27 mars 2020 | Mise à jour le 28 mars 2020
On ne parle pas d'eux et pourtant… Depuis le 15 janvier, la quasi-majorité des postiers de la Plateforme de distribution du courrier d'Yzeure exercent leur droit de retrait. En cause ? Pas la peur du coronavirus, mais le management par la terreur qui règne dans l'établissement postal depuis des mois.
L'histoire remonte au 5 décembre, lors du premier jour du formidable mouvement de grève interprofessionnelle contre la réforme des retraites. Les postiers bourbonnais d'Yzeure (Allier) de la plateforme de distribution du courrier se joignent à la mobilisation et organisent un piquet de grève sur leur centre.
Une provocation pour le directeur d'établissement qui distribue des blâmes à trois salariés grévistes. Ce n'est pas la première fois que ce directeur joue au surveillant général. En février 2019 déjà, il avait voulu faire un exemple, lors d'une configuration identique — un mouvement de grève nationale — en distribuant deux mises à pied à des salariés précarisés. La grève de l'ensemble du personnel avait fait rebrousser chemin au directeur.
Est-ce ce revers que la direction a du mal à digérer ? Veut-elle encore faire un exemple et intimider les salariés ? « Ce qui est certain, c'est que ces récents blâmes ont été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase », explique Christelle Hébrard de la FAPT-CGT 03.
En témoigne le droit de retrait collectif — 47 personnes sur un effectif de 52 — qui s'en est suivi. Les postiers estimant que la situation de stress aigu et d'un état de tension permanent au travail ne leur permettaient plus de travailler dans des conditions décentes.
Surcharge de travail et management délétère
Les postiers d'Yzeure pointent notamment la « surcharge de travail et le climat délétère » qui règne ici. Cité par La Montagne (11 mars 2020), Maud, une postière parle « de boule au ventre et de larmes aux yeux » en venant travailler. D'autres ne supportant plus la pression enchaînent les arrêts maladie. La désorganisation du travail peut rendre malade, surtout les professionnels qui ont à cœur de remplir leur mission de service public.
« Les postiers n'ont plus le temps de distribuer le courrier sans dépasser le temps des tournées, mais, s'ils dépassent l'horaire, ça ne va pas. S'ils ramènent du courrier, ça ne va pas non plus », détaille encore Christelle Hébrard pour donner à voir les injonctions paradoxales qui rythment le quotidien des postiers.
Devant le manque de considération, ceux-ci refusent désormais de discuter avec leur direction qui, elle, conteste la légalité de leur droit de retrait. L'union départementale CGT de l'Allier est intervenue auprès de la préfecture et a demandé la mise en place d'une médiation placée sous l'autorité des services de la préfecture. En attendant, l'affaire est portée devant le tribunal administratif et le conseil de prud'hommes pour que celui-ci statue sur la légalité du droit de retrait.
Depuis, la crise sanitaire du Covid-19 semble avoir effacé toutes autres informations et les droits de retraits pour mise en danger de la santé des salariés se multiplient. Pas une raison pour oublier les postiers d'Yzeure dont la situation sociale est critique. En mars, ils auront un salaire au point mort. Une caisse de solidarité est en ligne pour les aider à passer ces temps difficiles.