 lits en médecine et en chirurgie en deux ans. Sur 3000 employés, 500 travaillent en CDD. Les gouvernements successifs ont marchandisé la santé. La novlangue managériale s'impose, les praticiens deviennent des producteurs de soin, les patients, des clients. L'idéal de la Sécurité sociale selon lequel “chacun cotise selon ses moyens, et reçoit selon ses besoins”, se meurt. Il faut le répéter : la Sécurité sociale, ce bien commun, ne souffre pas de trop de dépenses, mais de recettes insuffisantes liées aux politiques d'exonérations de cotisations sociales ».
En matière de bien commun, Isabelle Bigand, de la CGT d'Orly, revient sur l'âpre bataille menée contre la privatisation d'ADP, qui a abouti au référendum d'initiative partagée (RIP). « ADP est un fleuron industriel, une manne pour l'état d'environ 300 millions d'euros par an ». « Dans la santé, la fonction publique, l'école, l'assurance-chômage, les attaques sont fortes. La mère des batailles à venir, ce sont les retraites », continue Benoît Martin. « La question des retraites va être centrale les prochains mois. Si on laisse faire, les salariés devront s'épuiser au travail », enchérit Thierry Dumez. La CGT appelle à manifester le 24 septembre.
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