« Au gibet noir, manchot aimable, dansent, dansent les paladins […] ». C’est au détour d’une émission consacrée à Arthur Rimbaud, cet été (1), que sa voix est parvenue à nos oreilles. Elle nous disait quelque chose, cette voix, mais comment être sûr que c’était bien elle ; celle de Babx, le chanteur que nous avions découvert en 2013 avec Drones personnels ? Après confirmation, manquait plus qu’à se procurer son dernier opus, Cristal automatique. Un véritable feu d’artifice poétique. À commencer par le premier titre, Conversation, où, sur un morceau de piano, les déclarations de Ferré, de Prévert – « Moi la Poésie, je ne sais pas ce que c'est » ou d'Artaud scandant : « Magie Noire ! », se succèdent.
L’idée a germé, il y a deux ans, quand Olivier Chaudenson, directeur de la Maison de la poésie, lui propose une création autour des textes de poètes qui lui sont chers. « J'ai essayé tout simplement de partir de l'émotion pure que m'inspiraient certains textes, et de composer leurs jumeaux musicaux », explique Babx.
Après un concert littéraire, vient donc un album. Et c’est plus que réussi, excepté peut-être pour Aimé Césaire et son Crystal automatique, qui donne son nom à l’opus. Tout le reste est un régal. Le chanteur module sa voix comme la musique pour coller au plus près de l’atmosphère que dégagent les mots des poètes. Ceux tirés du Bal des pendus, comme de Mes petites amoureuses d’Arthur Rimbaud, tournoient et décollent, ceux de Pull my daisy, de Jack Kerouac, prennent les chemins d’un morceau jazzy et d’une voix un brin voilée. Il sait même la faire chuchotante, Babx, quand il reprend Watch her Disappear, du bluesman Tom Waits.
Pour composer ce bijou créatif, Babx s’est autoproduit. La liberté est souvent à ce prix. Celle de nous faire découvrir la plume magnifique du poète québécois Gaston Miron, dans un morceau de 10 minutes extrait de La marche à l’amour. « J’ai tué pour les yeux bleus d’un bel indifférent, qui jamais ne comprit mon amour contenue » : même aisance dans la longueur, pour que nous apparaisse dans toute sa splendeur Le condamné à mort, de Jean Genet. Avec Cristal automatique, le chanteur répond en quelque sorte à l’immense Préface, de Léo Ferré : « La poésie est une clameur. Elle doit être entendue comme la musique. Toute poésie destinée à n’être que lue et enfermée dans sa typographie n’est pas finie. »
(1) Écouter l’émission la « Grande traversée » de Jean-Michel Djian et de Charlotte Roux, consacrée à Rimbaud.
Cristal automatique 1, de Babx.
Bison Bison, 13 euros.
À noter, d’ores et déjà, que Babx se produira sur la scène du CentQuatre, à Paris,
le jeudi 22 octobre à 20 h 30.
De même que les contes, les chansons, complaintes et comptines populaires ont souvent un double sens. Avec l’album « Faces cachées », le quintette virtuose « Les Têtes de... Lire la suite
Alexis HK est de ces chanteurs qu’on écoute, de ceux qui cisèlent leurs textes sans se soucier des modes. « Comme un ours », son 9e album est un petit bijou de poésie du... Lire la suite
